Le porte-parole du gouvernement du Burkina Faso a confirmé, lundi 23 janvier 2023, que les autorités burkinabè ont demandé le départ des troupes françaises basées dans le pays, dans un délai d’un mois. « Ce que nous dénonçons, c’est l’accord qui permet aux forces françaises d’être présentes au Burkina Faso. Il ne s’agit pas de la fin des relations diplomatiques entre le Burkina Faso et la France », a précisé Jean-Emmanuel Ouédraogo dans une interview sur la Radio-Télévision du Burkina (RTB).
La France a répondu attendre toujours des clarifications de la part du président de la transition burkinabè Ibrahim Traoré concernant cette demande, a indiqué la porte-parole du Quai d’Orsay.
Le Burkina Faso a bel et bien demandé le départ des troupes françaises basées dans le pays, dans un délai d’un mois, a indiqué le porte-parole du gouvernement ce 23 janvier. « Les forces françaises sont basées à Ouagadougou sur la demande du Burkina Faso et de ses autorités, a déclaré Jean-Emmanuel Ouédraogo, dans une interview sur la Radio-Télévision du Burkina (RTB). Cette dénonciation est dans l’ordre normal des choses, elle est prévue dans les termes de l’accord militaire. »
Il a par ailleurs précisé sur la RTB que « ce que nous dénonçons, c’est l’accord qui permet aux forces françaises d’être présentes au Burkina Faso. Il ne s’agit pas de la fin des relations diplomatiques entre le Burkina Faso et la France ».
Le ministère français des Affaires étrangères a indiqué à l’AFP attendre toujours des clarifications de la part du président de la transition burkinabè Ibrahim Traoré concernant cette demande.
Au stade actuel, nous ne voyons aucune raison que la partie française ne respecte pas les termes d’un accord qu’elle a signé.
Jean-Emmanuel Ouédraogo, porte-parole du gouvernement burkinabè
Dimanche 22 janvier, le président français Emmanuel Macron avait dit attendre « des clarifications » sur une éventuelle demande de départ des troupes françaises, interrogé après la publication d’une dépêche de l’Agence d’information burkinabè (AIB) affirmant que le gouvernement avait « acté » ce retrait « de son territoire ».
Pas de réactions du côté des militaires
Après cette confirmation du porte-parole du gouvernement burkinabè qui demande donc le retrait de la force Sabre, ce soir, dans l’entourage du ministère des Armées et de l’État-Major, on ne commente pas ces déclarations.
Tant que le capitaine Traoré, président de la transition, ne s’est pas lui-même exprimé, tout départ de la Force Sabre est prématuré. Il n’y a pas de sujet. C’est, en substance, le discours tenu.
Cette position française vise peut-être à gagner du temps, un temps précieux car les accords de défense, signés en 2018, entre Paris et Ouagadougou stipulent en effet qu’un départ des forces françaises doit être effectif, un mois jour pour jour, après la demande des autorités burkinabè.
Or, un mois pour déplacer un effectif d’environ 400 soldats, c’est court, « trop court » disent les experts. « Deux mois, ce serait mieux et trois mois ce serait confortable », ajoutent-ils.
Sans être comparable au retrait de la Force Barkhane du Mali, le départ de Sabre représenterait un réel défi logistique, avec des dizaines de containers à faire transiter vers les ports de Cotonou ou d’Abidjan, et une dizaine d’hélicoptères à rapatrier.
Si départ il y a, ce ne serait pas nécessairement la fin de Sabre. Une partie des Forces spéciales, peut-être une centaine de soldats, pourrait rester dans la zone sahélienne afin de poursuivre la mission, à savoir neutraliser les hauts responsables des groupes armés terroristes, en particulier ceux de l’Etat Islamique au grand Sahara.
Thomas Gasilloud, député LRM du Rhône et président de la commission de la défense nationale à l’Assemblée, «regrette» la décision du Burkina, mais «n’est pas surpris»
Sébastien Németh
Comment en est-on arrivé là ?
La demande, par les autorités burkinabè, du retrait de la force Sabre du Burkina Faso, c’est l’épilogue d’une crise qui couvait depuis quatre mois.
L’étincelle, c’est le communiqué des putschistes du 1er octobre. Ils viennent de renverser le lieutenant-colonel Damiba et affirment que l’officier s’est réfugié à la base militaire française et que Paris l’aiderait à se rétablir au pouvoir.
Des manifestations anti-françaises éclatent. Jets de pierres, départs de feu, tentatives d’intrusion avec l’ambassade, le consulat et le lycée français qui sont pris pour cible… Les nouveaux hommes forts et leur chef, le capitaine Ibrahim Traoré, tentent de calmer le jeu mais rien n’y fait.
Les marches vont désormais être régulières comme les 28 octobre, 18 novembre et 20 janvier. Les pancartes « France dégage » tout comme les drapeaux russes fleurissent dans les cortèges…
Dans le même temps, le Burkina se rapproche du Mali qui a déjà rompu avec Paris. Ibrahim Traoré se rend à Bamako, le 3 novembre, pour son premier déplacement à l’étranger.
On pense à un réchauffement lorsque le Premier ministre burkinabè reçoit l’ambassadeur de France, Luc Hallade, le 29 novembre, mais le fossé continue de se creuser… Le Burkina demande à la France une aide financière et matérielle à destination de ses Volontaires pour la Défense de la Patrie mais Paris ne donne pas suite. Le chef du gouvernement déclare que « certains partenaires n’ont pas toujours été loyaux. Nous essayons de diversifier nos relations », dit-il.
Apollinaire Kyélem de Tembela en profite pour réaliser un discret voyage en Russie, début décembre. Début janvier, le pouvoir burkinabè enclenche la rupture et exige le départ de l’ambassadeur de France. Trois semaines plus tard, c’est aux militaires que Ouagadougou demande de partir.
Le Burkina Faso héberge actuellement un contingent de près de 400 membres des forces spéciales françaises, la force Sabre. Ce pays d’Afrique de l’Ouest, en particulier dans sa moitié nord, est confronté depuis 2015 aux attaques de groupes liés à al-Qaïda et à l’organisation État islamique (EI) qui se multiplient. Elles ont fait des milliers de morts et au moins deux millions de déplacés.
rfi