Avoir le VIH, virus responsable du Sida, aurait un impact sur notre horloge biologique, même lorsque l’infection est contrôlée par des antirétroviraux. Les personnes vivant avec le VIH ne sont plus condamnées à développer le Sida grâce à ces traitements, mais pourtant, leur espérance de vie n’est pas encore égale à celle des personnes sans le virus. Car les personnes séropositives ont un plus grand risque de développer d’autres problèmes de santé. Par exemple, leur risque de souffrir d’une maladie cardiovasculaire est le double que pour les personnes sans VIH.
Aussi, les personnes vivant avec le virus ont plus souvent des troubles du sommeil, alors qu’il a été montré que la qualité du sommeil est importante pour éviter plusieurs maladies, dont les maladies cardiovasculaires. Une étude d’Afrique du Sud a tenté d’élucider l’impact de porter le VIH sur le cycle du sommeil, afin de déterminer si cela pourrait avoir une conséquence sur la santé de personnes séropositives. L’étude, publiée le 29 octobre 2022 dans le Journal of Pinneal Research (spécialisé dans la recherche sur le sommeil) montre qu’en effet, avoir le VIH équivaudrait à être décalé d’environ une heure. Comme si ces personnes subissaient le passage en heure d’été (où l’on perd une heure de sommeil), mais tous les jours.
Étudier l’impact de l’infection au VIH sur le cycle du sommeil
Cependant, étudier le cycle de sommeil des personnes séropositives n’est pas simple, car des facteurs comportementaux (liés au style de vie) peuvent influencer leur sommeil. Pour contourner cet obstacle, les chercheurs ont choisi d’analyser des personnes âgées (la majorité étant à la retraite) vivant dans des milieux ruraux, avec donc des styles de vie plus tranquilles (et plus facilement comparables) que celui de personnes jeunes vivant dans de grandes villes. Au total, 187 personnes ont participé à l’étude, dont 36 avec le VIH. Mis à part le virus, ces deux groupes étaient relativement comparables dans leur état de santé, leurs niveaux socio-économiques et leur âge. Même si les séropositifs étaient un peu plus jeunes (60 ans en moyenne contre 68) et avaient moins fréquemment de l’hypertension.
Les personnes séropositives dorment moins que les autres
Pendant 14 jours, les participants ont porté un bracelet avec un accéléromètre qui permettait de suivre leur sommeil. En moyenne, les personnes séropositives se couchaient un peu plus tard et se réveillaient un peu plus tôt, ayant donc des nuits plus courtes (6h30 contre 7h10). Cependant, cette différence était moins marquée lorsque l’on ajustait pour des variables comme le sexe et l’âge : les personnes affectées par le VIH dormaient 12 minutes de moins que les personnes non infectées du même sexe et du même âge.
Le cycle de la mélatonine commence plus tard
Cependant, ces heures entre le coucher et le réveil n’étaient pas vraiment des heures de sommeil équivalentes pour les deux groupes. Les chercheurs ont analysé le taux de mélatonine dans la salive d’une partie des participants (51, dont 11 avec VIH). Cette hormone du sommeil dicte au corps les moments où il aura envie de dormir ou de se réveiller, en fonction de la lumière du soleil (ou d’autres sources lumineuses qui peuvent perturber le sommeil). Le cycle de la mélatonine était significativement décalé chez les personnes séropositives : la sécrétion de cette hormone la nuit commençait vers 21h16 pour les personnes vivant avec le VIH, contre 20 heures pour les non-infectées. Un peu plus d’une heure de différence donc, même en ajustant pour l’âge et le sexe.
Ce décalage entre l’heure du sommeil selon la mélatonine ou selon l’accéléromètre suggère que les personnes séropositives se couchent alors qu’elles n’ont pas encore vraiment sommeil. En gros, elles regardent le plafond en attendant de tomber dans les bras de Morphée un peu plus longtemps que les autres. Selon les auteurs, cela complique l’initiation des différentes phases de sommeil. Un problème récurrent chez les personnes âgées qui pourrait être empiré par le VIH. Ces résultats, s’ils se confirment chez des personnes plus jeunes ou vivant dans d’autres contextes, montreraient que l’horloge biologique des personnes séropositives est décalée. Ce qui ouvrirait la voie à des traitements pour gérer ce décalage et ainsi éviter les conséquences négatives que ce décalage pourrait avoir sur la santé.
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