Niger : des militaires affirment avoir destitué le président

Le président du Niger, Mohamed Bazoum, a été destitué, a annoncé tard mercredi soir un groupe de soldats à l’antenne de la télévision publique nigérienne, au nom d’un Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP).

Nous, forces de défense et de sécurité, réunis au sein du CNSP, avons décidé de mettre fin au régime que vous connaissez, celui du président Bazoum, a déclaré le colonel-major Amadou Abdramane, entouré de neuf autres militaires en tenue. Les frontières sont fermées et un couvre-feu a été décrété, a-t-il ajouté.

Mohamed Bazoum était retenu mercredi dans son palais présidentiel de la capitale du Niger, Niamey, par des membres de la garde présidentielle, selon une source sécuritaire.

Le Niger est l’un des derniers alliés des pays occidentaux dans une région du Sahel ravagée par la violence djihadiste et dont deux voisins, le Mali et le Burkina Faso, dirigés par des militaires putschistes, se sont tournés vers d’autres partenaires, dont la Russie.

Plus tôt dans la journée, la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a appelé les auteurs de cet acte à libérer immédiatement et sans condition le président de la République démocratiquement élu.

Le président Bazoum parle, derrière un lutrin.

Le président du Niger, Mohamed Bazoum, avait livré une allocution en juin 2022 à Paris dans le cadre du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial. (Photo d’archives)

Même ton du côté de l’Union africaine (UA), qui a condamné fermement de tels agissements de la part de militaires agissant en totale trahison de leur devoir républicain.

Dans un message publié sur Twitter – rebaptisé X – ensuite supprimé, la présidence du Niger avait indiqué que des éléments de la garde présidentielle (GP) ont engagé un mouvement d’humeur antirépublicain et tenté en vain d’obtenir le soutien des forces armées nationales et de la garde nationale.

L’armée et la garde nationale sont prêtes à attaquer les éléments de la GP impliqués dans ce mouvement d’humeur s’ils ne reviennent pas à de meilleurs sentiments, a ajouté la présidence, en affirmant que le président de la République et sa famille se portent bien.

Paris et Washington réagissent

Des soldats, le doigt sur la gâchette, debout ou assis dans des véhicules équipés de mitrailleuses, étaient visibles devant le siège de la télévision publique à Niamey et dans les rues y menant, sans toutefois entraver la circulation, a constaté un journaliste de l’Agence France-Presse (AFP).

Aucun dispositif militaire particulier n’était en revanche visible dans le quartier de la présidence, la circulation y était normale, et aucun coup de feu n’a été entendu.

Dans les premières heures de la matinée, l’accès à la présidence avait été bloqué en raison du mouvement des membres de la GP.

L’Union européenne (UE) a condamné toute tentative de déstabiliser la démocratie et [de] menacer la stabilité du Niger.

Une rue déserte sous le soleil.

Les rues étaient désertées mercredi, à Niamey, au Niger, en proie à un coup d’État durant lequel le président, démocratiquement élu, est retenu par des membres de la garde présidentielle.

Le Niger, partenaire privilégié de la France dans le Sahel en proie à la violence djihadiste dans plusieurs parties de son territoire, est dirigé par le président démocratiquement élu Mohamed Bazoum, au pouvoir depuis avril 2021.

En France, une porte-parole du ministère des Affaires étrangères a condamné fermement toute tentative de prise de pouvoir par la force.

La France est préoccupée par les événements en cours au Niger et suit attentivement l’évolution de la situation, a-t-on ajouté.

De son côté, le secrétaire d’État américain Antony Blinken a appelé à la libération immédiate de Mohamed Bazoum. Je me suis entretenu avec le président Bazoum plus tôt dans la matinée et je lui ai dit clairement que les États-Unis le soutenaient résolument en tant que président démocratiquement élu du Niger. Nous demandons sa libération immédiate, a déclaré M. Blinken, en visite en Nouvelle-Zélande.

Un passé mouvementé

L’histoire du Niger, pays vaste, pauvre et désertique, est jalonnée de coups d’État.

Depuis l’indépendance de cette ex-colonie française en 1960, il y en a eu quatre, le premier ayant eu lieu en avril 1974 contre le président Diori Hamani, tandis que le dernier, qui remonte à février 2010, a renversé le président Mamadou Tandja. C’est sans compter les tentatives de putsch, nombreuses.

Le 31 mars 2021, le gouvernement nigérien avait annoncé l’arrestation de plusieurs personnes après une tentative de coup d’État présumée, deux jours avant la prestation de serment du président Mohamed Bazoum.

Le cerveau présumé de cette tentative de coup d’État, Sani Gourouza, un capitaine de l’armée de l’air, avait été arrêté au Bénin voisin et remis aux autorités nigériennes.

En avril 2022, Ousmane Cissé, ancien ministre nigérien de l’Intérieur d’un régime de transition militaire (2010-2011), avait été écroué pour son implication présumée dans ce putsch raté.

Cette arrestation était également en lien avec un dernier coup d’État déjoué en mars 2022 alors que le président Bazoum se trouvait en Turquie, a dit un officiel nigérien, mais les autorités n’avaient pas communiqué publiquement sur ce deuxième putsch manqué.

En février, M. Cissé a été relaxé, faute de preuves, mais cinq des militaires, présentés comme les principaux meneurs de la tentative de putsch de 2021, ont été condamnés à 20 ans de prison, dont Sani Gourouza.

En janvier 2018, neuf militaires et un civil avaient été condamnés par un tribunal militaire nigérien à des peines de 5 à 15 ans de prison pour avoir tenté de renverser en 2015 l’ex-président Mahamadou Issoufou, prédécesseur de Mohamed Bazoum.

.radio-canada.

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