L’un des nombreux concepts qui permettront aux futurs colons d’être relativement autonomes sur notre satellite.
La NASA ambitionne depuis longtemps d’établir un avant-poste permanent sur la Lune, et ces efforts sont passés à la vitesse supérieure l’année dernière avec la mission Artemis I. Mais pour coloniser notre satellite, il ne suffira pas d’y installer des structures hermétiques. Il faudra aussi mettre en place des bases logistiques solides. Et c’est ce à quoi la NASA travaille en ce moment ; elle envisage de construire un long pipeline d’oxygène à destination du pôle sud de la Lune.
Si l’agence s’intéresse à cette idée, c’est parce qu’il sera indispensable d’exploiter les ressources locales lors d’une mission de longue durée. En effet, il est tout simplement inenvisageable d’expédier des centaines de rations d’oxygène depuis la Terre avec des fusées. Cela serait extrêmement onéreux et beaucoup trop contraignant en termes logistiques.
Et même arrivés sur place, les astronautes ne seraient pas au bout de leurs peines. Il faudrait utiliser une quantité d’énergie importante pour transporter le précieux gaz à bord de rovers. C’est évidemment problématique dans un environnement aussi hostile. Selon la NASA, ça serait même nettement moins rentable que de l’extraire et de le purifier sur place.
Cet oxygène sera utilisé pour subvenir aux besoins des astronautes, aussi bien dans les combinaisons que dans les habitats. Cela concerne également les rovers et tous les autres sous-systèmes dits de « life support ». Le reste pourrait être utilisé sous forme liquide comme propergol pour alimenter des lanceurs, habités ou non, qui décolleront directement de la Lune.
De l’aluminium à profusion
La zone ciblée n’a pas été choisie au hasard. C’est aussi le site d’alunissage prévu pour la mission Artemis III, qui doit ramener des humains sur notre satellite d’ici quelques années. On y trouve également de grandes quantités d’aluminium.
L’agence estime qu’il pourrait être extrait avec un haut degré de pureté. Les futurs astronautes pourront ainsi utiliser ce matériau, à la fois léger et résistant à la corrosion, pour produire les différents segments du pipeline. La NASA estime que ces pièces pourraient être extrudées directement sur place. Pour les mêmes raisons que l’oxygène, c’est un avantage déterminant pour le succès des futures missions.
Des robots se chargeront ensuite de les assembler en toute autonomie. La durée de vie d’une telle structure modulaire est pour l’instant estimée à dix ans. Mais elle pourrait être rallongée à l’aide d’autres matériaux sur lesquels la NASA travaille en ce moment, comme un « revêtement à base de verre lunaire ». Elle aura aussi l’avantage d’être relativement facile à réparer, et des rovers spécialisés pourraient se charger de l’entretien.
Comment produire de l’oxygène sur la Lune ?
Reste encore la question de la production. C’est un projet sur lequel la NASA travaille depuis belle lurette, et les bases théoriques sont désormais bien en place. En effet, il semble aujourd’hui acquis que les astronautes auront toutes les ressources nécessaires à disposition.
Car même si cela semble contre-intuitif, la Lune regorge en fait d’oxygène. Il n’y est simplement pas présent sous forme de gaz ; à la place, il est emprisonné dans deux réservoirs différents.
Le premier, c’est la glace d’eau. Grâce aux relevés de la sonde indienne Chandrayaan-1 et du Lunar Reconnaissance Orbiter de la NASA, on estime aujourd’hui qu’il y a plus de 500 millions de tonnes de glace d’eau réparties au niveau des pôles – de quoi remplir des centaines de milliers de piscines olympiques. Or, on sait déjà très bien extraire l’oxygène de l’eau grâce au processus d’électrolyse.
Mais le problème, c’est que cette méthode nécessite énormément d’énergie. La NASA s’intéresse donc à un second réservoir : le régolithe lunaire, la couche de poussière et de roche qui recouvre les zones géologiques plus profondes.
Ce matériel est majoritairement constitué d’oxydes de silice, d’aluminium, de fer et de magnésium qui ont été déposés là par des météorites. Or, les formes oxydées de ces éléments contiennent par définition de l’oxygène — et pas qu’un peu !
Ce document de l’Université de Washington rappelle même que le sol lunaire contient entre 41 et 45 % d’oxygène. En d’autres termes, les futurs colons respireront peut-être grâce à de la poussière de Lune.
Juste à temps pour Artemis III ?
Il ne reste donc plus qu’à extraire cet élixir de vie volatil pour l’utiliser. La NASA travaille depuis longtemps sur ces techniques d’extraction. Une première preuve de concept in-situ est attendue à l’horizon 2024.
En cas de succès, les astronautes pourraient en bénéficier dès 2026. Avec un peu de chance, cette échéance va coïncider avec le calendrier d’Artemis III. Pour l’instant, la chronologie officielle parle encore de 2025, mais il faudra un véritable miracle pour tenir ce délai très ambitieux.