Texte fondateur de la déontologie médicale, il fut rédigé dans l’antiquité pour encadrer les pratiques médicales d’un point de vue éthique et moral. Son usage n’a jamais cessé jusqu’à aujourd’hui.
« Je jure par Apollon, médecin, par Asclépios, par Hygie et Panacée, par tous les dieux et toutes les déesses, les prenant à témoin que je remplirai, suivant mes forces et ma capacité, le serment et l’engagement suivants : (…) Je dirigerai le régime des malades à leur avantage, suivant mes forces et mon jugement, et je m’abstiendrai de tout mal et de toute injustice. ». Cette version du serment d’Hippocrate, publiée au 19e siècle, a été traduite par Émile Littré à partir de textes très anciens rédigés dans la Grèce antique.
Rituel de passage au statut de médecin, les étudiants en médecine le récitaient à la fin de leur formation pour montrer leurs engagements éthiques et moraux à l’égard de leurs patients, mais aussi de leurs précepteurs. Défiant l’inéluctable écoulement du temps, la tradition a persisté, bien que de nombreuses modifications aient été apportées à l’énoncé originel.
D’où vient le serment d’Hippocrate ?
Le serment nous a été légué par Hippocrate lui-même, un célèbre médecin et philosophe de la Grèce antique. Son œuvre, le Corpus hippocratique, regroupe soixante volumes mêlant traités, manuels et études de médecine. Le texte le plus célèbre, le fameux serment d’Hippocrate, dont la plus ancienne datation remonte au 4e siècle av. J.C., est encore considéré comme la brique fondatrice de la déontologie médicale. Hippocrate ne serait d’ailleurs pas l’unique auteur de ce travail colossal. D’autres contributeurs de la Grèce antique y auraient prêté leur plume.
Quoi qu’il en soit, tous les médecins grecs juraient de suivre les règles éthiques de leur pratique énoncées dans le serment. Par le biais de promesses à fort caractère religieux, ils s’engageaient, devant les dieux de l’Olympe, à révérer leurs mentors (« je mettrai mon maître de médecine au même rang que les auteurs de mes jours, je partagerai avec lui mon savoir et, le cas échéant, je pourvoirai à ses besoins »), d’agir pour le bien de leurs patients (« je dirigerai le régime des malades à leur avantage »), de les prémunir du « mal », dans le respect du secret médical (« je tairai ce qui n’a jamais besoin d’être divulgué »).
Nos anciens avaient donc déjà conscience de certains enjeux éthiques auxquels est confrontée la profession. À ce titre, comme le stipulait le serment, les praticiens promettaient de ne jamais avoir de relations sexuelles avec leurs patients, ni de leur donner du poison ou d’être à l’origine d’un avortement en utilisant un pessaire (sorte de sonde vaginale).
LE SAVIEZ-VOUS ?
Dans la mythologie grecque, le dieu de la médecine, Asclépios, était invoqué au moment de la récitation du serment d’Hippocrate. Il avait pour attribut un bâton autour duquel s’enroule un serpent, devenu symbole de la médecine aujourd’hui. À ne pas confondre avec le symbole des pharmaciens (coupe d’Hygie), où la coupe d’Hygie se substitue au bâton, et le symbole du commerce (le caducée d’Hermès) muni de deux serpents au lieu d’un.
Qu’est-ce que le serment d’Hippocrate aujourd’hui ?
Si le serment d’Hippocrate est arrivé jusqu’à nous et que les médecins occidentaux continuent à lui prêter allégeance, il ne ressemble en aucun point au texte originel. Sa valeur est désormais symbolique. Il ne demeure pas moins l’étape ultime à la formation de tout jeune médecin, mais aussi des sages-femmes et des chirurgiens-dentistes. Il est récité à l’université lors de la cérémonie de remise des diplômes :
« Au moment d’être admis à exercer la médecine, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité. Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux. »
Bien qu’il conserve une aura solennelle, ce serment moderne a perdu son caractère sacré pour mieux correspondre aux enjeux contemporains. Il a pour principal objectif de rappeler aux nouveaux médecins qu’ils sont liés à des obligations légales, morales et éthiques. Le texte aborde plusieurs thèmes comme l’égalité d’accès au soin pour tous, le secret médical, l’euthanasie, la solidarité entre médecins. Néanmoins il ne possède aucune portée juridique.
Quels sont les autres textes de l’éthique médicale ?
Au serment d’Hippocrate à caractère strictement moral s’ajoute un ensemble de dispositions législatives qui réglementent l’exercice de la profession médicale. En France, il s’agit du code de déontologie médicale, qui est inscrit dans le Code de la santé publique. Face à ce texte juridique, tout médecin français est responsable de ses actions devant la loi et s’expose à des sanctions disciplinaires (énoncées par le Conseil de l’Ordre des médecins) en cas de non-respect de ses devoirs professionnels.
Complémentaires à ces codes, des recommandations déontologiques sont rédigées par le Conseil européen des Ordres des médecins (CEOM) tandis que le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) prononce régulièrement des avis pour éclairer les problèmes éthiques et les questions de société dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé publique.
La déclaration de Genève est une annexe du code de déontologie médicale qui fut adoptée par l’assemblée générale de l’Association médicale mondiale en 1948. Depuis, elle a régulièrement été réactualisée, les dernières modifications datant d’octobre 2020. Conçue comme une adaptation au serment d’Hippocrate, elle s’attache à définir les impératifs du médecin vis-à-vis du respect de la vie humaine. L’objectif initial de cette déclaration était de sensibiliser le corps de métier aux crimes commis durant la Seconde Guerre mondiale, dans lesquels des médecins furent impliqués, afin qu’ils ne se reproduisent plus.
La déclaration d’Helsinki, rédigée par l’Association médicale mondiale, fournit des recommandations éthiques aux médecins du monde entier ainsi qu’aux scientifiques impliqués dans la recherche médicale sur des êtres humains, du matériel biologique humain et/ou des données identifiables. Elle vise à une régulation universelle de toute activité touchant à la médecine et à la recherche.
afp