La mission interministérielle, auteur du document, appelle à un « changement radical dans nos modes de gestion de l’eau et nos pratiques ».
La France n’est pas passée loin du scénario catastrophe, à l’été 2022. Dans un rapport commandé par le gouvernement et qui sera publié mardi 11 avril, mais consulté par l’AFP, il est souligné que le « pire » a été évité lors de la sécheresse de l’été dernier en termes de rupture d’approvisionnement en eau potable. Grâce, d’une part, « à la mobilisation exceptionnelle de l’ensemble des acteurs » et, d’autre part, « à un niveau de remplissage élevé des nappes et des retenues à la sortie de l’hiver 2021-2022 ».
Mais ces conditions pourraient ne plus être réunies dans les prochaines années, voire dès 2023. La mission interministérielle, qui a réalisé ce rapport, appelle à un « changement radical dans nos modes de gestion de l’eau et nos pratiques ». Mais après un début d’année pauvre en pluie, elle constate, dans le même temps, une « prise de conscience ».
Dix-huit recommandations
« La période de plus d’un mois sans pluie début 2023 en France et l’organisation d’événements exceptionnels, susceptibles d’agir sur la pointe de consommation d’eau potable dans plusieurs grandes villes à la même période, comme à l’été 2023 la Coupe du monde de rugby, puis en 2024, les Jeux olympiques et paralympiques, imposent une vigilance particulière quant au risque de rupture d’approvisionnement en eau potable », poursuit la mission.
Pour ce faire, l’administration a formulé 18 recommandations, afin de mieux connaître l’étendue du problème, d’anticiper et d’informer. Les auteurs s’attaquent notamment à l’épineuse question de la sobriété, rappelant l’objectif d’une réduction de 10 % des prélèvements d’ici à 2024, un objectif désormais reporté à 2030 par le président Emmanuel Macron lors de la présentation récente du « plan eau ».
Elle recommande, également, aux ministères de chaque filière, « d’inviter les acteurs à élaborer des feuilles de route nationales d’économies d’eau ».
Durcissement des sanctions
Concernant l’agriculture, à l’origine de 58 % de la consommation nationale d’eau pour irriguer les cultures ou abreuver les bêtes, la mission estime que « la récurrence des sécheresses met en lumière la fragilité de notre modèle agricole et l’impérieuse nécessité d’un effort collectif massif pour en accélérer la transformation ». Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, a regretté que, dans ce secteur, « les acteurs ne prennent pas tous le chemin de la sobriété ».
Les auteurs suggèrent, ensuite, un « cadrage national plus précis » pour aider des préfets submergés de demandes de dérogations en cas de restrictions de prélèvement et face à des mesures perçues par le public comme trop sévères – fermeture des stations de lavage automobile – ou trop laxistes – arrosage des golfs.
En faisant le parallèle avec la « dérogation obtenue par un club de football de niveau national » pour arroser sa pelouse, elle estime que l’autorisation des golfs leur permettant d’arroser leurs terrains n’est « pas compréhensible ». Ici, la réutilisation des eaux usées « peut être une solution », avait estimé Christophe Béchu.
Un chantier « nécessite un peu plus de temps » : celui d’un éventuel durcissement des sanctions « en cas de non-respect des arrêtés interdisant l’irrigation, par exemple », a avancé le ministre, notant que ces arrêtés, l’été dernier, « n’ont pas toujours [été] suivis d’effets ou d’amendes » chez les contrevenants.
AFP