«Retour à Séoul», une histoire d’adoption pas comme une autre

C’est l’histoire vibrante d’une jeune femme jadis adoptée en Corée par des parents français et qui se trouve soudainement, malgré elle, en quête de ses origines. « Retour à Séoul », à l’affiche dans les salles en France dès ce 25 janvier, c’est une histoire douloureuse et libératrice, intelligemment réalisée et composée par le réalisateur franco-cambodgien Davy Chou, et incarnée de façon incroyablement dense par Ji-min Park, véritable révélation dans son premier rôle en tant qu’actrice.  

Tout semble simple. Une fille abandonnée en Corée par ses parents et adoptée en France se met un jour à la recherche de ses racines. Sauf que le destin des plus de 200 000 enfants coréens adoptés après la fin de la Guerre de Corée en 1953, n’est pas l’histoire racontée dans Retour à Séoul. Dans son film, Davy Chou suit sur plusieurs années le personnage de Freddie. Et cette jeune femme qui semble si sûre d’elle retourne à l’âge de 25 ans pour la première fois dans le pays où elle est née. Mais elle choisit cette destination au dernier moment, par hasard, à l’aéroport, lorsque son vol initial est annulé et un vol en direction de Séoul est disponible.

« Elle part pour deux semaines en vacances, sans arrière-pensées, sans idées dans la tête, et surtout pas avec l’idée de rencontrer ses parents biologiquesCe n’est pas du tout ce qu’elle recherche, explique Davy Chou son scénario. Or, après quelques jours, elle se retrouve face à face à son père biologique et à sa famille. À ce moment, les choses prennent un détour assez surprenant, et un peu différent de ce qu’on attend habituellement d’un film sur l’adoption. »

Ji-min Park fait la différence

C’est aussi Ji-min Park qui fait la différence. Avec sa beauté qui s’ignore, mais qui crève l’écran, elle fait naître un personnage complexe, ingrat et touchant, vulnérable et colérique, mystérieuse et violente, pleins de contradictions. « Il y avait juste parfois à poser la caméra sur son visage pour, du coup, le spectateur ait accès à l’intériorité et au mystère des sentiments. »

Comme son personnage, Ji-min Park est née à Séoul. Elle a atterri à Paris à l’âge de 8 ans. Puisant dans sa propre vie, elle a retrouvé de nombreuses similitudes avec son rôle Freddie, au point de parfois vivre réellement son personnage : « Ce qui m’a le plus étonné, c’était quand j’ai eu ce moment de grâce, le juste milieu entre le personnage et moi. Quand je me suis rendu compte que je jouais des choses ! Et que je n’étais pas seulement juste moi. Cela était très fort. Il y avait des moments où je me disais : oh, je suis en train de jouer ! »

Des histoires familiales

Davy Chou a également puisé dans ses propres expériences pour écrire le scénario. Le déclencheur pour Retour à Séoul était le sort réservé à une des meilleures amies de Davy Chou. Elle avait vécu une histoire semblable et avait emmené le réalisateur avec elle pour rencontrer son père biologique. Mais derrière cette tragédie résonne encore une autre, en liaison avec les origines cambodgiennes de Davy Chou. Même si, contrairement à son précédent film sur la jeunesse cambodgienne, Diamond Island, cette fois-ci, il n’a pas exploré le pays de ses ancêtres. Car, en tant que petit-fils de Van Chann, l’un des plus grands producteurs de l’histoire du cinéma au Cambodge, Dayv Chou incarne aujourd’hui l’espoir d’un renouveau du cinéma cambodgien. Et il a fait lui-même la douloureuse expérience d’une rupture radicale à jamais avec son histoire familiale bouleversée par les Khmers rouges : « Le fait que mes parents sont partis en France, et qu’une grande partie de notre famille est morte pendant le génocide perpétré par les Khmers rouges, c’est quelque chose que je ressens aussi très profondément ».

Ce n’est pas un retour aux racines

Pour cela, pour lui, Retour à Séoul n’est pas un film comme un autre sur les racines. « Moi, par exemple, à 25 ans, je suis parti pour la première fois au Cambodge, le pays où mes parents sont nés. Un pays dont je ne connaissais rien. Tous mes amis me disaient : « Tu fais ton retour aux racines ». J’ai vraiment rejeté cela et je disais : « Non, ce n’est pas exactement cela ». Les gens mettaient mon voyage au Cambodge dans une case vraiment prédéfinie. Au contraire, je faisais le film en résistance par rapport à certains clichés du voyage au retour aux sources. Avec tout ce qu’on peut imaginer de mélancolie, de nostalgie, de révélation à soi-même. Les choses sont beaucoup plus complexes, beaucoup plus violentes parfois, compliquées aussi et demandent beaucoup plus de temps. C’est cela qui m’a intéressé. »

RFI

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