Une nouvelle ère de l’exploration spatiale est en marche. Avec la reprise du programme lunaire Artemis de la Nasa, nos yeux sont rivés sur Mars, espérant une mission habitée dans un futur pas trop lointain. Si SpaceX propose son Starship, la Nasa étudie un moyen de réduire le temps de voyage grâce à la propulsion nucléaire.
Un des plus grands défis pour faire une mission martienne est le temps de voyage. Avec les technologies actuelles de propulsion à carburant liquide, il est possible d’y parvenir en six mois minimum. Pour une mission habitée, cela reste un problème essentiel pour le physique et le mental des astronautes (notamment l’exposition aux radiations), et cela ferme d’emblée la porte à une exploration habitée plus lointaine dans le Système solaire.
Étant donné que l’on ne disposera pas dans un futur proche de l’USS Enterprise ou du Faucon Millénium, il faut néanmoins trouver un moyen de réduire drastiquement le temps de trajet des astronautes vers la Planète rouge, sans pour autant alourdir le vaisseau en embarquant des dizaines de tonnes d’ergols liquides. La propulsion nucléaire est une solution très avantageuse.
VUE D’ARTISTE D’UN VAISSEAU SPATIAL UTILISANT DE LA PROPULSION NTP.
La relance de la course au moteur nucléaire
Une première course à cette technologie avait eu lieu durant la Guerre froide, puis les programmes ont été arrêtés. Cependant, ces dernières années, la Russie, la Chine et les États-Unis se sont à nouveau impliqués dans ces projets. La Nasa a relancé un programme de propulsion nucléaire bimodale, liant à la fois un système de propulsion nucléaire thermique (NTP) et un autre de propulsion nucléaire électrique (NEP).
L’objectif est d’atteindre Mars en 100 jours, au lieu de 180 aujourd’hui. Le programme programme Niac — Nasa Innovative Advanced Concepts – en est à sa première phase, à savoir recueillir les concepts et soutenir leur mûrissement, avant de passer à des étapes plus concrètes.
VUE D’ARTISTE D’UN VAISSEAU SPATIAL UTILISANT À LA FOIS DE LA PROPULSION NUCLÉAIRE THERMIQUE ET ÉLECTRIQUE.
Rallier nucléaire thermique et nucléaire électrique
Ce sont les deux concepts de propulsions nucléaires qui ont été étudiés jusqu’à présent. Le NTP repose sur un propulseur classique avec comme ergol de l’Hydrogène liquide (LH2), qui serait chauffé par un réacteur nucléaire embarqué. Ce puissant chauffage fait passer l’hydrogène à l’état gazeux, ce qui augmente drastiquement la pression qui est canalisée avec une tuyère. La poussée générée est très efficace. Le concept a été étudié par la Nasa et l’US Air Force dès les années 1950, et par l’URSS entre 1965 et 1980.
La propulsion NEP repose sur un réacteur nucléaire alimentant en électricité un moteur ionique (propulseur à effet Hall). Cela génère un champ électromagnétique qui accélère des particules de gaz pour créer une poussée. Le gaz généralement utilisé est le Xénon.
Rallier ces deux propulsions pour une seule mission permet d’être plus flexible dans la poussée nécessaire. En effet, un voyage interplanétaire nécessite à la fois des grandes poussées (départ et arrivée pour le freinage) mais aussi pour des petites corrections de trajectoires. De plus, pour le confort des astronautes, la poussée ne doit pas être trop puissante. En contrepartie, elle doit pouvoir durer plus longtemps. Par exemple, un concept NEP peut maintenir la poussée pendant près de trois heures.
CONCEPT DE MOTEUR NUCLÉAIRE BIMODAL IMAGINÉ PAR RYAN GOOSE, AVEC UN COMPRESSEUR POUR AMÉLIORER LA POUSSÉE. LE CONCEPT A ÉTÉ RETENU EN PHASE 1 DU PROGRAMME NIAC.
L’innovation qui permet de réduire le temps de voyage à 45 jours
Retenu dans la phase I du programme Niac de la Nasa, le concept « Bimodal NTP/NEP with a Wave Rotor Topping Cycle » proposé par le professeur Ryan Goose, responsable du programme Hypersonics à l’Université de Floride, suggère l’ajout d’un compresseur à ondes de pression. Associé à moteur NTP, le compresseur utilise la pression générée par le chauffage du LH2 pour le comprimer encore plus, et ainsi augmenter davantage la poussée. Avec un moteur NEP, la poussée est aussi améliorée. Selon Goose, ajouter ce compresseur à un système bimodal alliant NTP et NEP permet de réduire le temps de voyage vers Mars à 45 jours.
sciences