Le glaucome touche plus d’un million de personnes en France, mais près de la moitié l’ignore selon la Société française d’ophtalmologie. Premiers signes, facteurs de risque, traitements : on fait le point.
Le glaucome est une maladie sournoise qui se développe la plupart du temps sans douleur, ni gêne. Pourtant, le glaucome est la première cause de cécité en France. Plus d’un million de personnes sont concernées puisqu’elle touche 1 à 2% des plus de 40 ans et 10% des plus de 70 ans.
Cette maladie oculaire apparaît le plus souvent après l’âge de 45 ans. Elle se manifeste par une diminution du champ de vision, qui se rétrécit peu à peu sur les côtés, tandis que la vision au centre reste longtemps préservée.
Qu’est-ce qui provoque le glaucome ?
Cette perte du champ visuel est due à plusieurs mécanismes, dont l’augmentation de la pression dans l’oeil.
Les rayons lumineux traversent d’abord la cornée, puis l’iris et la pupille, avant d’atteindre le cristallin. Le cristallin fait converger les rayons sur la rétine. La rétine est tapissée de cellules photoréceptrices qui convertissent la lumière en message nerveux. Le nerf optique conduit le message nerveux jusqu’au cerveau, qui lui reconstitue l’image.
L’oeil produit en permanence un liquide appelé humeur aqueuse. Son rôle : nourrir l’oeil, éliminer ses déchets et réguler la pression dans l’oeil.
Ce liquide est secrété dans la chambre postérieure de l’oeil et rejoint la chambre antérieure (entre la cornée et le cristallin) en passant à travers la pupille.
Il est finalement évacué par un petit conduit, au point de jonction entre l’iris et la cornée. Il arrive que le liquide ne s’évacue plus correctement et qu’il s’accumule dans le globe oculaire. La pression dans l’œil augmente alors de manière anormale : c’est le début du glaucome.
Plusieurs types de glaucome
On distingue plusieurs types de glaucome. Le premier est l’hypertonie oculaire, qui traduit une suspicion de glaucome, où la pression de l’oeil est augmentée de façon anormale mais sans aucune lésion. La surveillance est alors de mise. Le plus fréquent est le glaucome à angle ouvert, anciennement appelé glaucome chronique. Il représente 80 à 90% des cas (source Vidal). L’évacuation du liquide est ralentie de manière progressive.
Au début, la maladie évolue silencieusement, sans symptômes ni douleurs. Mais petit à petit, les cellules de la rétine, puis la tête du nerf optique est altérée et le champ visuel se réduit. La baisse de l’acuité visuelle est irréversible et si rien n’est fait, le patient peut devenir aveugle.
Le deuxième type de glaucome est le glaucome à angle fermé, ou glaucome aigu. L’évacuation de l’humeur aqueuse cesse brutalement et la pression augmente brusquement dans l’oeil. La douleur est intense (impression que l’œil va « exploser ») et l’acuité visuelle baisse brutalement. Le traitement est particulièrement urgent. Le glaucome aigu survient souvent lorsque la luminosité est faible, en soirée ou au spectacle, lorsque les pupilles sont dilatées. A cause de l’augmentation brutale et intense de la pression dans l’oeil, ce glaucome peut provoquer en quelques heures la perte de la vision, sans traitement.
Autres types existant : le glaucome à pression normale, le glaucome congénital qui survient chez un enfant sur 5.000 et le glaucome secondaire à une maladie inflammatoire de l’oeil ou un traumatisme oculaire par exemple.
Quels sont les premiers signes du glaucome ?
Le glaucome est une maladie fréquente qui doit son diagnostic tardif à l’absence de douleur ou de symptôme au début de son développement. Quand les premiers signes apparaissent il est souvent trop tard.
Si la pression augmente à l’intérieur de l’oeil, elle finit par abîmer le nerf optique, qui part à l’arrière de l’oeil et transmet les images jusqu’au cerveau. La pression normale est habituellement comprise entre 10 et 21 mm de mercure ; au-delà le risque de glaucome est augmenté. Du coup, la vision est altérée, notamment la vision de côté. La vision « au milieu de l’oeil » est conservée, c’est celle qui permet de lire, d’écrire et de reconnaitre les visages. Mais la vision en périphérie du champ visuel est perturbée tout autour, comme si on regardait dans un tunnel.
D’autres signes visuels sont possibles : une fatigue visuelle, une baisse des contrastes, un éblouissement à la lumière vive, une cécité nocturne.
