Les engrais représenteraient environ 5 % des émissions de gaz à effet de serre. L’étude à l’origine de cette évaluation expose des méthodes susceptibles de les réduire sans compromettre l’alimentation mondiale.
Indispensables à la sécurité alimentaire mondiale, les engrais représentent environ 5 % des émissions de gaz à effet de serre, selon une étude diffusée jeudi 9 février. Cependant, ce rapport estime qu’il est possible de réduire drastiquement cette contribution au réchauffement climatique.
Publiée dans Nature Food, l’étude se présente comme le « premier bilan carbone précis sur le cycle complet » (production et usage) des engrais, aussi bien minéraux qu’organiques (fumier, lisier…). Elle formule aussi des pistes techniques et politiques pour réduire les émissions de 80 % d’ici 2050, sans compromettre l’alimentation de l’humanité.
Selon les chercheurs de l’université de Cambridge, les émissions de gaz à effet de serre liées aux engrais représentent quelque 2,6 milliards de tonnes d’équivalent CO2, soit environ 5% des émissions annuelles mondiales.
Cette proportion est comparable à celle de la métallurgie (7 %), du ciment (6 %) ou du plastique (4 %), autres gros émetteurs de l’économie mondiale.
Augmenter l’efficacité de l’épandage des engrais
Cette étude a permis d’établir que la majorité des émissions liées aux engrais (deux tiers) provient de leur utilisation dans les champs. Le tiers restant est émis au cours de la production des engrais minéraux.
« On a tendance à penser que l’industrie pétrochimique est à l’origine de l’essentiel des émissions [des engrais], mais en fait, cela ne semble pas être le cas, cela nous a beaucoup surpris », a confié à l’AFP le coauteur de l’étude, Andre Cabrera Serrenho. Ces résultats sont déterminants car ils nous montrent « dans quels domaines nous devrions agir en priorité ».
Ainsi, le premier moyen de réduire les émissions consisterait à augmenter l’efficacité de l’épandage des engrais, aussi bien organiques que minéraux, et à en réduire les quantités. « Nous mettons beaucoup plus d’engrais dans les terres cultivées que la quantité d’azote vraiment nécessaire aux plantes pour se développer », a souligné Andre Cabrera Serrenho.
Lors de l’utilisation, les principales émissions proviennent de la dégradation des engrais par les bactéries du sol, qui produit du protoxyde d’azote, l’un des plus puissants gaz à effet de serre. Mais l’action des bactéries pourrait être limitée en mélangeant les engrais avec « des produits chimiques appelés inhibiteurs de nitrification », encouragent les auteurs.
Convaincre les agriculteurs d’utiliser les engrais de manière plus efficace – par exemple, avec de petites quantités régulières plutôt que de pulvériser de grandes doses une fois par saison – nécessitera aussi des incitations économiques, estiment les chercheurs.
Concernant la production d’engrais minéraux, utilisés pour nourrir la moitié de l’humanité selon de précédentes études, les émissions sont principalement causées par la synthèse de l’ammoniac, particulièrement énergivore.
Le processus nécessite aussi de l’hydrogène, souvent produit à partir d’énergies fossiles, notent les auteurs qui comptent sur l’électrification et la décarbonation de cette industrie pour atteindre les objectifs de réduction des émissions.
AFP