La secrétaire générale de la Fifa, Fatma Samoura, a demandé aux chaînes de télévision, dont certaines sont réticentes en Europe à diffuser le Mondial féminin (20 juillet-20 août en Australie et en Nouvelle-Zélande), de « valoriser » cette compétition « à son juste prix », dans un entretien accordé dimanche à l’AFP.
Vous venez d’effectuer un voyage en Australie. Comment se présentent les préparatifs pour le Mondial féminin?
« J’ai passé trois semaines en Australie où j’ai visité trois stades. Du moment où j’ai mis les pieds à l’aéroport et jusqu’à mon départ, dans toutes les discussions, il n’a été question que de cet événement. Pour les autorités, c’est l’événement le plus important depuis les Jeux olympiques de Sydney en 2000. Les stades sont fin prêts, les stades d’entraînement aussi et les hôtels sont nickel. Nous attendons 1,5 million de visiteurs et plus de 2 milliards de suiveurs à travers le monde. »
En Europe, il y a toutefois une menace d’écran noir dans plusieurs pays importants, dont la France, faute d’accord financier avec les diffuseurs. Que vous inspire cette situation et êtes-vous inquiète?
« Il y a des discussions en cours mais je ne vois pas un pays comme la France, qui a organisé il y a quatre ans cette même Coupe du monde, ne pas la diffuser. L’offre que nous avons reçue n’était pas à la hauteur des attentes de la Fifa, le président (Gianni Infantino, NDLR) l’a dit clairement. Nous avons un bon produit, le plus beau du sport féminin.
Tout le monde parle d’égalité, de parité. Nous voudrions que ces paroles se transforment en actions. L’action la plus simple est de valoriser cette Coupe du monde à son juste prix, c’est tout ce que l’on demande. »
Les chaînes estiment que le prix est trop élevé pour une compétition disputée à l’autre bout du monde avec un décalage horaire très important…
« Les trois matches de la France sont programmés à midi en France en plein été, quand tout le monde sera en vacances. Je ne vois pas le problème. C’est un faux débat. Il faut que les télés mettent un peu plus de moyens sur la table et acceptent de revenir à la table des négociations, avec des prix qui reflètent l’engouement pour le sport le plus populaire en Europe et en France. »
Etes-vous confiante au sujet de la résolution de ce conflit?
« Les discussions ne se sont jamais arrêtées et notre appel a été entendu. C’est le moment de mettre le football féminin sur le devant de la scène et montrer qu’il est aussi important que celui des hommes. Pendant longtemps, les diffuseurs ont été habitués à acheter les compétitions féminines à des prix symboliques et (parmi les compétitions organisées par la Fifa, NDLR) seule la Coupe du monde masculine était valorisée.
Les sponsors et les diffuseurs jouent un rôle primordial dans le développement du football féminin et j’aimerais que cela se transforme par un soutien effectif et massif. »
Quels sont les prochains chantiers pour le développement du football féminin?
« Nous ne voulons plus parler de football masculin ou féminin. Nous voulons parler de football tout court. Pour cela, il faut des moyens sur la table. Il faut plus de personnel technique, plus d’infrastructures adaptées. Par exemple, les vestiaires sont le plus souvent conçus pour un public masculin. Nous voulons mettre en place des installations qui répondent aux besoins spécifiques des filles.
Nous voulons multiplier le nombre de compétitions dans toutes les catégories d’âge, mettre en place des ligues continentales là où elles font défaut. Nous avons multiplié par dix le +prize money+ depuis 2015, celui de cette Coupe du monde sera de 152 millions de dollars, qui seront directement injectés dans les sélections nationales féminines. Nous allons développer aussi des programmes pour le coaching au plus haut niveau. »
Il y a eu un vent de fronde des joueuses internationales dans plusieurs pays (France, Canada, Espagne) pour réclamer de meilleurs salaires ou des moyens dignes du haut niveau. Qu’en pensez-vous?
« Des solutions ont été trouvées. La France a aujourd’hui l’un des meilleurs coaches du monde (Hervé Renard, NDLR). Les clubs ont également compris l’importance de rémunérer les joueuses à leur juste valeur. Il y a encore des difficultés dans certaines parties du monde mais en Europe, il n’y a plus de possibilité de faire marche arrière. Les joueuses sont dans leur droit de réclamer une meilleure reconnaissance et la Fifa est derrière ces joueuses à 100%. »
AFP