Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a dénoncé la poursuite d’un écocide en mer Noire.
Des milliers de dauphins se sont échoués sur ses rives depuis le début de l’invasion russe en Ukraine.Mais d’autres impacts ont également été recensés, notamment sur les bancs de poissons.
Depuis le début de la guerre, la même scène se répète sur les rives de la mer Noire. En Ukraine, mais aussi en Roumanie, en Bulgarie ou en Turquie, un nombre accru de dauphins morts s’échouent sur les plages de ces pays. « Les Russes ont attaqué le 24 février 2022 et le 25, la première série de dauphins communs a été enregistrée sur la côte turque », rapporte ainsi auprès de TF1info le chercheur ukrainien Pavel Gol’din.
Aux côtés de biologistes et chercheurs d’autres pays qui bordent la mer Noire, ce scientifique surveille, au sein de l’Institut de zoologie de Schmalhausen de l’Académie nationale des sciences d’Ukraine, l’évolution de la population de cétacés dans cet écosystème marin.
50.000 dauphins tués depuis le début de la guerre
Alors que cette espèce était déjà menacée dans un environnement fragilisé avant la guerre par la pollution, les marées noires, le trafic maritime et la pêche, le conflit et l’activité militaire marine ont accru son dépérissement. Car la mer Noire est le théâtre d’opération militaire à part entière depuis le début du conflit, Russes comme Ukrainiens s’affrontant aussi en mer. La flotte maritime russe et la présence de sous-marins notamment exerceraient une importante pression sur cet environnement marin.
D’après Ivan Roussev, directeur scientifique du parc national des Lagunes de Touzly, ce seraient 50.000 dauphins qui seraient morts à cause de la guerre, et 2500 cadavres auraient été répertoriés dans la région d’Odessa, en Crimée annexée, en Bulgarie, en Turquie et en Roumanie. Cela représenterait 20% de la population de ce cétacé en mer Noire, qui comptait 250.000 individus en 2020.
Des causes de mortalité toujours à l’étude
Si bien que le président ukrainien Volodymyr Zelensky a dénoncé un « écocide » perpétré par l’armée russe, dénonçant par là une grave atteinte portée à l’environnement, aux dommages majeurs, pouvant aboutir à la destruction de cet écosystème. C’est ce qui semblerait sur le point de se produire, selon Ivan Roussev. « C’est une énorme tragédie », a-t-il déclaré auprès de RFI. « Les gens doivent se rendre compte que la mort des dauphins dans la mer Noire signe la mort de son écosystème ».
Plusieurs causes pour expliquer cette surmortalité sont évoquées par les scientifiques, alors que des études sont en cours dans plusieurs laboratoires européens pour clarifier le phénomène. Leur mort pourrait effectivement être expliquée par un traumatisme acoustique provoqué par le mouvement des navires militaires et les explosions qui surviennent en mer Noire. « Un autre scénario serait celui d’une flambée d’infections », énumère Pavel Gol’din.
« D’autres animaux ont été retrouvés complètement épuisés et traumatisés, sans être mortellement malades », ajoute-t-il, citant encore la possible dégradation de l’environnement et un déplacement des bancs de poissons pour expliquer ce pic de mortalité. Une dernière explication testée par les scientifiques serait la combinaison de ces quatre hypothèses.
La destruction d’algues, la fuite d’oiseaux et de poissons
En plus du déplacement des bancs de poissons, la Fondation turque de recherche marine (Tudav) a aussi observé des conséquences de la guerre dans « les zones humides et les réserves de biosphère de la mer d’Azov, du delta du Danube et du golfe d’Odessa », où la biodiversité est fragile. Destination de migration, certaines espèces d’oiseaux y seraient pourtant parties plus tôt dans l’année, fuyant les missiles qui s’y abattent.
« La destruction d’algues rouges (Phyllophora) menacées, qui constituent des lieux de vie pour de nombreuses espèces marines dans cette région et qui diminuent rapidement dans la mer Noire, est une source de préoccupation pour la biodiversité », estimait également le Tudav, qui ajoutait par ailleurs que « l’ampleur des dommages causés à l’écosystème marin et aux espèces lors de la détonation des mines trouvées en Turquie et en Roumanie est inconnue ».
Face à ce premier constat, le président ukrainien a affirmé que les autorités compétentes en matière de protection environnementale « recueillent les preuves de ces crimes et ont l’intention de tenir la Russie responsable de cet écocide ». Un ajout à la liste des nombreuses autres conséquences provoquées par l’invasion de la Russie en Ukraine, qui se poursuit depuis désormais plus de neuf mois.
tf1