Emmanuel Macron hué en Alsace pour son premier bain de foule depuis la réforme des retraites

Emmanuel Macron a pu prendre la mesure de son impopularité, mercredi, en étant accueilli par des huées et des appels à la démission en Alsace, où il effectuait son premier déplacement avec bain de foule depuis la promulgation de la très impopulaire loi réformant les retraites.

« Macron démission » : le chef de l’État a été violemment conspué, mercredi 19 avril, en Alsace, lors de son premier bain de foule depuis des semaines par des manifestants ulcérés par la promulgation de sa très contestée réforme des retraites.

« On est là, on est là », ont-ils scandé dans la petite ville alsacienne de Sélestat, dans le Bas-Rhin, au milieu d’un concert de sifflets. « Vous avez un gouvernement corrompu », a lancé un homme aux cheveux gris, tandis qu’une jeune femme demandait « un signe d’apaisement. Mais là, vraiment on ne voit pas ».

« On a fait des concessions […]. Nous allons continuer à améliorer les choses sur les conditions de travail », a rétorqué Emmanuel Macron. « Je ne demande pas aux gens de prendre les décisions difficiles à ma place. »

Tout au long de son déplacement en Alsace, le premier depuis des semaines et la promulgation le 14 avril du report à 64 ans de l’âge de départ à la retraite, le président de la République a été accueilli par des petits groupes d’opposants en colère.

Avant même son arrivée dans la petite commune de Muttersholtz, où il a visité l’entreprise Mathis, spécialisée dans la construction en bois, une petite centaine de manifestants, tambourinant et scandant des messages hostiles, ont été repoussés par les forces de l’ordre. Ils ont ensuite été maintenus à distance.

« Les casseroles ne feront pas avancer la France », a réagi, devant des journalistes, Emmanuel Macron. « Vous me reverrez toujours avec les gens […], je n’ai pas le droit de m’arrêter », a-t-il ajouté, alors que ses récents déplacements ont tous été chahutés par des opposants à la réforme. Une « colère » s’exprime, mais « elle ne m’empêchera pas de continuer à me déplacer », a également affirmé le président.

Coupure de courant dans l’usine visitée par le président
Dans l’usine Mathis, la CGT a revendiqué une coupure de courant qui n’a toutefois pas plongé les lieux dans l’obscurité. « Nous l’avions annoncé, les énergéticiens seront partout et il fera tout noir pour le président », a déclaré à l’AFP Fabrice Coudour, secrétaire fédéral FNME-CGT.

Le député insoumis du Bas-Rhin Emmanuel Fernandes, invité à échanger avec le chef de l’État, s’est ensuite bâillonné le visage avec un bandeau 49.3, l’arme constitutionnelle utilisée pour faire adopter le texte sans vote. « Je représente cette France majoritaire qui refuse cette réforme et les méthodes de plus en plus brutales » du gouvernement.

« Les casseroles sont la voix du peuple. Dans la rue et aux fenêtres », a tweeté le leader de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon.

Emmanuel Macron est resté en retrait, à l’Élysée, pendant les trois mois de crise, à l’exception de deux visites, en Charente et près du lac de Serre-Ponçon, dans les Alpes.

Lors de son allocution télévisée, lundi, des rassemblements et des concerts de casseroles avaient aussi été organisés dans tout le pays, signe d’une contestation qui s’installe malgré la validation de la réforme par le Conseil constitutionnel et sa promulgation dans la foulée.

Encore mardi soir, un déplacement privé d’Emmanuel Macron à Saint-Denis, près de Paris, a attiré quelque 300 manifestants.

« Accélération »
« Chacun d’entre nous a vocation à aller sur le terrain. Le président de la République est à l’évidence le meilleur ambassadeur de la politique conduite dans ce pays depuis six ans », a estimé mercredi le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, lors de son compte-rendu du Conseil des ministres. « C’est important qu’on parle de ce qui change dans notre pays », a-t-il insisté, évoquant des sorties « possibles », « souhaitables » et « même indispensables ».

Lors de son adresse aux Français, le chef de l’État s’est donné cent jours pour relancer son second quinquennat.

Parmi les chantiers prioritaires qu’il veut faire avancer d’ici au 14 juillet, celui d’un « nouveau pacte de la vie au travail » à négocier avec les partenaires sociaux, et celui des « progrès » dans les services publics comme l’éducation ou la santé.

Dans une interview aux journaux régionaux du groupe Ebra, Emmanuel Macron a assuré mercredi qu’il réinviterait les syndicats à l’Élysée « courant mai » et que les accords qui seraient trouvés avec le patronat seraient « retranscrits fidèlement » dans la loi. C’est « un engagement de méthode », a-t-il ajouté.

Jeudi, il doit enchaîner avec un autre déplacement, dans l’Hérault, consacré à l’école. Il échangera notamment avec des enseignants, des élèves et des parents du collège Louise-Michel de Ganges. Selon plusieurs sources macronistes, il pourrait à cette occasion faire des annonces sur la rémunération des enseignants.

« Accélération » semble être le maître-mot de la séquence que le président de la République veut désormais ouvrir. Travail, immigration, lutte contre la fraude… L’exécutif affiche sa volonté d’engager sans attendre des réformes tous azimuts, une tâche qui s’annonce très compliquée puisque la Première ministre Élisabeth Borne, à laquelle il a réaffirmé sa confiance mercredi, n’est pas parvenue ces dernières semaines à élargir sa majorité relative à l’Assemblée nationale.

 AFP

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