Apple se prépare à ouvrir son écosystème en Europe

Pour se conformer aux nouvelles règles européennes sur le numérique, l’iPhone devrait accueillir de nouveaux magasins d’applications.

Une petite révolution se prépare dans les iPhone européens. Selon les informations de Bloomberg, Apple travaille à autoriser au sein de l’Union européenne d’autres magasins d’applications que le sien sur ses smartphones, ce qu’il avait toujours fermement refusé de faire. Les possesseurs d’iPhone pourront ainsi télécharger des applications en dehors de l’App Store d’Apple, du jamais vu.

Cette modification ouvre aussi la possibilité pour les développeurs d’échapper à la commission de 30 % qu’Apple prélève sur les transactions opérées dans l’App Store. Une demande forte de plusieurs acteurs du numérique comme Spotify, Epic Games (Fortnite) ou le géant des sites de rencontres Match, qui accusent Apple d’abus de position dominante. Contacté par Le Figaro, Apple n’a pas souhaité commenter les révélations de Bloomberg. «Ces informations sont l’aveu qu’Apple a bien étouffé la concurrence et que leurs déclarations antérieures sur les risques posés par les App Stores tiers étaient fallacieuses», clame le lobby Coalition for App Fairness.

C’est en effet au nom de la sécurité de ses utilisateurs qu’Apple a verrouillé son écosystème dès le début de l’iPhone, en 2007. Toutes les applications et leurs mises à jour doivent passer entre les mains des salariés de la firme, qui écartent les applications contenant des virus, mais aussi du contenu pornographique ou incitant à la haine et à la violence. «Lorsque les gens installent une application de l’App Store, ils veulent être sûrs qu’ils peuvent le faire en toute sécurité», écrit Apple dans les règles dédiées aux développeurs.

Des amendes dissuasives
Ce revirement soudain ne vient pas de nulle part. Apple est en effet contraint de se conformer au Digital Markets Act (DMA), une législation européenne votée cette année visant à mettre fin aux comportements anticoncurrentiels des géants du numérique. Les plateformes considérées comme «contrôleurs d’accès», qui seront désignés par la Commission européenne durant l’été 2023, auront jusqu’à début 2024 pour respecter toute une série d’obligations.

Parmi celles-ci, ne pas favoriser leurs propres services, autoriser la suppression des applications préinstallées sur les smartphones, ne pas imposer leur système de paiement, informer Bruxelles de tout projet d’acquisition… et accueillir des magasins d’applications tiers.

Les contrôleurs d’accès qui ne suivront pas ces règles s’exposent à une amende de 10 % de leur chiffre d’affaires annuel, qui pourra monter à 20 % en cas de récidive. Soit pour Apple, 35 milliards d’euros à la première sommation. C’est pourquoi, selon Bloomberg, le groupe américain prépare sa mise en conformité pour son futur système d’exploitation iOS 17, qui sortira en 2023. Outre l’arrivée de nouveaux magasins d’applications, Apple se prépare aussi à permettre à d’autres sociétés de se servir de la puce NFC de l’iPhone, qui sert actuellement à effectuer des paiements en magasin via la fonction Apple Pay.

Ces changements concerneront uniquement le continent européen. «Cela va laisser les développeurs américains dans une situation de servitude. Le Congrès doit voter l’Open App Markets Act», aux visées similaires au DMA, clame le PDG d’Epic Games, Tim Sweeney, en conflit judiciaire avec Apple depuis que son jeu Fortnite a été exclu de l’App Store.

Mais le diable se cache dans les détails. Selon Bloomberg, Apple réfléchit à faire payer les développeurs qui ne passeront pas par son App Store en exigeant, par exemple, un audit de sécurité. Il n’est pas encore certain de se conformer à l’obligation d’accepter d’autres systèmes de paiement que le sien sur les applications distribuées via l’App Store, où il prélève de 15 % à 30 % de commission.

Et la présence de magasins d’applications tiers ne garantit ni leur visibilité, ni leur succès – l’écosystème Android, dominé par Google Play malgré son ouverture, en est l’illustration. L’inflexion d’Apple pourrait impulser une nouvelle génération de magasins d’applications. Microsoft travaille sur un «Xbox Store», qui lui permettrait de distribuer ses jeux vidéo sur smartphones.

lefigaro

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