Le rappeur syrien Bu Kolthoum chante les tourments de l’exil à Tunis

Il est l’un des artistes les plus attendus des Journées musicales de Carthage. Exilé aux Pays-Bas, le rappeur syrien Bu Kolthoum est devenu ces dernières années l’une des voix du monde arabe. Lui qui dit faire de la musique pour ne pas devenir fou raconte dans ses chansons la douleur de vivre et le déracinement. Des thématiques qui parlent aux Tunisiens.

Pour approcher Bu Kolthoum, il faut montrer patte blanche. À l’entrée de la salle de concert dans laquelle il va se produire le soir, Salma, sa manager libanaise, filtre les médias autorisés à assister aux répétitions. Le rappeur syrien a demandé expressément à être dérangé le moins possible.

Lui qui répète ses plus grands titres jouera ce soir devant 1 800 personnes à Tunis. « L’enthousiasme des Tunisiens pour ma musique est quelque chose que je ressens depuis longtemps, confie le rappeur. Avant même de mettre les pieds en Tunisie, j’avais remarqué qu’ils exprimaient leur amour de mon art sur la toile. C’est le peuple arabe que je suis le plus heureux de rencontrer parce qu’ils accueillent mon travail d’une façon spéciale et enthousiaste. »

« Bu Kolthoum », un nom de scène en hommage à la diva égyptienne Oum Kalthoum qui transportait les foules arabes dans les années 60 et 70. Derrière ce pseudonyme se cache un jeune homme réservé. Tourmenté même. Comme ses chansons… Lui qui a fui la guerre en Syrie a vécu plusieurs années dans un camp de réfugiés en Jordanie. Aujourd’hui établi aux Pays-Bas, il refuse de parler de ce passé. « Je suis passé par des moments très durs. Il y a beaucoup de personnes autour de moi qui ont vécu des épreuves difficiles et qui ont perdu pied. Elles sont entrées dans la folie au sens propre. La seule chose qui m’a permis de garder contact avec la réalité dans ces moments-là, moi, c’est la musique », raconte-t-il.

Douze ans après les printemps arabes, ses états d’âme torturés ont un grand écho en Tunisie. Alors que les places pour son concert sont parties en quelques heures, Mondher Fellah, directeur de production du festival, partage cet engouement. « Il y a un cliché qui dit que les rappeurs font du playback. Bu Kolthoum chante super bien, assure-t-il. Il ne fait pas de playback. J’ai été là pendant sa prise de son. Le mec chante comme des divas internationales. Ce n’est pas du tout le profil du rappeur qui est là pour chanter n’importe comment et après se faire corriger en studio. Donc j’apprécie beaucoup cette personne ».

À la fois fragile et généreux sur scène, Bu Kolthoum a conquis le cœur des Tunisiens ce soir-là.

Les Journées musicales de Carthage, jusqu’au 28 janvier à Tunis

RFI

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