Âgé de 26 ans à peine, l’opposant biélorusse Roman Protassevitch, arrêté dimanche après l’atterrissage forcé à Minsk de son avion à destination de la Lituanie, est désormais détenu dans une prison biélorusse. Militant depuis bientôt dix ans contre le régime d’Alexandre Loukachenko, un mandat d’arrêt avait été émis contre lui en novembre, les autorités lui reprochant d’être « impliqué dans une activité terroriste ».
L’Union européenne demande sa « libération immédiate ». Le journaliste et opposant biélorusse Roman Protassevitch, est au centre de toutes les attentions des Occidentaux depuis son arrestation à Minsk, dimanche 23 mai, après le détournement et l’atterrissage forcé de son avion dans la capitale biélorusse. Détenu dans une prison biélorusse, il a affirmé dans une vidéo diffusée à la télévision publique lundi, être passé aux aveux.
« Le personnel se comporte avec moi de façon tout à fait adéquate et en respectant la loi, je continue de collaborer avec les enquêteurs et suis passé aux aveux concernant l’organisation de troubles massifs », a-t-il affirmé dans cette vidéo dans laquelle il s’exprime assis à une table, face caméra.
D’après la mère du dissident qui s’est entretenue lundi avec le vice-ministre des Affaires étrangères de la Pologne [l’un des deux pays où il résidait], son « état de santé est très grave ».
Son activisme contre Alexandre Loukachenko a commencé sur Internet dès l’adolescence. Né le 5 mai 1995 – selon les autorités biélorusses –, soit un an après l’arrivée d’Alexandre Loukachenko à la tête de cette ancienne République soviétique en 1994, Roman Protassevitch avait quitté la Biélorussie en 2019. Depuis, il partageait sa vie entre la Lituanie et la Pologne, deux plaques tournantes des opposants biélorusses exilés.
Le militant était encore élève dans le secondaire lorsqu’il avait été arrêté et battu en septembre 2012, à 17 ans, par des policiers en civil lors d’une vague de répression avant des élections législatives, avait raconté à l’époque à l’AFP le jeune contestataire. « Les policiers m’ont frappé aux reins et au foie, après j’ai uriné du sang pendant trois jours. Ils ont menacé de m’accuser de meurtres non élucidés », avait-il déclaré.
Opposant sur les réseaux sociaux
Mineur, il avait alors été relâché après quelques heures d’interrogatoire. À cette occasion, des agents des services de sécurité biélorusses – toujours appelés KGB comme à l’époque soviétique – lui avaient réclamé ses mots de passe pour des groupes en ligne. Roman Protassevitch dirigeait deux sites sur le réseau social VKontakte, dont l’un appelait à boycotter les législatives et s’intitulait : « Nous sommes fatigués de Loukachenko ».
Après cette arrestation, Roman Protassevitch travaille comme photographe pour des médias biélorusses et bénéficie en 2017-2018 d’une bourse Vaclav Havel pour aspirants journalistes indépendants. Il quitte la Biélorussie en 2019 après avoir commencé à travailler pour la très influente chaîne pro-opposition Telegram Nexta (« Quelqu’un », en biélorusse).
Le jeune militant devient par la suite le rédacteur en chef de cette chaîne, qui compte aujourd’hui plus de 1,2 million d’abonnés. Un média qui a joué un rôle important dans l’organisation des manifestations anti-Loukachenko en 2020, partageant avec ses abonnés des détails sur les heures et les dates des rassemblements.
La peine de mort toujours appliquée
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Roman Protassevitch est actuellement rédacteur en chef de la chaîne BGM, qui compte 260 000 abonnés. Sa compagne, Sofia Sapéga, arrêtée dimanche avec lui, est étudiante en droit à l’Université européenne des sciences humaines (EHU) de Vilnius. L’opposant a couvert la campagne présidentielle de 2020 durant laquelle la représentante de l’opposition, Svetlana Tikhanovskaïa, affrontait Loukachenko.
En novembre, la Biélorussie avait émis un mandat d’arrêt contre le jeune journaliste pour son travail chez Nexta, déclarant qu’il était « impliqué dans une activité terroriste ». Sur son profil Twitter, l’opposant s’était alors décrit avec un humour narquois comme « le premier journaliste terroriste de l’Histoire ». Les activités terroristes peuvent être punies de mort en Biélorussie, où la peine capitale est toujours appliquée.
Quand l’avion de Ryanair a été détourné et forcé d’atterrir à Minsk dimanche, des passagers ont entendu Roman Protassevitch dire « qu’il risquait la peine de mort ».
Son dernier tweet en date, publié le 16 mai, concerne sa couverture en photos de la visite de Svetlana Tikhanovskaïa à Athènes – la ville d’où son avion est parti à destination de Vilnius.
Source: france24.com
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