Le très contesté projet de réforme des retraites arrive lundi devant l’Assemblée nationale, pour deux semaines de débats, avant deux journées d’action, mardi et samedi, à l’appel de l’intersyndicale.
La tension monte d’un cran pour le gouvernement alors que doit débuter, lundi 6 février, le débat sur le projet de réforme des retraites à l’Assemblée nationale, avant une nouvelle journée de grève mardi à l’appel de l’intersyndicale.
Le coup d’envoi des discussions sera donné à 16 h 00, dans un hémicycle qui s’annonce archicomble pour cette bataille autour du report de 62 à 64 ans de l’âge légal de départ, réforme phare du second quinquennat d’Emmanuel Macron.
Au banc du gouvernement, le ministre du Travail, Olivier Dussopt, ne sera pas seul, mais entouré de collègues de Bercy pour ce texte budgétaire.
Alors que ce ministre clé est fragilisé par des soupçons de favoritisme dans l’attribution d’un marché public lorsqu’il était maire d’Annonay, Elisabeth Borne et la majorité présidentielle ont fait bloc autour de lui durant le week-end.
À l’approche de deux journées d’action, mardi et samedi à l’appel de l’intersyndicale, la cheffe du gouvernement a martelé qu’avec cet âge légal à 64 ans, « nous demandons un effort collectif aux Français » mais « notre objectif est d’assurer l’avenir de notre système de retraite par répartition ».
Dans une concession de dernière minute, Elisabeth Borne a annoncé que les personnes ayant commencé à travailler entre 20 et 21 ans pourront partir à la retraite à 63 ans, par l’extension du dispositif de carrières longues – une demande des députés LR, dont les voix sont cruciales.
Ce geste sera-t-il suffisant aux yeux de la droite ? Non pour Aurélien Pradié notamment, qui pointe une « tromperie » et demande d’aller plus loin pour ceux ayant commencé à cotiser tôt.
Côté syndicats non plus, on n’est pas convaincus : c’est une « rustine » qui « n’est pas la réponse » attendue « à la mobilisation massive constatée », a dénoncé Laurent Berger, le patron de la CFDT.
Déjà deux journées de grève et de manifestations, les 19 et 31 janvier, ont réuni chaque fois plus d’un million de manifestants selon la police, plus de deux millions selon les organisateurs, et la dernière a dépassé le record de participation de 2010.
Cette fois, « on a conjugué un jour en semaine et un samedi, on verra sur l’ensemble des deux jours, malgré cette période de vacances scolaires », a rappelé le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez.
Le trafic sera fortement perturbé mardi à la SNCF et la RATP, et un vol sur cinq à Orly ne sera pas assuré.
Attaqué de toute part
Lundi, au Palais Bourbon, les députés LFI défendront d’emblée une demande de rejet de l’ensemble de la réforme, « brutale » et « injuste ». Le vote sur leur motion pourrait donner quelques sueurs froides au camp présidentiel.
Puis le groupe RN, également contre les 64 ans, portera sa demande de référendum sur la réforme, qui a elle peu de chances d’être validée par l’Assemblée. Ceux qui ne la voteraient pas « ne pourront plus se dire d’opposition », a averti le président du parti, Jordan Bardella.
Les députés s’attelleront ensuite aux quelque 20 000 amendements déposés sur le projet de loi, dont 13 000 par LFI – de « l’obstruction bête et méchante » de la part de l’alliance de gauche, étrille le porte-parole du gouvernement Olivier Véran.
Elisabeth Borne a dit espérer « que les oppositions retireront une partie de leurs amendements et qu’on pourra avoir un vrai débat, projet contre projet », en lieu et place des « caricatures » jusqu’alors, selon elle.
Mais ce flux d’amendements « permet de gérer un peu le tempo, accélérer, ralentir », au lieu de se laisser dicter le rythme, oppose l’insoumis François Ruffin, qui veut avec la Nupes pouvoir relayer dans l’hémicycle « la vie des gens », « la France du réel ».
Les macronistes, qui ne disposent que de la majorité relative, ne sont pas à l’abri d’accidents de parcours lors de votes, comme cela s’est produit en commission la semaine dernière.
Et si l’Assemblée ne vient pas à bout des amendements d’ici le 17 février minuit, le texte pourra tout de même passer au Sénat, du fait du choix de l’exécutif de recourir à un budget rectificatif de la Sécu.
Ce temps contraint est vivement critiqué par les oppositions, qui comptent néanmoins parvenir à discuter de l’article 7 consacré au report de l’âge de la retraite.
Les autres points chauds du texte se concentrent autour de la situation des femmes, qui pourraient être perdantes avec le recul de l’âge de départ, la pénibilité ou encore l’emploi des seniors.
AFP