Depuis 2013, l’Australie mène une politique migratoire draconienne, vivement contestée par la communauté internationale et les ONG, mais dont les mérites sont vantés par l’extrême droite française.
« Vous ne ferez pas de l’Australie votre maison. » En 2014, le gouvernement australien lançait sa campagne « No Way » pour dissuader les migrants clandestins d’affluer par bateau sur l’île-continent. Presque dix ans plus tard, et au lendemain du chavirement d’un bateau surchargé de migrants qui pourrait avoir fait des « centaines » de morts au large de la Grèce, plusieurs élus d’extrême droite ont vanté les mérites de « No Way » pour éviter ce genre de drame.
« L’Australie a réussi, avec sa campagne dissuasive « No Way », à diminuer [le nombre de bateaux] dans les eaux côtières. (…) Il faut rendre nos pays inhospitaliers pour l’immigration massive », a déclaré ce jeudi sur BFMTV le député RN Julien Odoul.
Même thèse pour son collègue député Grégoire de Fournas, lui aussi sur notre antenne: « Il y a eu un pays en 2014, l’Australie, qui a eu une politique volontariste de prévention. C’est cette politique qu’il faut mettre en place. »
Des centres de rétention sur des îles
La politique hostile à l’immigration clandestine en Australie remonte au début des années 2000. Chaque bateau intercepté par les gardes-côtes australiens est systématiquement reconduit en dehors de l’île, dans des centres de rétention sur d’autres petites îles du Pacifique comme Nauru ou Manus en Papouasie-Nouvelle-Guinée.
Après leur fermeture en 2007, ces centres de rétention ont été rouverts en 2012, alors que 200 bateaux clandestins arrivaient en moyenne par an en Australie entre 2010 et 2013. C’est pourquoi, en 2013, sous l’impulsion du Premier ministre conservateur Tony Abbott, la loi s’est encore durcie: ces demandeurs d’asile sont tous refoulés et se voient interdire, à vie, la possibilité de s’établir durablement en Australie.
« L’Australie, depuis 2001, délocalise des centres de rétention administratifs dans des îles à côté, où les personnes s’immolent chaque année, où il y a une détresse psychologique », a rappelé sur BFMTV Saphia Aït Ouarabi, vice-présidente de SOS Racisme.
60% de pensées suicidaires
En effet, des cas médiatisés se sont multipliés au cours des dernières années. En 2016, deux migrants s’étaient immolés par le feu en l’espace de dix jours dans le centre de rétention de Nauru. Selon un rapport de Fairfax Media cette même année, un cas d’automutilation, de tentative de pendaison, d’empoisonnement ou d’étouffement était commis tous les deux jours dans ces centres.
De son côté, Médecins sans frontières avait publié en 2018 un autre rapport sur les réfugiés de l’île de Nauru. « Parmi les 208 patients réfugiés et demandeurs d’asile, 60 % ont eu des pensées suicidaires et 30 % d’entre eux ont tenté de se suicider », pouvait-on y lire.
L’ONU avait même, à l’époque, vivement critiqué la politique du gouvernement australien. La changer aurait relevé « de la décence et du traitement élémentaires des êtres humains », avait demandé Catherine Stubberfield, la porte-parole du haut commissariat aux réfugiés (HCR).
D’après nos confrères du Monde, en février dernier, 250 personnes étaient encore captives sur Manus ou Nauru tandis que 1200 autres ont été transférées en Australie pour des raisons médicales.
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