Climat : comment la France est parvenue à baisser ses émissions de gaz à effet de serre en 2022

L’association en charge de l’inventaire des émissions de gaz polluants en France constate une baisse de 2,5% des émissions de gaz à effet de serre en 2022. Un résultat positif qui doit beaucoup à la politique de sobriété engagée pour atténuer l’impact de la crise énergétique.

Le Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (Citepa) vient de publier ses premières évaluations mensuelles des émissions de gaz à effet de serre en France et dans l’outremer pour l’année 2022. Elles font apparaître une baisse de 2,5% pour les secteurs de l’habitat et du tertiaire, de l’industrie, de l’énergie et des transports. L’agriculture, les déchets et les puits de carbone terrestres (forêts et végétations) ne sont pas estimés du fait du manque de données fiables. Ce résultat positif doit beaucoup à des aléas conjoncturels et le Citepa prévient qu’il lui faudra consolider ses constats dans son rapport annuel de juin pour déterminer si l’on est bien dans une baisse structurelle solide des émissions.

Emissions de gaz à effet de serre et snbc Crédit : CitepaLes baisses constatées des émissions de gaz à effet de serre depuis 2015 et la trajectoire en vert que doit suivre la France pour respecter sa stratégie bas carbone. Association créée en 1961 pour le suivi des polluants atmosphériques, le Citepa est l’organisme reconnu par l’ONU pour le suivi des émissions de gaz à effet de serre en France. Copyright Citepa

Car les années passées ont brouillé le paysage. Après des années 2010 décevantes où les émissions ont stagné autour de 460 millions de tonnes, celles-ci ont commencé à baisser à partir de 2018. La pandémie de Covid-19 et la mise à l’arrêt de l’économie au premier semestre 2020 a provoqué une chute historique de 9,6% à 393 millions de tonnes, puis un effet rebond avec la reprise de l’activité en 2021 à 418 millions de tonnes. La bonne nouvelle, c’est que cette hausse s’est avérée inférieure à la chute de 2020. Mais elle constituait cependant un mauvais signal alors que les scientifiques du Giec préviennent depuis leur cinquième rapport de 2014 que les émissions doivent d’ores et déjà commencer à décroître. L’année 2022 s’avère donc cruciale pour savoir dans quelle direction s’engage réellement la communauté internationale en général, l’Europe et la France en particulier.

Résidentiel et industrie en baisse, transports et énergie en hausse

Pour la France, il s’agit donc d’une baisse à 408 millions de tonnes et c’est un réel soulagement. Mais selon les premiers constats du Citepa, il ne s’agit pas tant de l’effet des politiques publiques que des circonstances géopolitiques. La guerre en Ukraine a en effet renchéri le prix de l’énergie et contraint le gouvernement à imposer une politique de sobriété que les ménages et industriels n’ont pu que suivre puisqu’il leur était impossible de supporter budgétairement cette hausse des charges. Ce que montre le Citepa dans son suivi mensuel, ce sont trois phases bien distinctes. Entre mars 2021 et janvier 2022, c’est le rebond et la hausse des émissions.

Puis, de février à septembre 2022, les émissions restent du même niveau élevé qu’en 2021. Et d’octobre à décembre, les émissions sont en forte baisse, de 9% en octobre, 11% en novembre, 5% en décembre. C’est au cours de ce troisième trimestre que se construit le bon résultat de 2022. Le secteur résidentiel et tertiaire a connu ainsi une forte baisse de 11% et celui de l’industrie de 8%. En revanche, la production d’énergie a généré une hausse de 8%, l’indisponibilité du parc nucléaire ayant obligé à un recours plus important aux centrales à gaz et même la réouverture d’une centrale au charbon. Les transports augmentent également de 2% du fait d’un rattrapage par le transport routier de l’arrêt presque total du trafic en 2020.

La question qui se pose est donc celle-ci : que se serait-il passé s’il n’y avait pas eu une flambée du prix de l’énergie ? Impossible de répondre évidemment, mais les prochaines années vont permettre de mesurer l’efficacité sur la durée des mesures de sobriété mises en place en septembre 2022. La baisse de 2022 permet de respecter la stratégie nationale bas carbone (SNBC) qui doit amener la France à un niveau de 359 millions de tonnes émises en 2028. Et même certainement moins encore puisque les objectifs de l’Union européenne sont passés d’une réduction de 40% en 2030 à 55% ce qui oblige les gouvernements à réviser leurs stratégies. La nouvelle SNBC française devrait ainsi être publiée en juin, après que la Commission européenne aura attribué à chaque pays son niveau d’effort. Il n’y a ainsi pas d’autre voie possible que celle de la sobriété.

AFP

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