L’origine des grandes anomalies du champ magnétique terrestre est longtemps restée un mystère. Des chercheurs proposent cependant qu’elles puissent avoir un lien avec les zones anormalement chaudes présentes à la base du manteau.
Bulle protectrice contre les radiations solaires, le champ magnétique terrestre prend sa source au cœur même de notre Planète. Un processus nommé géodynamo, qui repose sur les flux de matière qui animent le noyau externe composé de fer liquide. Un mécanisme à l’œuvre depuis plusieurs milliards d’années et qui, s’il semble immuable, ne produit cependant pas un champ magnétique stable et régulier autour du globe.
Le champ magnétique s’est ainsi inversé un nombre incalculable de fois depuis son origine qui, au passage, est encore mal datée. Rien que sur les 200 derniers millions d’années, on ne recense pas moins de 300 inversions. Un phénomène naturel et sans conséquence pour les êtres vivants, que l’on a cependant toujours du mal à expliquer.
Des zones de faible champ magnétique qui posent problème aux satellites
En plus de ces inversions, l’intensité du champ magnétique n’est pas uniforme sur le globe. Il existe des régions où l’intensité est très forte, d’autres où elle est très faible. On parle alors d’anomalies du champ magnétique. La plus importante est l’anomalie négative de l’Atlantique sud. Grossièrement, elle s’étend de l’Amérique du Sud jusqu’à la pointe sud de l’Afrique. Le champ magnétique y est relativement faible, une caractéristique qui n’est d’ailleurs pas sans conséquences pour les satellites qui traversent régulièrement cette région du globe.
Lors de leur passage au-dessus de l’Atlantique sud, les satellites en orbite sont ainsi moins bien protégés contre les radiations solaires, au point que certains, comme Hubble, ne réalisent tout simplement aucune mesure lorsqu’ils passent dans cette zone, afin de limiter les risques d’avaries.
L’ANOMALIE DE L’ATLANTIQUE SUD EST ICI VISIBLE (TACHE BLEU SOMBRE).
Si le phénomène est bien connu, son origine l’est beaucoup moins. Pour Jonathan Mound et Christopher Davies, auteurs d’une nouvelle étude publiée dans Nature Geoscience, le manteau et les interactions thermiques qui existent avec le noyau externe joueraient un rôle majeur dans cette histoire.
Un lien avec les anomalies de température à la base du manteau
De manière générale, les courants de convection qui produisent le champ magnétique au sein du noyau externe sont intimement liés à l’évacuation de la chaleur interne de la Terre. La chaleur est en effet transmise de la graine vers le manteau en passant pas le noyau externe, ce qui active des cellules de convection.
La chaleur est ensuite transmise à travers le manteau vers la surface terrestre. Ce flux de chaleur semble donc jouer un rôle primordial dans la génération du champ magnétique. Or, les scientifiques de l’université de Leeds ont remarqué que les zones où le champ magnétique est plus faible correspondent à des anomalies de chaleur dans le manteau inférieur.
Ces anomalies sont bien connues. Il en existe deux principales, nommées LLVP pour Large Low Velocity Province (Grandes provinces de faible vitesse), situées sous l’Afrique et sous le Pacifique, au niveau de la limite noyau-manteau.
LES DEUX GRANDES ANOMALIES DE TEMPÉRATURE NOMMÉES LLVP (EN ROUGE) SONT SITUÉES À LA BASE DU MANTEAU.
Une influence sur le flux de chaleur à l’intérieur du noyau externe
En effectuant des simulations numériques prenant en compte la présence de ces zones de manteau très chaud, les chercheurs se sont rendu compte qu’elles réduisaient le flux de chaleur au sein du noyau externe sous-jacent. En d’autres termes, la présence des anomalies de température à la base du manteau empêche le noyau externe de se refroidir dans ces régions, affectant ainsi les conditions de convection, et donc la génération du champ magnétique. Ce sont donc les différences dans la vitesse d’échappement de la chaleur interne de la Terre qui seraient à l’origine des anomalies du champ magnétique observées en surface.
Reste à savoir combien de temps ce phénomène peut perdurer. Le temps d’existence de ces anomalies serait donc dépendant de l’évolution des zones chaudes à la base du manteau. Or, les processus qui animent le manteau sont très lents et l’on peut estimer que la durée de vie des anomalies de température dans le manteau inférieur est de l’ordre de dizaines de millions d’années. En conséquence, les anomalies du champ magnétique devraient perdurer sur une gamme de temps similaire.
Les auteurs mettent cependant en avant le fait que le noyau externe représente un environnement très dynamique. Il ne serait donc pas surprenant d’observer des variations du champ magnétique de plus petite échelle, sur des périodes plus courtes, de l’ordre de quelques centaines ou de quelques milliers d’années.
FUTURA