France: le Sénat reste largement à droite, l’extrême droite fait son retour

Les résultats des élections sénatoriales ont confirmé dimanche la stabilité de la Chambre haute, dominée par la droite, et les difficultés des macronistes, dans un scrutin marqué par le retour du Rassemblement national au Palais du Luxembourg.

Pas de surprise au palais du Luxembourg. Le deuxième hémicycle du Parlement garde la même couleur politique au soir d’élections sénatoriales partielles. À huit mois du prochain grand rendez-vous électoral des européennes, 170 des 348 sièges de sénateurs étaient à pourvoir pour six ans dans une quarantaine de départements, des Landes au Pas-de-Calais en passant par Paris, l’Île-de-France ou Mayotte. Les 178 autres le seront en 2026. Environ la moitié du Sénat est renouvelable tous les trois ans lors d’un scrutin indirect – par 162 000 gands électeurs, conseillers municipaux à 95% –, qui peine toujours à passionner les foules.

Verdict : la droite garde une majorité solide. Le parti Les Républicains vise « 143 ou 144 sénateurs », contre 145 auparavant. Dans le groupe allié de l’Union centriste, Hervé Marseille, réélu dans les Hauts-de-Seine, espère « enrichir » ses troupes et « atteindre la soixantaine de membres ». Le Parti socialiste (PS) compte bien rester le deuxième groupe du Sénat (64 sénateurs actuellement), dans un hémicycle encore attaché au traditionnel clivage gauche-droite. Ces résultats sont le reflet des élections municipales où la droite avait réalisé de bons scores dans les villes de taille moyenne.

« Ce renouvellement sénatorial conforte la majorité sénatoriale de la droite et du centre », s’est réjoui Gérard Larcher (LR), réélu à 74 ans pour un sixième mandat dans les Yvelines, avant une reconduction plus que probable à son poste de président du Sénat le 2 octobre. « Le Sénat continuera à être ce contre-pouvoir indispensable à la démocratie », a-t-il ajouté. De son côté, le chef du groupe LR Bruno Retailleau a fustigé après ce scrutin indirect un « nouvel échec du président de la République » au Sénat, en raison de la « déconnexion du macronisme avec le terrain ».

Renaissance en perte de vitesse
Les candidats du parti Renaissance ont payé leur faible ancrage local, avec une série de revers. Dès dimanche matin, ils ont enregistré une défaite emblématique, celle de la secrétaire d’État à la Citoyenneté Sonia Backès, seule ministre en lice, battue au second tour en Nouvelle-Calédonie par l’indépendantiste Robert Xowie. Cette défaite pourrait-elle la conduire à quitter le gouvernement, une règle jusqu’ici appliquée par le président de la République pour ses ministres aux législatives ? Ni l’Élysée ni Matignon n’ont répondu dimanche à l’AFP à ce sujet.

François Patriat, président du groupe Renaissance au Sénat, relativise et parle d’un revers attendu : « Nous étions seuls contre tous. Nous arrivons à sauver l’essentiel du groupe aujourd’hui. » Parmi ses cadres au Sénat, Renaissance a sauvé le siège de Xavier Iacovelli (Hauts-de-Seine), mais pas celui de Julien Bargeton à Paris ni d’Alain Richard (Val-d’Oise). Les macronistes réunis au sein du groupe RDPI (24 élus) risquent de voir leurs troupes diminuer. À l’image de Louis Vogel, élu en Seine-et-Marne, le parti Horizons d’Édouard Philippe semble de son côté plus fringant.

À gauche, les élus de Paris en force
Les socialistes tirent leur épingle du jeu. « Symboliquement, c’est important », reconnaît leur chef de file Patrick Kanner – réélu dans le Nord – , satisfait d’avoir signé « un accord gagnant-gagnant » avec les communistes et les écologistes dans une quinzaine de départements. « Je m’étais fixé, avec mes collègues communistes et verts, la barre des 100 sénateurs (de gauche), je crois qu’on va la tutoyer », a-t-il affirmé. Pari gagné dans la capitale où ce rassemblement envoie au palais du Luxembourg huit des douze sénateurs parisiens, pendant que la droite divisée obtient quatre sièges.

L’ancien candidat écologiste à la présidentielle Yannick Jadot fait ainsi son entrée au Sénat, tout comme le communiste Ian Brossat. Ce résultat marque « une victoire historique des écologistes à Paris », a lancé auprès de l’AFP l’élu écologiste, qui y voit la « montée en puissance des écologistes sur ce territoire ». « Je vais être au Sénat pour à la fois porter tout le projet écologiste, sur l’immigration, sur la décentralisation, sur la proportionnelle, mais faire en sorte que la France soit à la hauteur du défi écologique. »

Yannick Jadot devrait rejoindre un groupe vert légèrement renforcé, notamment par Mathilde Ollivier, élue sénatrice des Français de l’étranger, à seulement 29 ans, et qui devient ainsi la benjamine au Sénat. « C’est important pour ma génération, la génération climat aussi, d’être représentée dans les institutions », a-t-elle réagi auprès de l’AFP.

Trois sièges pour l’extrême droite
Le groupe communiste devrait aussi légèrement progresser. Cette alliance de gauche n’a pas plu à la France insoumise, écartée faute de disposer d’un maillage local suffisant pour garnir les rangs du Sénat.

Enfin, le Rassemblement national, absent au Sénat depuis le départ de Stéphane Ravier chez Reconquête, fait son retour à la chambre haute. Le parti d’extrême droite a annoncé obtenir trois sièges : Christopher Szczurek dans le Pas-de-Calais, Joshua Hochart dans le Nord et Aymeric Durox en Seine-et-Marne. « C’est une très grande interpellation, une sorte de grande vague qui avance sans arrêt », a réagi le socialiste Patrick Kanner.

Plusieurs figures ont laissé leur place, comme les communistes Eliane Assassi et Pierre Laurent, le sénateur (LR) de la Meuse Gérard Longuet ou encore les socialistes Jean-Pierre Sueur et David Assouline.

Revenue ces derniers mois sur le devant de la scène médiatique avec des commissions d’enquête remarquées (Affaire McKinsey, Fonds Marianne…), la chambre haute se plaît à souligner le sérieux de ses débats face au tumulte de l’Assemblée.

AFP

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