Les fibres nerveuses du nerf optique finissent par dégénérer et à l’heure actuelle, il est impossible de réparer les dommages occasionnés.
Glaucome : facteurs de risque et dépistage
Grâce à des examens d’imagerie performants, le diagnostic du glaucome et son suivi sont aujourd’hui facilités
Faites contrôler régulièrement votre vue après 45 ans, l’âge étant un facteur de risque du glaucome L’hérédité est également en cause, dans une proportion de 20% à 30%. Consultez dès l’âge de 40 ans si un membre de votre famille est atteint d’un glaucome. Idem si vous souffrez de myopie.
Comme l’hygiène de vie joue un rôle essentiel, il est important d’éviter le tabac ou l’excès de café, car ils augmentent la pression dans l’œil. Une alimentation équilibrée et la pratique d’une activité physique sont importantes. En cas de glaucome, suivez le traitement prescrit par votre médecin, même si vous n’avez pas mal.
Des maladies associées augmentent le risque. L’hypertension, les migraines, le diabète ou les mains et les pieds froids traduisent un facteur de risque vasculaire. Il est retrouvé chez 80% à 90% des malades. La myopie est un autre facteur de risque, tout comme l’ethnie (les personnes d’origine africaine, asiatique ou scandinaves ont davantage de risques de souffrir d’un glaucome que les caucasiens).
Les personnes dont la cornée est fine ou celles qui reçoivent des collyres à base de corticoïdes ont également plus de risque. Toutes les personnes qui ont un facteur de risque doivent être particulièrement attentive à un dépistage précoce.
Les examens pour dépister le glaucome
Le glaucome est une affection qui peut être dépistée au cours d’un examen ophtalmologique. Le médecin prend la tension oculaire ou lorsqu’il vérifie l’amplitude des champs visuels. La valeur moyenne de la pression oculaire dans la population est de 15 mm Hg, elle est pathologique au-delà de 21 mais le glaucome peut se développer sans élévation franche de la tension oculaire, le diagnostic reposant alors aussi sur l’évaluation du champs optique et l’atteinte du nerf optique. La pression oculaire varie au cours de la journée, et certains paramètre augmentent la tension, comme la contraction des paupières ou l’épaisseur de la cornée. La mesure n’est donc pas suffisante pour affirmer l’existence d’u glaucome.
L’épaisseur de la cornée est mesurée et la gonioscopie permet d’observer l’angle entre l’iris et la cornée, où se trouve le trabéculum.
L’examen du fond d’oeil et de la papille est essentiel pour évaluer le retentissement au niveau du nerf optique, et pour voir si le traitement a stoppé la destruction des fibres nerveuses. L’OCT ou « tomographie par cohérence optique » permet d’examiner précisément le nerf optique et d’évaluer l’épaisseur de la couche des fibres optiques constituant le nerf, et qui est diminuée en cas de glaucome.
Traitements : évacuer le liquide
Le glaucome entraîne la destruction totale du nerf optique et donc, la cécité, s’il n’est pas traité à temps. Si le glaucome est dépisté suffisamment tôt, on sait retarder son évolution de manière efficace, avec des collyres qui diminuent la quantité de liquide dans l’oeil. La majorité contient des prostaglandines ou un béta-bloquant (un médicament prescrit dans certaines affections cardiaques), ou d’autres substances faisant diminuer la tension oculaire. Il faut les mettre à heure régulière, ces médicaments se prennent à vie. Il est parfois nécessaire de prendre deux types différents de collyre, voire trois.
Un traitement par laser permet, lui, de diminuer la production de liquide ou de faciliter son évacuation. Le laser vise le trabéculum, une sorte de filtre qui permet l’évacuation de l’humeur aqueuse et donc la diminution de la pression oculaire. On parle de « trabéculoplastie » au laser. Cette technique est particulièrement intéressante car elle est peu douloureuse, réalisée sous anesthésie locale et n’entraîne pas de grosses complications.
Le traitement par laser n’est toutefois pas adapté à tous les types de glaucome. Cette technique nécessite en effet que le trabéculum soit accessible, c’est-à-dire que les ophtalmologistes puissent focaliser le faisceau laser sur le trabéculum. Le traitement par laser ne s’adresse donc qu’au glaucome à angle ouvert, il ne peut pas être pratiqué en cas de glaucome par fermeture de l’angle, où le trabéculum n’est pas accessible.
