Cet été, le Congrès dirigé par les démocrates a adopté l’immense plan d’investissement de Joe Biden, un texte qui comprend 370 milliards de dollars pour le climat, le plus gros chèque pour l’environnement jamais signé aux Etats-Unis.
Les conservateurs du « Grand Old Party », traditionnellement moins favorables à la lutte contre le changement climatique, ont voté contre.
Quel que soit le résultat final des élections de mardi, encore attendu, les républicains ne seront pas en mesure de revenir sur cette législation ou d’autres lois similaires, faute de l’immense majorité nécessaire pour outrepasser un veto présidentiel.
« Dans le cas (le pire pour le climat) où les républicains prendraient le contrôle des deux chambres et tenteraient de revenir sur ce qui a été fait, ils auraient très peu de succès », estime auprès de l’AFP Nat Keohane, président du centre de réflexion The Center for Climate and Energy Solutions, et ancien conseiller climat de Barack Obama.
« Même s’ils ne contrôlent qu’une seule chambre, » poursuit Barry Rabe, spécialiste des politiques environnementales, « ils pourront conduire des auditions et des enquêtes pour exposer le gouvernement sous un mauvais jour, mais ils sont limités dans ce qu’ils pourraient faire dans les deux prochaines années », analyse ce professeur à l’Université du Michigan.
– « Deux années de perdues » –
D’autant plus qu’avec une campagne centrée autour de l’inflation, de la criminalité et de l’immigration, les républicains n’ont pas mis en avant de programme sur le climat. « Ils n’ont aucun plan sérieux, » affirme même Jeffrey Colgan, directeur du Climate Solutions Lab de l’Université Brown.
Mais, nuance cet universitaire, « le résultat le plus important de ces élections de mi-mandat concerne le Sénat », dont la composition finale ne sera connue qu’après un second tour en Géorgie début décembre.
Et c’est à la chambre haute d’approuver les nominations cruciales pour les agences fédérales et les postes de juges, qui disposent d’un important pouvoir sur les décisions environnementales.
Du côté des autorisations de forage pour le gaz et le pétrole, « le Congrès a un pouvoir limité », note Nat Keohane, « je ne pense pas qu’on va voir un changement majeur » de ce côté-là.
Au niveau fédéral, reprend-t-il, cela pourrait donc être « deux années de perdues » jusqu’aux élections de 2024. « Ce n’est pas idéal, mais je ne crains pas vraiment de retour en arrière ».
– Pouvoir des Etats –
A cet optimisme relatif des experts interrogés, tiré de la crainte d’une « vague » républicaine finalement jamais arrivée, s’ajoute « un autre résultat au moins tout aussi positif pour les démocrates », selon Barry Rabe: d’importantes victoires au niveau des Etats, « qui ont un pouvoir et une autonomie immenses pour aller plus loin que le gouvernement fédéral. »
En 2017, le retrait par Donald Trump des Etats-Unis de l’accord de Paris sur le climat avait poussé la Californie et d’autres Etats à porter leurs propres ambitions.
Mardi, plusieurs gouverneurs et assemblées locales démocrates pro-climat ont été élues, ce qui permettrait que les fonds fédéraux déjà votés « soient utilisés à fond » sur le terrain, ajoute M. Rabe.
« L’action des Etats est cruciale pour la décarbonation », renchérit Jeffrey Colgan. Il prend l’exemple de Maura Healey, élue mardi gouverneure du Massachusetts, et qui veut d’une électricité 100% « propre » d’ici 2030, soit « cinq ans avant l’objectif fixé par Biden pour les Etats-Unis dans leur ensemble », souligne-t-il.
« Si on se retrouve avec un Congrès qui n’agit pas, l’action des Etats va être majeure », relève Nat Keohane, et à ce niveau-là, dit-il, « les démocrates sont bien plus motivés pour agir que les républicains. »
Dans l’Etat de New York, les électeurs ont ainsi dit « oui » à la levée de 4,2 milliards de dollars pour le climat – une proposition soutenue par la gouverneure démocrate Kathy Hochul, qui a gardé son poste à l’issue d’une campagne serrée.
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