L’administration d’antibiotiques aux animaux d’élevage baisse de manière quasi continue en France depuis dix ans, rapporte jeudi 17 novembre l’agence sanitaire Anses, qui compte surveiller l’exposition accrue des chats, chiens et chevaux à ces molécules.
Depuis 2011, point de départ du premier plan « Ecoantibio », l’exposition aux antibiotiques a diminué de 67,9% pour les volailles, 58,5% pour les porcs, 44,7% pour les lapins et 23% pour les bovins, indique l’Anses dans un dossier de presse.
Plus récemment entre 2020 et 2021, cette exposition a reculé de 0,9% pour les bovins, 7,2% pour les porcs, 8,6% pour les volailles et 12,7% pour les lapins.
En élevage porcin, par exemple, le leader français Cooperl affirme avoir limité le recours aux antibiotiques en supprimant la castration, synonyme de plaie susceptible de s’infecter.
Il sélectionne aussi des « animaux robustes » qui évoluent dans des bâtiments « le plus propre possible ». En cas de pépin, des « traitements alternatifs » (antioxydants, fluidifiants, antalgiques) sont administrés en priorité.
Les autorités incitent à réduire l’usage d’antibiotiques chez l’homme comme chez l’animal pour éviter le développement de bactéries résistantes aux traitements (antibiorésistance).
Les lapins les plus exposés
Chez les lapins – espèce la plus exposée aux antibiotiques -, la baisse de 12,7% sur un an succède à plusieurs années de hausse.
Pour traiter ces animaux notamment sujets à des pathologies digestives, des antibiotiques étaient régulièrement administrés de manière préventive, une pratique interdite depuis début 2022 au niveau européen.
« Des plans de maîtrise de la consommation d’antibiotiques ont été mis en place par les éleveurs. Vu la baisse qu’on a observée (en 2021), on peut penser que cette pratique est plutôt en voie de disparition » dans la filière cunicole, a déclaré Gilles Salvat, directeur général délégué au pôle recherche de l’Anses, lors d’une présentation à la presse.
L’interprofession du lapin (Clipp) soutient que les réglementations sont « strictement observées par les éleveurs ». « En aucun cas, la prescription et la délivrance d’antibiotiques ne sont possibles sans l’établissement d’un diagnostic par un vétérinaire », assurait-elle cette semaine dans un communiqué, après la diffusion sur France 5 d’un reportage rapportant des cas d’usage routinier.
L’exposition pour les animaux de compagnie en hausse
À rebours des animaux d’élevage, l’exposition aux antibiotiques des chats, chiens et chevaux s’est accrue.
« Après une baisse de 19,5% entre 2011 et 2016, le niveau d’exposition des chats et des chiens a augmenté sur les dernières années », pour revenir à un niveau proche de 2011, note l’Anses.
Une « meilleure médicalisation » peut expliquer cette hausse, avance le directeur de l’Agence nationale du médicament vétérinaire, Franck Fourès.
Autrement dit, les propriétaires d’animaux de compagnie les amènent plus volontiers chez le vétérinaire. C’est « plutôt une bonne chose d’avoir des animaux correctement traités », note M. Fourès.
« Quelque chose qu’il ne faut pas négliger »
Quant aux équidés, leur exposition aux antibiotiques a augmenté de 17,7% en un an, potentiellement du fait du « vieillissement de la population des chevaux », relève Franck Fourès.
Un motif de vigilance pour l’Anses: « Ce ne sont pas des animaux qu’on consomme » – ou à la marge pour les chevaux – « mais auxquels on est exposés quotidiennement. (…) C’est quelque chose qu’il ne faut pas négliger », dit Gilles Salvat.
Les plans Ecoantibio 1 (2012-2016) et 2 (2017-2022) sont qualifiés de « succès » par le Conseil général de l’alimentation (CGAAER) dans un rapport publié lundi par le ministère de l’Agriculture. Un plan Ecoantibio 3 est prévu.
Selon ce document, « les diminutions d’utilisation d’antibiotiques en médecine vétérinaire ont été si considérables que les marges de progrès encore possibles à l’avenir se réduisent désormais dans ce secteur ».
En élevage, les pratiques devront évoluer pour espérer diminuer davantage la consommation d’antibiotiques « dans les dix ans qui viennent », estime Gilles Salvat.
Le spécialiste de l’Anses cite le choix d’animaux « un peu plus robustes, à croissance plus lente », qui sont moins serrés avec leurs congénères voire disposent d’un accès au plein air.
varmatin