Des chercheurs dévoilent un drone qui peut voler « indéfiniment »

Des chercheurs chinois ont créé un prototype de drone alimenté par un faisceau laser; il n’aurait donc jamais besoin de se poser… en théorie.

Ces dernières années, les particuliers ont pu s’offrir des drones de plus en plus sophistiqués qui étaient longtemps réservés aux professionnels fortunés. Mais ces engins souffrent encore d’une limite universelle : l’autonomie, qui reste limitée à cause du poids des batteries. Une équipe de chercheurs chinois veut changer cela. Dans des travaux repérés par le South China Morning Post, ses membres ont présenté un concept qui pourrait permettre à un drone de voler « indéfiniment ».

Pour y parvenir, Li Xuelong et ses collègues de la Northwestern Polytechnical University (NPU) ont misé sur une technologie à base de lasers. Un brin surprenant, sachant que ces faisceaux sont plutôt utilisés pour détruire des quadcoptères indésirables. Dans ce cas précis, les chercheurs veulent s’en servir pour alimenter directement un drone en plein vol.

Pour cela, l’engin a été équipé d’un module de conversion photoélectrique. C’est un composant qui permet de transformer l’énergie transportée par une onde électromagnétique, comme la lumière du laser, en électricité utilisable directement par l’appareil. En théorie, ce dernier pourrait donc voler indéfiniment, du moins tant que le faisceau laser est maintenu.

C’est un concept qui a déjà été exploré dans différents contextes, notamment dans le secteur militaire. Cet article de Popular Mechanics décrit d’ailleurs un système comparable imaginé par l’US Army. Mais pour l’instant, personne n’a encore réussi à amener cette technologie à maturité.

Un cordon ombilical à base de lumière

C’est surtout à cause de deux limites principales. La première, c’est la capacité de suivi. En effet, pour alimenter un drone, le laser doit être braqué en permanence sur la cellule de conversion. Et c’est plus facile à dire qu’à faire, car les systèmes de ce genre peuvent aisément perdre les pédales dès qu’il rencontre une situation inconnue.

Pour contourner cet obstacle, les chercheurs chinois ont écrit un algorithme prédictif qui essaie de deviner le prochain mouvement du drone en permanence. Même si ce n’est pas indiqué explicitement, la formulation suggère qu’il pourrait s’agir d’un système basé sur l’intelligence artificielle.

Apparemment, il fonctionne plutôt bien, même dans des conditions tout sauf idéales. Les auteurs expliquent qu’il affiche une « bonne tolérance » aux différents niveaux d’éclairement, et ce dans n’importe quel environnement.

À partir de là, les chercheurs ont pu s’attaquer au deuxième problème, encore plus ardu : la transmission de l’énergie. Car même si un faisceau laser véhicule effectivement une certaine énergie, le rendement n’est pas parfait. Toute l’énergie fournie à l’appareil ne se retrouve pas transmise entièrement au faisceau. Et lorsque ce dernier traverse un milieu, une parte de l’énergie du laser va être perdue à cause du phénomène de diffraction. C’est ce qu’on appelle une atténuation, et cela signifie que l’énergie sera moins importante au bout du faisceau qu’à l’origine.

Une preuve de concept fonctionnelle

Pour fournir une quantité d’énergie suffisante au drone, les chercheurs ont dû réduire cette atténuation autant que possible. Ils ont donc développé une solution qui permet d’adapter la forme et la puissance du faisceau en temps réel. Cela permet de réduire l’impact négatif des turbulences atmosphériques sur le faisceau. Et, par extension, d’améliorer la transmission de l’énergie.

Ils y ont aussi ajouté un système de sécurité. Si un autre objet comme un oiseau passe entre le drone et la source du laser, l’intensité sera ajustée immédiatement pour éviter de l’endommager.

D’après le South China Morning Post, ces deux éléments ont été intégrés à un prototype. Ce dernier a réussi à se maintenir en l’air pendant une durée prolongée. Les auteurs considèrent que cette preuve de concept « démontre une autonomie potentiellement illimitée pour les drones alimentés optiquement » (ou ODD, pour optics-driven drones).

Il reste malheureusement plusieurs inconnues de taille. Par exemple, les auteurs n’ont pas indiqué combien de temps l’engin avait pu se maintenir en l’air. Et surtout, ils sont restés très discrets sur les caractéristiques de la cellule de conversion. On ne sait pas jusqu’à quelle distance elle peut fonctionner ni quel est son rendement. Rien de bien étonnant, sachant qu’il s’agit de technologies susceptibles d’être utilisées dans un contexte militaire.

Un intérêt à la fois militaire, industriel et civil

Dans ce domaine en particulier, le fait de pouvoir faire voler des drones en permanence serait effectivement très intéressant. Cela concerne notamment la surveillance. Les auteurs expliquent que ce système pourrait aussi faire des merveilles lors d’opérations de secours. « Dans des missions très longues, comme la recherche de touristes piégés par des inondations, le vol en continu permettra d’économiser un temps précieux », expliquent les auteurs des travaux.

Ils suggèrent aussi que ces ODD pourraient jouer un rôle déterminant dans la logistique de demain. Et cela concerne aussi bien l’industrie que les collectivités. « Les drones optiques pourront avoir un impact profond sur le contrôle du trafic, les patrouilles de sécurité, la logistique sans contact… », énumèrent les chercheurs. On peut aussi imaginer des « drones relais » qui permettraient d’acheminer ainsi de l’énergie sur de longues distances, et sans câble.

Ils ont aussi abordé l’avenir de cette technologie dans le domaine des transports.  « De grands drones pourraient être transformés en véritables bus aériens pour construire un réseau de transport en trois dimensions », indiquent-ils. Ils vont même encore plus loin. Selon eux, cette technologie permettrait même de créer un « satellite de basse altitude » ou une « lune artificielle ». Mais avant d’en arriver là, il faudra probablement faire de gros progrès en termes de rendement.

En attendant, il sera déjà intéressant de voir dans quels contextes cette technologie peut être utile en l’état. Malheureusement, il est impossible de proposer des pistes à ce niveau sans connaître le rendement de la conversion. Plus il sera faible, plus les ODD seront réservés à des institutions riches et puissantes, notamment du côté militaire. Même si cette technologie finit par s’imposer, il faudra probablement patienter quelques années de plus pour voir apparaître des applications grand public.

South China Morning Post

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