De plus, le traitement par laser n’est pas définitif. Les effets du laser s’estompent avec le temps. Les patients doivent faire contrôler régulièrement leur pression oculaire chez un ophtalmologiste. Ce dernier pourra alors leur proposer au besoin une nouvelle séance.
Alternative faisant appel au laser : l’iridotomie, qui consiste à ouvrir un petit trou à la base de l’iris. Elle est indiquée en cas de glaucome aigu, ou dans le cas précis où le cristallin fait pression sur une partie de l’iris et gène la circulation de l’humeur aqueuse.
Glaucome : la chirurgie, ultime recours
Le Magazine de la Santé
Si le glaucome résiste aux traitements par collyre ou par laser, et si la vue du patient continue à diminuer, une chirurgie peut être envisagée. Cette opération consiste à créer une nouvelle voie d’évacuation du liquide pour maintenir une pression normale dans l’oeil. Cela stoppe la progression du glaucome, mais ne permet malheureusement pas de récupérer les capacités visuelles perdues. La chirurgie se fait au niveau du trabeculum, c’est une trabeculotomie. cela facilitera l’écoulement du liquide.
Ou c’est une « sclérotomie ». le chirurgien « pèle » le filtre par lequel s’écoule le liquide. L’avantage de cette technique est que le chirurgien ne perfore pas une structure de l’oeil et c’est une procédure avec moins de complication. Elle n’est pas toujours réalisable pour des raisons anatomiques.
Glaucome : le traitement par ultrasons
Dans certains cas de glaucome réfractaire, lorsque les traitements par collyres ou laser ont échoué, des ultrasons peuvent être pratiqués.
Le traitement par ultrasons permet de diminuer la sécrétion d’humeur aqueuse à l’intérieur du globe oculaire et de baisser la pression à l’intérieur du globe oculaire. Une fois l’oeil désinfecté, le dispositif délivrant les ultrasons est placé sur le globe oculaire, qui est ensuite baigné dans un liquide conducteur. Pendant moins de deux minutes, la sonde envoie des faisceaux d’ultrasons.
Les ultrasons frappent l’oeil en six endroits différents. Ils ont pour rôle de coaguler une partie des corps ciliaires qui fabriquent l’humeur aqueuse. Sa production est ainsi réduite, la pression oculaire diminue.
L’avantage du traitement par ultrasons est qu’il est non invasif. Le globe oculaire n’est pas ouvert, il n’y a donc pas de risque d’infection. La difficulté pour l’ophtalmologiste est de bien doser la quantité d’ultrasons délivrée comme l’explique le Dr Yves Lachkar, ophtalmologiste : « Si vous diminuez trop la sécrétion d’humeur aqueuse, cela assèche le globe oculaire et cela peut entraîner des tensions trop basses. Et si on ne traite pas suffisamment, la pression intraoculaire ne sera pas suffisamment diminuée« .
Grâce aux ultrasons, la pression oculaire doit diminuer de moitié. Les patients doivent tout de même continuer à mettre du collyre et à être suivis par un ophtalmologiste. L’utilisation des ultrasons reste réservée à certains types de glaucome réfractaire.
Opérer en même temps glaucome et cataracte
Quand les traitements médicamenteux ne suffisent pas à stopper l’évolution du glaucome, une chirurgie peut être envisagée. Dans le même temps opératoire, cela permet aussi de traiter la cataracte.
La chirurgie combinée cataracte-glaucome a lieu sous anesthésie locale. Le chirurgien commence par traiter la cataracte en remplaçant le cristallin par un implant de synthèse. Pour cela, le chirurgien utilise un injecteur pour le comprimer et le positionner correctement.
Le deuxième temps de l’intervention vise à traiter le glaucome. En cas de glaucome, la pression intra-oculaire augmente car le filtre trabéculaire, situé entre la cornée et l’iris, est bouché et empêche l’expulsion de l’humeur aqueuse. La chirurgie avec l’insertion d’un stent permet de rétablir le trajet normal d’extraction de l’humeur aqueuse, de la chambre antérieure vers les canaux d’extraction.
C’est à l’aide d’un injecteur spécial que le stent est positionné très délicatement. Un exercice difficile où il ne faut pas trembler et qui demande de l’entraînement au chirurgien. Le stent perfore le filtre trabéculaire ce qui permet à l’humeur aqueuse de s’écouler de nouveau et de faire baisser la pression intra-oculaire.
En savoir plus
Sur Allodocteurs