Retraites : « Les Républicains se sont vendus pour rien », dénonce l’opposition

Quatorze parlementaires, réunis en commission mixte paritaire à l’Assemblée nationale, ont adopté, mercredi, le projet de réforme des retraites au terme d’une journée de discussions, avant son vote par les deux chambres jeudi. Les oppositions, qui fustigent un texte sans compromis, misent désormais sur un sursaut des frondeurs Républicains.

Une ultime tentative de compromis pour éviter le passage en force. Sans surprise, les 14 parlementaires de la commission mixte paritaire (CMP) ont adopté, mercredi 15 mars en fin de journée, le projet de réforme des retraites. Après un passage à l’Assemblée, où le texte n’a été que partiellement débattu, puis son approbation au Sénat le week-end dernier, le texte a été présenté ce matin au groupe, composé de sept députés et sept sénateurs, représentant les équilibres dans les deux chambres et donc majoritairement favorables à la réforme.

Alors que ce texte doit être soumis jeudi au vote des deux chambres, tous les regards se tournent désormais vers l’Assemblée nationale où l’incertitude demeure quant au vote des Républicains, nécessaire à l’adoption finale du texte.  

Polémique Twitter et retard à l’allumage

Dès 9 h du matin, les quatorze parlementaires de la commission se sont enfermés à huis clos, dans la salle de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale. Plusieurs dizaines de journalistes font alors le pied de grue dans la salle des Quatre Colonnes, guettant les interventions des députés. Au bout d’une heure, Thomas Ménagé a ouvert le bal. Le député Rassemblement national du Loiret, membre de la commission, a réaffirmé son opposition au recul de l’âge de la retraite, qui fera « souffrir les Français » et dénoncé un texte « ficelé d’avance » entre la majorité et Les Républicains.

La présidente du groupe LFI à l’Assemblée, Mathilde Panot, lui a emboîté le pas. « Nous sommes dans une commission « hors sol » qui se déroule comme s’il n’y avait pas de grèves dans notre pays a-t-elle souligné, en cette huitième journée de mobilisation interprofessionnelle contre la réforme. La CGT a dénombré 1,78 million de manifestants dans les rues mercredi, alors que le le ministère de l’Intérieur évalue leur nombre à 480 000.

L’élue, qui a rendu compte des échanges de la commission en temps réel sur Twitter, a expliqué qu’il était pour elle essentiel « d’informer le peuple de ce qu’il se passe ». Elle avait demandé que la  commission soit rendue « publique » dans un souci de transparence. Une requête refusée car contraire aux usages.

« La CMP s’est toujours déroulée à huis clos » a rappelé la députée Renaissance Fadila Khattabi, fustigeant l’attitude de « certains qui twittent en live ». Alors qu’à 11 h le groupe commençait tout juste l’analyse du premier article, la présidente de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée a tenu à défendre la méthode : « La discussion générale a été longue, il n’y a pas de chronomètre, tous les députés et sénateurs peuvent s’exprimer ». « Pour l’instant ce n’est pas très rapide, c’est bien, ça met un peu de suspense », a pour sa part ironisé le député PS Arthur Delaporte.

Près de 230 modifications

En début d’après-midi, une brève interruption de séance a été décrétée à la demande des membres de la Nupes. Brandissant le document de 110 pages qui leur a été présenté le matin même, les élus ont fustigé les nombreuses modifications apportées par la majorité au projet de loi, adopté samedi 11 mars par le Sénat. « En Macronie existe-t-il une opposition ? » s’est emportée Sandrine Rousseau, déplorant un manque de temps criant pour analyser le texte. Celui-ci comporte en effet 228 modifications dont 38 uniquement pour l’article 7, sur le recul de l’âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans.

Mais pour Xavier Lacovelli, sénateur Renaissance des Hauts-de-Seine, les attaques de l’opposition sont infondées : « Il s’agit de modifications rédactionnelles. Si les députés Nupes ne découvrent le texte de la réforme que maintenant alors, effectivement, oui, c’est compliqué ! »

Incertitude à l’Assemblée

En milieu d’après-midi, la commission a adopté les articles 7 puis 8 (sur les carrières longues) particulièrement décriés par l’opposition. Une majorité de huit voix est nécessaire alors que 10 des quatorze membres de la commission sont favorables à la réforme. Sans surprise, le texte a finalement été approuvé dans son ensemble en fin de journée.

La Première ministre, Élisabeth Borne, s’est félicitée de ce résultat. Une preuve, selon elle, qu’il est possible de « bâtir ensemble des solutions ». Le patron des députés LR, Olivier Marleix, membre de la commission, a pour sa part salué une « avancée » dans le compromis trouvé mercredi, tout en reconnaissant que certains dans son groupe « ne souhaiteront pas voter » la réforme.

Les Républicains avaient exigé que le projet de loi soit modifié, notamment sur le nombre d’annuités qu’ils avaient fixé à un maximum de 43 pour les carrières longues. Certains de ses membres, comme le député du Lot Aurélien Pradié, en ont fait un principe fondamental. Or ce principe ne s’appliquera pas à tous les Français selon le texte final, ont dénoncé avec force les membres de l’opposition. « Certains vont devoir travailler jusqu’à 44 ans » a déploré le député LFI Hadrien Clouet. « Les Républicains se sont vendus pour rien. Maintenant nous verrons ce qu’il va se passer à l’Assemblée ».

La majorité a besoin de 289 voix pour faire passer le projet de loi à l’Assemblée. Un chiffre qui pourrait évoluer en fonction des absences et des abstentions. Le gouvernement espère obtenir le soutien de 35 à 40 députés LR, sans réelle certitude à ce stade.

france24

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