« J’ai voulu montrer l’homme qu’il était, sa simplicité, sa sentimentalité. Sa fragilité et sa proximité aussi« , assure Laeticia Hallyday. La veille de l’inauguration de Johnny Hallyday, l’exposition, à Bruxelles, elle déambule, accompagnée de Jade et de Joy, dans les travées de Brussels Expo. « Les filles ont beaucoup pleuré en découvrant le résultat final, confie-t-elle. Elles continuent d’apprendre des choses sur leur papa. A l’issue de cette visite, on aurait aimé toutes les trois que le temps se fige. »
L’exposition consacrée au chanteur disparu en décembre 2017 s’évertue à nous faire entrer dans la peau de Johnny. Dès les premiers instants, le spectateur assiste à ses entrées en scène les plus spectaculaires, en fendant la foule du Parc des Princes en 1983, ou Bercy en 2013, au creux d’une main géante pour le Zénith de Paris en 1984, ou suspendu à un filin pour le Stade de France en 1998. Eclairages dynamiques, projections monumentales et effets spéciaux jalonnent ce parcours. Des extraits vidéo replongent le spectateur dans les shows les plus fous de l’artiste. « En fermant les yeux, et en l’écoutant juste, mon cœur battait très très fort », raconte Laeticia.
« La dernière salle est une reconstitution du bureau de Johnny. Là où il a rendu l’âme il y a 5 ans »
Cinquante de ses costumes mythiques conçus par de grands couturiers (Jitrois, Sorbier, Saint-Laurent…) et vingt-trois guitares sont exposés dans cette grande halle. D’emblée, la première installation, une reconstitution de sa chambre d’adolescent, nous plonge aux origines. On découvre la vue que le jeune Jean-Philippe Smet avait au début des années 60 depuis cet appartement, situé à deux pas de la place Clichy, à Paris. Au mur, des affiches d’Elvis Presley. Un tourne-disque dans un coin, un ventilateur Calor dans l’autre. Un livre de Tex Avery ou le roman à succès Fils de la haine, de Caryl Chessman, l’histoire d’un condamné à mort, trônent dans sa petite bibliothèque.
Sur les photos de l’époque, on aperçoit l’adolescent avec la tante qui l’a élevé, Hélène Mar, qu’il appelait « maman ». Jeune homme, il pose avec la fille de cette dernière, Desta, danseuse. Il prendra comme pseudonyme le nom du mari de sa cousine, Lee Halliday. Ce sera pour lui comme une renaissance. Une erreur sur une pochette d’album ajoutera un deuxième « y » au patronyme. « Mes parents ne se sont occupés de moi que lorsque je suis devenu célèbre », l’entend-on confier dans une interview radio. La souffrance affleure au fil des mots. Mais pas le temps de s’apitoyer. La carrière du jeune Johnny est lancée après sa première participation à l’émission Paris Cocktail.
Unes de journaux, anecdotes, témoignages… Johnny Hallyday sous toutes les coutures
Le studio d’Europe 1 de l’époque a été reconstitué et des images d’alors parues dans Salut les copains défilent pour illustrer le décollage de la carrière de Johnny. Au fil de la visite, on s’arrête devant les deux murs réunissant toutes ses pochettes d’albums. « Il y en a certaines que je n’avais jamais vues », lance, impressionnée, Laeticia Hallyday, lorsqu’elle découvre la scénographie de l’exposition. L’épouse de Johnny, qui est accompagnée à l’inauguration par son nouvel amour, Jalil Lespert, est plus estomaquée encore par les centaines de couvertures de magazines consacrées à la star sur un mur d’images.
Le chanteur n’aimait pas beaucoup parler de lui. Il a pourtant confié quelques-unes de ses blessures au fil du temps et des interviews. La section de l’exposition intitulée « Solitude » les raconte. De très belles photos le montrent, le regard perdu, exténué au sortir d’un concert, en backstage ou à l’arrière d’une voiture. La voix de Johnny résonne dans l’audioguide et rappelle comment son père a un jour vendu son lit d’enfant pour aller s’acheter à boire.
Une autre anecdote est dévoilée par la voix de son ami, Jean Reno, le parrain de Jade et le narrateur de cette exposition. Il raconte ce jour où, alors qu’il faisait son service militaire, son chef a dit au jeune chanteur que son père l’attendait à l’entrée de la caserne. « Je n’ai pas de père », répond-il. « Allez-y, c’est un ordre », lui rétorque son supérieur. Une fois à l’extérieur, le chanteur voit son géniteur, une peluche à la main. Surgissent alors dix photographes. Le père de Johnny avait monnayé l’image de son fils à la presse. « Ce jour-là, il m’a détruit », glisse celui qui connaîtra plusieurs périodes de dépression et de descente aux enfers. Jusqu’à vouloir en finir avec la vie. Il finira par arrêter la consommation d’alcool et de cocaïne. Il voulait « voir la fin du film ». Celui-ci se termine, comme l’exposition, dans le bureau de sa maison de Marne-la-Coquette, La Savannah. C’est là que Johnny s’est éteint, à bout de souffle.