Sa détestation « pathologique » des étrangers avait déjà guidé ses pas : accusé d’avoir tué trois Kurdes vendredi à Paris, William Mallet est aussi soupçonné d’une attaque au sabre contre un camp de migrants en décembre 2021, dont le traitement policier a scandalisé des ONG.
Quand se produit l’attaque dans le XIIe arrondissement de Paris, le sexagénaire au profil trouble est déjà connu de la justice. Condamné en 2017 pour détention prohibée d’armes, il était également au moment des faits mis en examen pour l’agression au couteau de ses cambrioleurs en 2016, qui lui vaudra une peine de douze mois de prison avec sursis dont il a fait appel.
Le 8 décembre au matin, c’est armé d’un long sabre qu’il fait irruption dans les jardins de Bercy où des migrants en mal d’hébergement ont établi leur campement. « C’était un parc où on avait installé des familles exilées et comme à chaque fois le campement avait grossi », se souvient Nikolaï Pozner, de l’association Utopia56. « Des hommes seuls s’étaient installés un peu plus loin en pensant que la présence de familles leur apporterait une forme de sécurité ».
“Il avait sorti un sabre d’un coup et lacéré des tentes”
C’est toutefois à eux que William Mallet s’attaque ce matin-là. Il lacère plusieurs tentes et blesse deux migrants, dont l’un grièvement, avant d’être maîtrisé par d’autres occupants du campement. « Il avait fait semblant de faire son footing et d’un coup avait sorti un sabre et lacéré des tentes. A travers les tentes, il a touché plusieurs personnes et s’en est pris à une personne qui faisait pipi debout, l’a frappée au dos et à la hanche », raconte à l’AFP Cloé Chastel, qui était alors une responsable de l’association Aurore.
Une telle agression était rarissime. « Il peut y avoir des rixes entre réfugiés vu leurs conditions de vie, mais on n’avait jamais vu quelqu’un venant de l’extérieur faire une chose pareille », affirme à l’AFP Ian Brossat, adjoint à la mairie de Paris en charge des réfugiés. Peu après l’attaque, les forces de l’ordre interviennent et interpellent l’assaillant et quatre migrants, dont l’un des blessés. Tous seront placés en garde à vue pendant quarante-huit heures.
« Dans un premier temps, on peut comprendre qu’il fallait interpeller les personnes qui participaient à ce qui ressemblait à une rixe mais il a manqué le deuxième temps où on essaye de comprendre », estime M. Pozner, affirmant que les migrants n’ont été assistés d’aucun interprète.
Emoi
Le parquet va, lui, changer son analyse. Si l’enquête préliminaire est ouverte le jour des faits pour « tentative d’homicide volontaire », l’information judiciaire qui lui succède deux jours plus tard vise, elle, des « violences avec arme, préméditation et à caractère raciste ». C’est sous ce chef de poursuites, moins grave, que William Mallet est mis en examen le 10 décembre et placé en détention provisoire.
Les quatre migrants arrêtés à ses côtés sont, eux, placés sous le statut intermédiaire de témoin assisté et l’un d’eux, un Marocain sans-papiers, se voit alors notifier une obligation de quitter le territoire français, au grand dam des ONG. Un autre épisode va provoquer leur émoi. Le lendemain de l’attaque, des associatifs se rassemblent au parc de Bercy en soutien aux migrants encore traumatisés. Ils voient alors arriver les forces de l’ordre qui les encerclent et vont verbaliser plusieurs d’entre eux pour « participation à une manifestation interdite sur la voie publique ».
« La réponse à laquelle on s’attendait, un peu naïvement, c’était qu’on nous envoie des travailleurs sociaux, des psychologues et on nous a envoyé des policiers », dit à l’AFP Paul Alauzy, de Médecins du Monde, qui était sur place ce soir-là et a été conduit, « sirène hurlante », au commissariat où il sera relâché une heure après. Un an plus tard, les investigations sur cette attaque « sont toujours en cours », indique à l’AFP une source judiciaire, mais son auteur présumé est désormais mis en cause pour un triple meurtre. C’est à l’expiration du délai maximal de sa détention provisoire qu’il avait été remis en liberté le 12 décembre sous contrôle judiciaire, avec notamment l’interdiction de détenir une arme.
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