Dans l’urgence de l’éruption du volcan Nyiragongo le 22 mai et du chaos de l’évacuation de Goma à ses pieds cinq jours plus tard, la ville reste à ce jour relativement épargnée par les pillages, mais la menace guette.
« Ce soir là, il y a eu des cas de vols », raconte Augustin Kambale, un résident du quartier de Buhene, où s’est immobilisé au petit matin du 23 la coulée de lave en fusion.
« Des bandits sont rentrés chez nous, ils ont cassé la porte et la fenêtre. Ils ont pillé la télévision, les tables, tout ! Ils se sont volatilisés dans la nature. On est revenus, on a découvert ça, juste quelques vêtements qui trainaient encore par terre », explique M. Kambale. « Pareil en face de chez nous, une boutique a été complètement pillée ».
Pas de gros dégâts
Même scénario dans le quartier de Mapendo, qui jouxte la frontière rwandaise. « Les cas isolés de vols n’ont pas manqué », observe George Rwagaza, président du conseil de la jeunesse du quartier. « Mais nous n’avons pas enregistré de gros dégâts », souligne-t-il.
Et c’est là l’important. Les vols et cambriolages sont restés à un niveau limité, a-t-on constaté.
Lors de l’éruption de 2002, qui avait vu la lave couper la ville en deux pour aller se déverser dans le lac Kivu, les pillages furent nombreux, voires généralisés. De nombreuses victimes, parmi la centaine de morts officiels de l’éruption, furent d’ailleurs tués dans ces pillages.
Depuis l’évacuation surprise de Goma ordonnée le 27 mai par crainte d’une nouvelle éruption, la capitale du Nord-Kivu est vidée d’une grande partie de ses habitants, la cité en partie désertée.
Là aussi, les incidents semblent se limiter à quelques cambriolages. Sollicitées par l’AFP, des responsables policiers ont refusé de s’exprimer, mais affirment que les forces de l’ordre sont déployées pour assurer la sécurité.
Lors de son ordre d’évacuation, le gouverneur militaire, le général Constant Ndima, avait assuré que les zones évacuées seraient « sécurisées » par l’armée et la police.
« Les forces de l’ordre ont renforcé leurs patrouilles (…). Aujourd’hui il y a une certaine sécurité », assure le représentant du quartier Mapendo.
Cette présence reste cependant peu visible de jour comme de nuit, a-t-on constaté dans différents quartiers comme Buhene, Bujumbu, Murara… Où en fait les habitants se sont organisés pour surveiller leurs biens, maisons, boutiques et autres propriétés privées.
« Des jeunes sont restés dans les maisons, les gens fuyaient mais ils ont laissé quelqu’un pour garder les parcelles, ce qui a fait qu’il y a eu bien moins de vols qu’en 2002 », explique un chef de quartier.
« Brigades de jeunes »
« La criminalité est relativement importante en temps normale à Goma, et il y a eu des cas de pillages ces derniers jours », constate le responsable de l’une des nombreuses ONG sur place. « Mais les habitants se sont organisés pour laisser des jeunes derrière eux pour surveiller », souligne aussi cette source.
« Il s’est développé des brigades des jeunes qui se chargent d’appréhender les malfrats », confirme Plaice Nzilamba, un responsable de la société civile du Nord-Kivu. « Bon malheureusement certains achèvent les voleurs qu’ils attrapent… », ajoute-t-il, un peu gêné.
« Comme c’est un militaire (le gouverneur) qui a donné l’ordre d’évacuer, en annonçant que des soldats allaient se charger de la sécurité dans la ville, je crois que les voleurs ont pris peur d’être tout simplement tués ou punis sévèrement », estime par ailleurs M. Nzilamba. « Et puis il faut dire que même les voleurs ont dû fuir, car la situation était imprévisible ».
La Monusco, la mission de l’ONU en RDC, dont Goma est l’une des principales bases, a également joué son rôle.
« Pour éviter une augmentation des incidents de sécurité comme les pillages (…), nous avons travaillé étroitement avec les autorités congolaises en faisant par exemple des patrouilles conjointes Monusco et forces de sécurité nationales », déclare à l’AFP Omar Aboud, chef de bureau de la Monusco à Goma.
Le rétablissement de l’électricité -après la coupure d’une ligne à haute tension par les laves- est également une priorité des autorités, soucieuses d’éviter que la ville ne reste dans le noir complet à la nuit tombée.
En attendant, les voleurs guettent: « la situation est critique dans certains quartiers », s’inquiète un jeune du quartier Trois lampes, qui n’a pas évacué à cause de sa vieille mère refusant de quitter sa maison.
« On voit des têtes qu’on ne connait pas rôder autour des maisons inhabitées. Avec des amis on fait des rondes la nuit avec des machettes et des couteaux. Même les policiers quand ils nous croisent la nuit, ils nous encouragent ».
Source: afp.fr