Le Soudan du Sud s’est qualifié pour la première fois de son histoire à la Coupe du monde de basket 2023 après sa victoire devant le Sénégal (83-75) ce vendredi 24 février lors des éliminatoires. Une performance monumentale pour cette jeune nation, née en 2011 et qui n’a disputé son premier Afrobasket qu’en 2021.
« Incroyable », « Amazing » « Historique »… Au rayon des superlatifs, le stock risque d’être épuisé pour qualifier le gigantesque exploit de l’équipe de basket du Soudan du Sud, qualifiée pour la première fois de son histoire à la Coupe du monde. La prouesse était déjà à portée de main à la veille de la 5e et dernière fenêtre des éliminatoires, car les Bright Stars, leaders du groupe F, n’avaient besoin que d’une victoire en trois matches pour valider leur ticket. Ils ont un peu tremblé, mais ont fini par marcher sur les Sénégalais dans le dernier quart-temps (24-12) décrochant la qualification avant de faire face à la RD Congo samedi, et l’Égypte dimanche.
Ce succès est évidemment énorme pour un pays dont l’équipe nationale a disputé son premier match de basket officiel le 10 juillet 2011, contre l’Ouganda (69-73), au lendemain de l’accession à l’indépendance. Malgré les conflits territoriaux permanents, la guerre civile de 2013 à 2020, la pauvreté du pays, classé dernier dans le monde en termes d’indice de développement humain (IDH) par le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), le basket a su se tracer un chemin de gloire.
De réfugiés à héros nationaux
Après une qualification historique pour la première fois à l’Afrobasket 2021 et une élimination en quarts de finale par les futurs vainqueurs tunisiens, les Sud-Soudanais n’ont cessé de progresser.
La recette tient d’abord à l’apport des joueurs, dont les parents ont fui la guerre. Ils sont nés ou ont grandi bien loin de leur pays d’origine et se sont formés principalement en Australie et aux États-Unis. L’ailier Nuni Omot, né dans un camp de réfugiés au Kenya, a grandi sur les parquets américains, tout comme Mayan Keer Kiir arrivé à l’âge de 4 ans aux États-Unis. Le capitaine Kuany Ngor Kuany et autres membres de la colonne vertébrale de l’équipe, Deng Acuoth (pivot), Bul Kuol (arrière) et le très prometteur meneur Anyiarbany Makoi, né en Égypte, ont tous grandi en Australie…
Cette bande de joueurs melting-pot est savamment managée par l’ancien joueur de la NBA Luol Deng qui a d’abord été entraîneur puis président de la Fédération. « Le leadership de Luol Deng en tant que président de la fédération sud-soudanaise de basketball est une des raisons principales de notre progression si rapide. Son engagement, sur le terrain et en dehors, est exemplaire », témoigne ainsi le capitaine Kuany Ngor Kuany sur le site de la Fiba.
« Une nation qui a beaucoup à offrir au monde »
Comme ses protégés, l’ex-joueur des Los Angeles Lakers et des Chicago Bulls a vu ses parents fuir la guerre au Soudan. Élevé en Égypte, il y rencontre la star soudanaise de la NBA Manute Bol, qui lui transmet le virus du basket lors d’une rencontre avec les réfugiés. « Manute défendait les bonnes choses. Il était célèbre, il jouait au basket […] et rendait service aux autres. Je me suis mis au basket parce que Manute a pris des vacances afin d’aider la communauté sud-soudanaise là-bas, a avoué Deng sur olympics.com. Donc si ce n’était pas pour quelqu’un qui essayait d’aider les autres depuis son pays d’origine, je n’aurais jamais eu l’opportunité que j’ai eu. »
🎟️ Ticket punched to @FIBAWC pic.twitter.com/OzISWUnuAn
— South Sudan Basketball (@SSBFed) February 24, 2023
C’est ainsi que Luol Deng, deux fois all-star, a pris en main les destinées du basket sud-soudanais et a appliqué ses leçons de vie sur le terrain pour emmener son pays vers le plus grand exploit sportif de son histoire. « On travaille aussi dur que possible et on se dépasse, dit-il. Même les jours où vous êtes au plus bas, vos coéquipiers et vos entraîneurs sont là pour vous aider et vous faire repartir. J’ai tiré les leçons de ma famille dans les vestiaires et vice-versa. »
À la veille de cette cinquième fenêtre des éliminatoires, la capitaine Kuany Ngor Kuany confiait : « Une qualification pour notre toute première Coupe du Monde FIBA serait la réalisation d’un rêve et cela aurait énormément de signification pour notre pays. Nous sommes une jeune nation qui a beaucoup à offrir au monde et l’obtention de notre billet permettrait de faire une incroyable publicité pour le Soudan du Sud et d’amener une joie immense à nos compatriotes ». Mission bien accomplie.
La Coupe du monde de basket aura lieu du 25 août au 10 septembre 2023 dans trois pays: Japon, Philippines et Indonésie.
RFI