Une enfant sauvée d’un cancer “incurable” grâce à traitement expérimental

Grâce à un protocole basé sur la bio-ingénierie de cellules immunitaires, la leucémie d’Alyssa est entrée en rémission après 28 jours.

Au Royaume-Uni, une jeune fille de 13 ans est devenue la toute première personne à recevoir un traitement expérimental basé sur la reprogrammation génétique de cellules pour traiter un cancer jugé « incurable » par les médecins ; ces derniers annoncent désormais que la petite Alyssa est entrée en rémission. Une excellente nouvelle qui permettra de défricher de nouvelles pistes thérapeutiques pour guérir ce fléau de santé publique.

D’après le communiqué repéré par ScienceAlert, l’intéressée a passé les derniers mois à se battre contre une terrible maladie. En 2021, ses soignants lui ont diagnostiqué une leucémie lymphoblastique aiguë (LLA). C’est une forme de cancer de la moelle osseuse qui apparaît brutalement, ce qui peut rendre la prise en charge difficile.

Des acteurs de l’immunité malformés

Les leucocytes (globules blancs) se forment habituellement dans la moelle osseuse. Mais chez les patients atteints de LLA, ces acteurs centraux du système immunitaire sont incapables de se développer jusqu’à maturité. Ils ne peuvent donc pas jouer leur rôle dans la défense de l’organisme. Et cela déclenche tout un tas de conséquences néfastes qui peuvent conduire à la mort en l’absence de traitement.

Ces cancers sont souvent traités à l’aide d’un protocole standard à base de chimiothérapie et de greffe de moelle osseuse. Les résultats laissent à désirer chez les adultes avec un taux de survie de 30 à 40 %. Mais ils sont généralement plutôt bons chez les enfants ; d’après la société américaine d’oncologie clinique, près de 90 % des enfants qui reçoivent un traitement approprié survivent.

Mais comme souvent dans le cas de ces maladies pernicieuses, il reste une part de chance non négligeable — et la chance, Alyssa n’en a malheureusement pas eu. Au terme du protocole standard, son cancer est reparti de plus belle ; les médecins se montraient alors particulièrement pessimistes. D’après le communiqué, certains considéraient même que son cancer était désormais incurable. À court d’options, ils se sont donc tournés vers une alternative expérimentale.

Le génie génétique à la rescousse

La jeune fille a ainsi été intégrée à un essai clinique basé sur un transfert de lymphocytes T. Ce sont des globules blancs spécialisés dans la réponse immunitaire adaptative, celle qui permet à notre corps de répondre en temps réel à la présence de matériel étranger.

Très sommairement, ce sont des tueurs à gages chargés de détruire les virus, bactéries, cellules cancéreuses, et autres structures indésirables. Pour ce faire, ils présentent à leur surface des protéines bien spécifiques ; elles leur permettent d’identifier précisément les objets visés.

Dans ce cas précis, les lymphocytes T en question étaient un peu particuliers. Ils ont été prélevés à partir d’un donneur sain, puis modifiés génétiquement. Pour cela, les chercheurs ont utilisé un outil très populaire en bio-ingénierie : Crispr-Cas9, une technique dont la découverte a valu un prix Nobel a la Française Emmanuelle Charpentier.

Crispr-Cas9 est souvent surnommé « ciseau moléculaire », car il consiste à découper le matériel génétique de la cible de façon très précise. Cela permet d’y introduire un nouveau gène, ou en désactiver d’autres. Dans le cas de cet essai clinique, le gène introduit permettait aux lymphocytes T d’exprimer la fameuse protéine qui permet de cibler les cellules cancéreuses sans se détruire entre elles.

Un potentiel clinique considérable

Une fois modifié ainsi, il ne restait plus qu’à introduire ces lymphocytes (baptisés CAR-T) dans l’organisme d’Alyssa. Et le résultat a été carrément spectaculaire ; 28 jours plus tard, les médecins n’ont pas trouvé la moindre trace de cellule cancéreuse. La jeune fille est donc officiellement considérée en rémission.

Il faut toutefois faire une distinction très importante : il est encore trop tôt pour parler de véritable guérison. Car très souvent dans le cas de ces maladies, il suffit de quelques cellules cancéreuses qui se multiplient de façon anarchique pour relancer la machine. Même s’ils se réjouissent de cette réussite, les médecins tiennent donc à rester très prudents.

« C’est remarquable, même s’il s’agit seulement d’un résultat préliminaire dont les résultats devront être suivis et confirmés au cours des mois à venir », se félicite tout de même Robert Chiesa, responsable du protocole au Great Ormand Street Hospital for Children.

La famille, en revanche, est bien évidemment aux anges ; la jeune fille peut désormais espérer une vie parfaitement normale, ce qui semblait totalement impensable il y a quelques mois à peine. Altruiste, elle espère d’ailleurs que son expérience permettra d’aider des tas d’autres patients dans sa situation.

Et c’est un espoir tout à fait légitime. Car cette preuve de concept suggère aussi qu’il est théoriquement possible de soigner d’autres formes de cancers à l’aide de ces thérapies géniques. Une fois que ces techniques auront gagné en maturité, elles auront donc un potentiel immense; d’ici quelques années, il s’agira peut-être d’un outil de premier choix dans la lutte contre ce fléau de santé publique.

 

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