Si la Nasa estime que trois Progress et un Cygnus (en secours) seront suffisants pour désorbiter le complexe orbital, elle prévoit tout de même le développement d’un remorqueur spatial afin de disposer d’une solution de secours en cas de défaillance technique des Progress, voire si jamais la Russie déciderait de ne plus coopérer. Ce véhicule américain pourrait coûter jusqu’à un milliard de dollars. Le prix d’une désorbitation sécurisée.
En janvier 2031, il en sera fini de l’ère de la Station spatiale internationale (ISS). Elle sera désorbitée. Le scénario est connu. Nous vous l’avions présenté dans l’article ci-dessous, daté du 7 février 2022. Pour résumer, la Nasa prévoit d’utiliser trois Progress pour réaliser cette manœuvre de désorbitation suivie d’un plongeon au-dessus du point Nemo, l’endroit le plus isolé de la Terre, situé dans l’océan Pacifique sud.
Sauf que les relations avec la Russie étant ce qu’elles sont, les États-Unis ne veulent évidemment pas dépendre du bon vouloir des Russes. Bien qu’aujourd’hui la Nasa et Roscosmos travaillent en bonne intelligence pour utiliser et exploiter le complexe orbital, et bien que les Russes aient garanti la fourniture de ces trois Progress, la Nasa souhaite disposer d’une solution de secours en raison de plusieurs incertitudes. Et comme le souligne Kathy Lueders, chef des vols spatiaux habités de la Nasa, « nous sommes toujours à la recherche de solution de secours dans tout ce que nous faisons ».
Incertitudes sur la fiabilité des Progress et les relations futures avec la Russie
Concrètement, la Nasa souhaite disposer de son propre remorqueur spatial dans le cas où des problèmes techniques ou de fiabilité majeurs viendraient affecter les cargos Progress comme cela s’est récemment produit. Souvenez-vous, en février Roscosmos a été contrainte d’envoyer en urgence un véhicule Soyouz à vide pour remplacer le Soyouz MS-22, amarré à l’ISS mais victime d’une avarie le rendant inutilisable pour transporter un équipage en sécurité.
Quant aux cargos Progress, plusieurs d’entre eux ont connu des fuites et autres problèmes techniques. Toutefois, comme ils ne transportent que du fret et ne sont pas récupérés comme les capsules Dragon de SpaceX, on en parle beaucoup moins. Certes, dans le scénario de la Nasa, un cargo Cygnus est prévu en secours mais seulement pour se prémunir d’une panne ou d’un problème technique d’un des trois cargos russes.
Enfin, tout comme l’invasion en cours de l’Ukraine par la Russie a rompu de nombreux partenariats spatiaux avec la Russie, la Nasa doit tenir compte que les relations russo-américaines pourraient se dégrader fortement selon la tournure des événements en Ukraine ou ailleurs. En outre, la Russie a exprimé le souhait de quitter le programme ISS plus tôt, après 2024, sans donner plus de précision sur sa date effective de départ, pour se concentrer sur la construction de sa propre station spatiale.
L’ensemble de ces données a probablement été un facteur de décision fort dans les plans de la Nasa pour souhaiter développer un remorqueur spatial qui pourrait servir pour désorbiter la Station spatiale lorsqu’elle arrivera à la fin de sa vie opérationnelle. Lors de la présentation du budget 2024 de la Nasa, qui doit être approuvé par le Congrès pour être adopté, on a appris que la Maison Blanche proposerait un financement de 180 millions de dollars pour amorcer un programme de remorqueur spatial et lancer un appel d’offres auprès des industriels américains.
Le coût total du programme est estimé à moins d’un milliard de dollars. Une dépense que la Nasa se serait bien passée et qu’elle aurait sans aucun doute préféré affecter à d’autres programmes.
futura-sciences