La présidente du Honduras a annoncé mardi que son pays allait nouer des relations « officielles » avec la Chine. Or toute reconnaissance de Pékin par un pays entraîne de facto la rupture entre celui-ci et Taïwan. Par ailleurs, cette décision, en plein regain de tensions sino-américaines, pourrait provoquer une prise de distance de ce petit pays d’Amérique latine avec Washington.
Le Honduras va établir des relations « officielles » avec la Chine, a annoncé mardi 14 mars la présidente Xiomara Castro, à qui Taipei a aussitôt demandé de ne pas prendre cette « mauvaise décision ».
« J’ai donné instruction au ministre des Affaires étrangères Eduardo Reina de gérer l’ouverture de relations officielles avec la République populaire de Chine », a annoncé Xiomara Castro sur Twitter, sans évoquer explicitement l’avenir des relations avec Taipei.
La Chine communiste, qui revendique la souveraineté sur Taïwan, n’accepte pas que des pays puissent avoir des relations diplomatiques à la fois avec elle et avec Taipei. Toute reconnaissance de Pékin par un pays entraîne de facto la rupture entre celui-ci et Taïwan.
« Piège »
« Nous demandons au Honduras de bien réfléchir et de ne pas tomber dans le piège de la Chine en prenant une mauvaise décision qui nuirait à l’amitié à long terme entre Taïwan et le Honduras », a réagi le ministère des Affaires étrangères taïwanais dans un communiqué.
Xiomara Castro, qui a pris ses fonctions début 2022, avait annoncé avant son arrivée au pouvoir son intention de reconnaître « immédiatement » la Chine communiste. Mais Tegucigalpa avait par la suite fait savoir que les relations avec Taïwan se poursuivaient, après une visite du vice-président taïwanais William Lai pour l’investiture de Xiomara Castro.
Le tweet de Xiomara Castro « ne clarifie pas quel type de relations » le Honduras souhaite nouer avec Pékin, a fait remarquer l’analyste hondurien Raul Pineda. « S’il s’agit de relations diplomatiques, cela va entraîner une rupture avec Taïwan et une prise de distance avec les États-Unis », a-t-il ajouté. « En ce moment les relations Chine-États-Unis sont très tendues, et de ce point de vue ce serait une décision très regrettable » du gouvernement de Xiomara Castro, a estimé cet analyste.
Barrages financés par Pékin
Le 1er janvier dernier, le chef de la diplomatie hondurienne avait rencontré le vice-ministre chinois des Affaires étrangères Xie Feng, en marge de la cérémonie d’investiture du président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva.
Le 2 février, il avait annoncé des négociations avec la Chine pour construire un barrage hydroélectrique, tout en démentant que Tegucigalpa voulait reconnaître diplomatiquement Pékin. Pékin avait déjà financé à hauteur de 300 millions de dollars un autre barrage au Honduras, inauguré en 2021 par le président de l’époque Juan Orlando Hernandez.
L’Amérique latine a été un important champ de bataille diplomatique entre Pékin et Taipei depuis 1949, date à laquelle les communistes ont pris le pouvoir en Chine continentale et où le gouvernement nationaliste s’est réfugié sur l’île de Taïwan.
Alignés sur Washington, tous les pays d’Amérique centrale sont restés pendant des décennies liés à Taïwan. Mais aujourd’hui, seuls le Honduras, le Guatemala et le Belize entretiennent des liens avec l’île. Le Costa Rica (en 2007), le Panama (2017), le Salvador (2018) et le Nicaragua (2021) ont rompu avec Taipei et ont reconnu Pékin. Seuls 14 pays dans le monde reconnaissent Taïwan, dont le Paraguay, Haïti, le Vatican et plusieurs petites nations insulaires des Caraïbes et du Pacifique.
AFP