La France est le pays d’Europe qui a accueilli le moins de réfugiés ukrainiens par rapport à sa population

En mars 2022, Emmanuel Macron annonçait que la France avait accordé à 15 000 Ukrainiens la protection temporaire mise en place par l’Union Européenne suite au déclenchement de la guerre en Ukraine. Cette protection permet aux personnes qui vivaient en Ukraine avant le 24 février de bénéficier de droits tels que le droit de séjour, l’accès au marché du travail ou encore l’assistance sociale, pour une durée d’un an, qui peut être étendue. «Cet élan de solidarité de la nation pour les Ukrainiennes et les Ukrainiens va se poursuivre, ajoutait le président français. Car les femmes et les enfants qui quittent l’Ukraine sous les bombes aujourd’hui auront besoin de notre soutien sans faille.»

Un Ukrainien pour 1 000 habitants
Huit mois plus tard, environ 5 millions d’Ukrainiens, en grande partie des femmes et des enfants ont trouvé refuge en Europe, selon les dernières données du HCR. Et la France figure au dernier rang des pays européens en matière d’accueil des réfugiés, relativement à la taille de sa population.

Ainsi, selon les données d’Eurostat (addition du nombre mensuel de protections accordées de mars à septembre), 76 865 Ukrainiens ont obtenu une protection temporaire en France. Sur les 30 pays européens pour lesquels l’organisme statistique européen a publié des données, la France est ainsi le pays ayant accueilli le moins de réfugiés, relativement à sa population, avec à peine plus d’un ukrainien pour 1 000 habitants (le chiffre exact étant 1,13).

A noter que nous n’avons pas fait figurer l’Allemagne et la République tchèque dans ce classement, ces deux pays ayant transmis peu de données de «flux». Mais d’autres indicateurs permettent de mesurer que ces deux pays ont accueilli beaucoup plus de réfugiés ukrainiens que la France, que ce soit en valeur absolue ou relativement à leur population.

Eurostat fournit un autre indicateur, avec des données de «stock» (qui comptabilisent le total de personnes bénéficiant de protection temporaire dans le mois de référence). Ces données diffèrent parfois à la marge des données de flux, mais le résultat est le même : la France figure également au dernier rang des pays européens. Rapportées à la population française, les données confirment que la France accueille environ 1 ukrainien pour 1 000 habitants.

Pour les données de «stock», l’Italie et l’Islande n’ont pas transmis de chiffres.

Faible diaspora en France
Interrogées par CheckNews, des associations créées pour venir en aide aux Ukrainiens ne mettent pas cause l’accueil français, estimant qu’il est très facile de faire une demande de protection temporaire en France. Pour elles, si la France se classe dernière de ce classement, c’est d’abord pour des raisons géographiques, parce que les Ukrainiens se rendent plus facilement dans les pays frontaliers : plus de 2 000 km séparent Paris et Kiev. La proximité culturelle et l’importance de la diaspora ukrainienne dans les différents pays sont aussi des facteurs qui facilitent l’intégration des Ukrainiens. Ce qui explique qu’on retrouve, sans surprise, essentiellement des pays de l’Est parmi les premiers pays d’accueil. On notera tout de même que l’Espagne affiche un nombre de protections accordées supérieur en valeur absolue.

Un membre de l’association Future for Ukraine, souligne quand même qu’«il est plus difficile de trouver des logements en ce moment en France». Pour obtenir la protection temporaire, les personnes en provenance d’Ukraine doivent fournir, entre autres, un justificatif de domicile, un passeport et une déclaration sur l’honneur.

Ce faible afflux vers la France n’est pas vraiment une surprise. En mars, Julien Boucher, directeur de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra) s’était montré prudent quant au nombre de réfugiés ukrainiens attendus dans l’Hexagone. Soulevant «la rapidité de l’afflux de personnes aux frontières de l’Ukraine», avec quelque 2 millions de personnes ayant fui l’Ukraine en une quinzaine de jours, il avait pointé le fait que la présence d’une diaspora ukrainienne importante pesait fortement dans le choix de pays d’accueil. Et de juger «difficile à anticiper» la proportion de personnes décidant d’aller jusqu’en France. Comme évoqué dans un article de Public Sénat, Gérald Darmanin, auditionné quelques minutes avant Julien Boucher, avait précisé devant le Sénat que la diaspora ukrainienne était assez faible en France, expliquant par là le fait que seuls 5 000 Ukrainiens étaient alors arrivés en France.

A noter que l’octroi de cette «protection temporaire» ne passe pas par l’Ofpra. C’est en effet la Direction générale des étrangers en France (DGEF) qui gère les demandes. Ces dernières se faisant auprès des préfectures. «La protection temporaire est un régime très large, peu de personnes ne devraient pas rentrer dans le champ d’application», déclarait le directeur de l’Ofpra en mars 2022. Une fois acceptés, les bénéficiaires reçoivent une autorisation provisoire de séjour, selon le site du gouvernement. Si cette démarche exonère les Ukrainiens d’une demande d’asile pour se trouver en situation régulière, ils peuvent, dans l’hypothèse où ils le souhaiteraient, en faire la demande ultérieurement.

liberation

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