Le ministère de l’Intérieur a annoncé, mardi 19 septembre, le déploiement de 200 gendarmes et policiers aux points frontaliers entre la France et l’Italie. Les effectifs passent ainsi de 500 à 700 agents, en prévision des arrivées depuis Lampedusa. Sur le terrain, les associations ne constatent pas de bouleversement, et observent avec recul cette séquence politique.
Deux cents gendarmes et policiers supplémentaires vont être déployés aux points frontaliers entre la France et l’Italie, a annoncé le ministère de l’Intérieur mardi 19 septembre, anticipant une hausse des arrivées depuis Lampedusa.
Ce nouveau déploiement fait basculer les effectifs de 500 à 700 agents. Ces derniers seront répartis aux différents points de passage entre la France et l’Italie, tandis que les postes-frontières situés à Menton et Montgenèvre vont être agrandis temporairement pour gérer les interceptions, précise France Inter.
La DGSI (Direction générale de la Sécurité intérieure) est également appelée en renfort, annonce l’Intérieur, avec des agents déjà habitués à travailler pour l’agence européenne de garde-frontières Frontex. Leur rôle affiché : s’assurer de l’absence de profils liés à des groupes terroristes dans les passages.
« On attend de voir dans les prochains jours »
Le 14 septembre, en l’espace de 48 heures, plus de 7 000 migrants ont débarqué sur l’île de Lampedusa, petit bout de terre italienne, en Méditerranée. Depuis le début de l’année, près de 126 000 sont arrivés en Italie, soit deux fois plus qu’en 2022. Mais les arrivées de ces dernières semaines ne sont pas pour autant « exceptionnelles », nuance Cecilia Momi, chargée de plaidoyer pour MSF Italie, auprès d’Infomigrants : « elles atteignent un niveau d’avant-covid ».
Sur le terrain, les associations observent donc avec recul cette séquence politique. « On attend de voir dans les prochains jours », indiquent plusieurs sources associatives, qui disent ne pas ressentir encore les effets directs de la situation à Lampedusa sur le nombre d’arrivées.
À Vintimille par exemple, les arrivées se font très majoritairement depuis Lampedusa, pour des personnes parties de Tunisie. Les exilés rallient cette zone de passage « en deux ou trois jours » depuis Lampedusa, assure Cecilia Momi. Et ce, en prenant des trains via Milan essentiellement, mais aussi via Naples, Turin ou Rome, en fonction de leurs contacts déjà établis en Europe.
Pour autant, le nombre d’arrivées à Vintimille ne connaît pour l’heure pas de changements majeurs, assure-t-elle. « On voit entre 100 et 200 personnes qui arrivent chaque jour », précise Maurizio Marmo, responsable de Caritas à Vintimille. C’est davantage en août qu’en septembre, observe-t-il. Mais ces chiffres varient : « Lundi par exemple, on était plutôt sur 80 personnes ».
Une succession d’annonces
Idem pour les annonces autour du renforcement des contrôles frontaliers : pour l’heure, pas de changement majeur par rapport au climat habituel. « Hier, nous avons vu un hélicoptère, des militaires sur les sentiers de montagne », décrit Maurizio Marmo de Caritas. « Reste à voir combien de temps ce dispositif sera maintenu ».
Car ce type d’annonces est loin d’être rare, bien au contraire. En visite à Menton le 12 septembre, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin avait déjà annoncé le renforcement des effectifs dans les Alpes, pour passer à 200 agents au total, via un doublement des unités de forces mobiles de deux à quatre agents chacune. Le nombre de militaires chargés de faire des reconnaissances en montagne dans le cadre de l’opération Sentinelle doit également passer de 60 à 120.
Une « border force » française avait été lancée en juin, regroupant sous le même commandement, celui du préfet, la police aux frontières (PAF), la force Sentinelle et les douanes. Le déploiement de drones autour de Menton et Vintimille avait également été annoncé.
Fin avril, encore, la Première ministre Élisabeth Borne avait promis l’envoi de 150 gendarmes et policiers supplémentaires sur les différentes zones frontalières franco-italiennes. Plus loin encore, en novembre 2022, des contrôles renforcés aux points de passage avaient été annoncés, pendant la séquence autour du débarquement de l’Ocean Viking.
Entre 100 et 120 refoulements par jour
Les refoulements de la police aux frontières (PAF) française se poursuivent à un rythme soutenu. Entre 50 et 80 refoulements par jour durant la période hivernale ; et depuis d’avril-mai, autour de 100 à 120 refoulements par jour, comptabilise MSF. Cela s’explique du fait d’une période estivale plus propice aux passages : « Les refoulements augmentent avec les arrivées », explique Cecilia Momi.
Reste qu’avec les renforcements successifs des effectifs policiers, les contrôles de la PAF « sont systématiques » dans le train allant de Vintimille à Menton, décrit encore la responsable de MSF. Pas de quoi décourager les personnes de retenter le passage : certaines se font refouler vers Vintimille « sept ou huit fois » avant d’y parvenir.
La conséquence bien réelle est que « les personnes cherchent des alternatives » au passage en train, indique Cecilia Momi. Entre autres : « Payer quelqu’un pour passer en voiture ; ou bien marcher à pied le long de l’autoroute, ou de la voie ferrée, ce qui est très dangereux ». Un homme était ainsi décédé, début janvier, électrocuté après être monté sur le toit d’un train pour tenter de passer en évitant les contrôles.
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