Fusion UBS – Credit Suisse : un mariage forcé très critiqué en Suisse

C’est un mariage qui fait grincer des dents. Le rachat dans l’urgence de Credit Suisse par UBS, pour une bouchée de pain et de solides garanties financières des autorités, est très critiqué en Suisse. Les détracteurs y voient de l’amateurisme et un coup porté à la réputation de la place financière suisse.

Les investisseurs ne sont pas non plus rassurés, dans un contexte mondial très défavorable au secteur bancaire frappé de plein fouet par les hausses de taux d’intérêt des grandes banques centrales.

Journée noire pour la place financière suisse

L’action d’UBS reculait de 6% à la mi-journée et celle de Credit Suisse se négociait un peu en-dessous des 76 centimes proposés par la première banque de Suisse, soit 3 milliards de francs en actions UBS.

Celle-ci n’a endossé qu’à contrecoeur dimanche la cape de sauveteur de sa rivale, sous la pression intense des autorités suisses, elles même poussées par leurs grands partenaires économiques, qui craignent une coûteuse contagion.
 

Un écran affiche le nom du Credit Suisse au New York Stock Exchange, le 15 mars 2023.

                                               Un écran affiche le nom du Credit Suisse au New York Stock Exchange

« Honte pour la Suisse » 

Ni la presse, ni un grand nombre de responsables politique ne mâchent leurs mots sur cette fusion, qui crée une super banque et suscite des interrogations sur son poids en Suisse et les conséquences économiques qui en découlent, en particulier pour l’emploi, à cause des nombreuses redondances entre les deux banques.

La lenteur des autorités est aussi dénoncée. Il aura fallu attendre l’annonce de l’accord dimanche à 18H30 GMT pour que le gouvernement prenne la parole sur le sujet après une semaine de crise et plusieurs réunions d’urgence.

La banque centrale et le gendarme des marchés ont laissé la Bourse s’emballer mercredi avant d’agir seulement en début de soirée.

Le président de la droite libérale Thierry Burkhart, parle de « honte pour la Suisse » et il évoque dimanche comme une « journée noire pour la place financière suisse et pour la Suisse dans son ensemble ».
 

C’est un gâchis social pour les emplois, économique pour la réputation de ce pays et une honte politique pour des dirigeants trop lents à agir.

La Tribune de Genève.

Mais ils sont tout aussi nombreux à dénoncer la lenteur de l’identification des risques et de la réaction, du parti des Verts libéraux à l’éditorialiste du quotidien Le Temps.

Beaucoup de responsables politiques et d’éditorialistes reconnaissent toutefois qu’il n’y avait guère d’autres choix, le gouvernement ayant évoqué une nationalisation comme seule alternative en cas d’échec des négociations avec UBS.

Quant à la droite radicale (UDC), la première formation politique de Suisse, elle estime que l’aventurisme à l’étranger a été fatal, là où la branche helvétique de Credit Suisse est très profitable. Elle dénonce aussi l’influence des régulateurs et les autorités de surveillance étrangers sur le plan de sauvetage.

Quelles conséquences sur l’emploi en Suisse ?UBS arrive dans ce mariage forcé en pleine santé, elle a fait plus de 7 milliards de bénéfice net en 2022 et avec une stratégie qui a fait ses preuves. Mais la fusion n’est pas sans risque pour l’établissement zurichois.

« Il y a beaucoup d’incertitudes et des risques significatifs », a réagi Andreas Venditti, analyste chez Vontobel, qui souligne que la façon dont les investisseurs évaluent UBS va changer « substantiellement ».

UBS était déjà le numéro un mondial de la gestion de fortune mais ce rapprochement va faire naître un mastodonte du secteur à la tête de 3.400 milliards de dollars d’actifs sous gestion.

Le siège d’UBS à Zurich, la banque pour laquelle travaillait Stéphanie Gibaud, la lanceuse d’alerte qui a permis à l’Etat français de trouver 12 milliards d’euros cachés par 38 000 contribuables. 

Les actionnaires d’UBS n’ont pas voix au chapitre du rachat, pour pouvoir aller vite.

La fusion risque également d’être lourde de conséquences en Suisse sur l’emploi compte tenu des doublons notamment dans leurs activités de détail dans le pays alpin.

UBS s’appuie sur un réseau de près de 200 agences dans le pays alpin contre 95 chez Credit Suisse. Les deux banques font de la gestion d’actifs. La branche helvétique de Credit Suisse, considérée comme l’un des joyaux, est active notamment dans les hypothèques et les crédits aux PME. « Un zombie a disparu mais un monstre est né », a titré le quotidien zurichois NZZ.

AFP

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