Le plus important rassemblement de dirigeants mondiaux depuis le début de la pandémie s’est ouvert ce mardi matin dans le cadre tropical de l’île indonésienne de Bali avec un absent de marque : Vladimir Poutine. Après neuf mois de guerre meurtrière, qui a fait flamber les prix de l’énergie ainsi que de l’alimentation, et vu ressurgir la menace nucléaire, l’invasion de l’Ukraine ne figure pas à l’agenda officiel du G20. Elle domine toutefois la réunion et expose les divisions entre les Occidentaux soutenant Kiev et d’autres pays, Chine en tête, qui refusent de condamner Moscou.
Pour autant, les 20 membres de ce club créé à l’origine pour gérer les questions économiques se sont mis d’accord sur un projet de communiqué, pourtant jugé peu probable ces derniers jours vu les lignes de fracture mais aussi l’accord nécessaire de Moscou.
Ce document, s’il est adopté par les dirigeants, constate les répercussions négatives de la «guerre en Ukraine» et il précise que «la plupart des membres» «condamnent fermement» le conflit et juge «inadmissible» le recours ou la menace de recours à l’arme nucléaire. Ce projet de document vise également à prolonger l’accord négocié en juillet sous l’égide de la Turquie, qui a permis de livrer quelque 10 millions de tonnes de céréales ukrainiennes.
De retour de Kherson, ville du sud de l’Ukraine tout juste reprise par son armée, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a proposé de prolonger «indéfiniment» cet accord. Il a été l’un des premiers à s’exprimer par visioconférence devant ce qu’il a appelé le «G19», en excluant la Russie. Un malaise dans la salle où était présent le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov. «Je suis convaincu qu’il est temps à présent que la guerre destructrice de la Russie s’arrête», a déclaré le président ukrainien, dans son habituel t-shirt kaki. Elle «doit et peut être arrêtée».
Son plan pour ramener la paix et «sauver des milliers de vies» : ne pas faire confiance à la Russie, ne tolérer «aucune excuse au chantage nucléaire» face aux «folles menaces» de Moscou et surtout réaliser un échange total de prisonniers.
La Chine au centre du jeu
L’hôte de l’événement, le président indonésien Joko Widodo s’est aussi prononcé en faveur de la paix : «Nous ne devons pas diviser le monde en plusieurs camps. Nous ne devons pas laisser le monde basculer dans une nouvelle Guerre froide». Tous les regards sont tournés vers la Chine, grande puissance dont le président Xi Jinping s’est encore rapproché de Vladimir Poutine à la veille de la guerre, formant un front commun contre ce qu’ils décrivent comme les volontés hégémoniques occidentales. Pékin a refusé de condamner l’invasion de l’Ukraine lancée le 24 février.
Mais à la tribune du G20, Xi Jinping a appelé à s’opposer à une «instrumentalisation» des produits alimentaires et de l’énergie, dans une critique à peine voilée à son allié russe. Il n’a cependant pas épargné les Occidentaux, réclamant la levée des sanctions, telles celles visant la Russie, ou leur demandant d’en faire plus pour limiter les effets des hausses des taux d’intérêt mises en œuvre ces dernières semaines face à l’envolée des prix.
Or, lors d’une rencontre mardi matin avec le dirigeant chinois, le président français Emmanuel Macron lui a demandé d’interférer auprès du maître du Kremlin pour le convaincre de revenir à la «table des négociations», selon l’Elysée. Lundi, le président américain Joe Biden, lors de son premier face-à-face avec Xi Jinping depuis son élection, avait obtenu l’accord de son homologue chinois sur le rejet de tout recours à l’arme nucléaire en Ukraine.
liberation