On décrypte le mouvement tradwife, qui cartonne sur TikTok et prône un retour aux valeur conservatrices.
Les réseaux sociaux ne sont pas seulement porteurs de déconstruction sociale. Depuis quelques semaines, le hashtag #tradwife cumule plusieurs centaines de millions de vues sur TikTok.
Dans les vidéos liées à cette tendance, on découvre des femmes — souvent jeunes — au chignon impeccable, affublées d’une robe à fleurs ou d’un tablier de cuisine. Une ambiance Petite Maison dans la prairie, pour un mouvement sociétal bien réel, qui prend de l’ampleur sur les réseaux sociaux.
Tradwife : la place de la femme est à la cuisine
Popularisé sur TikTok depuis quelques mois, la trend Tradwife (contraction de Traditionnal Wife) renvoie à un mouvement antiféministe éclos sur les réseaux sociaux, et notamment sur TikTok. Comme son nom l’indique, il prône un retour aux valeurs traditionnelles, avec une image familiale patriarcale et un retour à l’assignation genrée des rôles dans la vie quotidienne.
Comme dans un épisode de Mad Men, l’homme travaille et doit assumer la prospérité financière du foyer, tandis que la femme reste à la maison pour s’occuper des enfants, des tâches ménagères, et du bonheur de son époux.
Toujours apprêtées et aux fourneaux, les tradwives de TikTok regrettent un mode de vie à la manière des années 1950. Paradoxalement, c’est au XXIe siècle par l’intermédiaire des réseaux sociaux que la trend devient virale, notamment par l’intermédiaire de la mère au foyer britannique Alena Kate Petitt et de sa chaine YouTube Darling Academy.
Entre les tutoriels de repassage et les astuces de nettoyage pour combler son mari “comme en 1959“, la jeune femme explique à ses 8000 abonnés comment se soumettre entièrement à un mode de vie patriarcal et conservateur.
Deux ans plus tard, c’est sur TikTok que le mouvement prend de l’ampleur, les vidéos prônant (ou se moquant) des tradwives évoquent une féminité perdue, à la manière des courants masculinistes virilistes qui apparaissent en parallèle sur les plateformes en ligne. Paradoxalement, les tradwives se présentent aussi comme des féministes.
Pour elles, c’est justement le fait de refuser librement de ne pas travailler qui ferait d’elles des militantes engagées.
Prôner un mode de vie traditionnel… et chrétien
Si chacun et chacune est évidemment libre de de vivre son engagement comme il l’entend, le concept de tradwifery n’est pas seulement un mode de vie. C’est aussi et surtout un engagement idéologique, qui renvoie à une époque où les questions de genre n’existaient pas, et où les valeurs traditionnelles étaient largement patriarcales.
Rappelons que dans le Code civil de Napoléon en 1804, “La femme est donnée à l’homme pour qu’elle lui fasse des enfants ; elle est sa propriété comme l’arbre à fruits est celle du jardinier“. Il faudra attendre la loi du 13 juillet 1965 portant sur la réforme des régimes matrimoniaux, pour que les femmes gagnent le droit de travailler sans le consentement de leur mari.
Dans certains cercles, le mouvement tradwife signifie surtout “être une chrétienne fondamentaliste et accepter que les femmes ne doivent pas travailler, ne doivent pas avoir le droit de vote et doivent se soumettre pleinement à leurs maris et à leur foi pour vivre une vie heureuse de ménage“, rappelle le groupe de recherche américain Political Research Association. Des positions qui inquiètent, surtout à une époque où les mouvements politiques conservateurs et liberticides grappillent des voix dans le pays.
journaldugeek