Durant l’été, de nombreux hôpitaux vont restreindre l’accès aux urgences faute de soignants.
Services fermés, accueil « régulé » : à l’orée des grandes vacances, de nombreux hôpitaux doivent restreindre l’accès aux urgences faute de soignants. Une situation dégradée devenue habituelle, assumée par les autorités qui enjoignent d’appeler le Samu en premier recours.
La « régulation » par le Samu s’est imposée
La « régulation » devient la règle. Depuis le 3 juillet en Mayenne, il est « nécessaire de faire le 15 avant d’accéder aux urgences (…) de 18h30 à 8h00 », selon l’agence régionale de santé (ARS) Pays de la Loire. Décision justifiée par les « tensions sur les ressources humaines » qui « obligent à adapter le fonctionnement » des trois services concernées, à Laval, Mayenne et Château-Gontier.
Filtrage aussi, de jour comme de nuit, dans la Manche où « seules les personnes préalablement orientées par le 15 sont accueillies aux urgences » depuis lundi, pour « limiter la surcharge » en période de « forte fréquentation touristique », explique l’ARS Normandie. Les sept hôpitaux du département (Avranches, Cherbourg, Coutances, Granville, Saint-Hilaire, Saint-Lô, Valognes) sont à la même enseigne, « qu’ils soient en situation de tension ou non ».
Aux grands maux les grands remèdes : généralisée l’an dernier pour éviter une catastrophe annoncée – 20% des services d’urgences étaient en grandes difficultés avant l’été 2022 – la « régulation » par le Samu s’est imposée comme la panacée universelle, pendant les épidémies de l’hiver comme durant le bras de fer sur l’intérim médical au printemps.
Encore convalescents, les petits hôpitaux ne peuvent échapper à la rechute estivale. A Redon (Ille-et-Villaine) la fermeture nocturne des urgences – de 20h00 à 8h00 – a été prolongée jusqu’à début septembre. Celles de Meulan (Yvelines) resteront closes dès 17h30 jusqu’à fin août, tandis que celles de Vouziers (Ardennes) ont été définitivement rétrogradées au rang de « centre de soins non programmées ».
L’intitulé est également utilisé à Vittel (Vosges), où le rideau tombera à 18h30 au moins jusqu’à la mi-juillet, comme à Manosque (Alpes-de-Haute-Provence) où sont aussi prévues à certaines dates une « régulation de jour » voire une fermeture pure et simple.
« Fermetures sèches »
Un cas loin d’être isolé : rien que sur la semaine écoulée, des fermetures ponctuelles de 12 à 24 heures ont été rapportées à Ambert (Puy-de-Dôme), Guebwiller (Haut-Rhin), Argentan (Orne), Lisieux (Calvados) et La Ferté-Bernard (Sarthe). Au risque de contredire le ministre de la Santé, François Braun, qui affirmait fin juin qu' »il n’y a pas d’urgences fermées, sauf cas exceptionnel ».
Ses anciens collègues urgentistes ne sont pas du tout de cet avis. « Il y a des fermetures sèches », a ainsi affirmé lundi Agnès Ricard-Hibon, cheffe du Samu du Val-d’Oise, quand Jean-François Cibien, en poste à Agen et président de l’intersyndicale Action Praticien Hôpital (APH), a carrément dénoncé « un mensonge d’Etat ».
Une passe d’armes sur fond de grève des médecins hospitaliers pour réclamer des revalorisations, en particulier sur les gardes et astreintes qui cristallisent leur mécontentement. Les négociations avec le ministère sur ce point restent sans suite à ce jour. Désespérant d’un arbitrage de Bercy et Matignon, l’APH demande désormais à rencontrer Emmanuel Macron.
Après tout, le sujet est devenu régalien depuis le Covid. Et le chef de l’Etat en a fait une priorité de son second mandat, promettant en janvier de sortir l’hôpital d’une « crise sans fin », puis en avril de « désengorger les urgences » d’ici fin 2024. Pari périlleux, qui repose beaucoup sur le « service d’accès aux soins » associant Samu et médecins libéraux, censé être déployé sur tout le territoire avant la fin de l’année.
Sauf que les assistants de régulation médicale, premiers à décrocher les appels au 15, viennent eux aussi d’entrer en grève « illimitée » pour exiger des hausses de salaires et d’effectifs. Mouvement suivi dans une soixantaine de départements, selon leur association nationale Afarm, qui met en garde : « Les prochains jours vont être très difficiles ».
AFP