Birmanie: l’Alliance de la Fraternité mène de violents combats dans le nord du pays

En Birmanie, au moins soixante-quinze civils ont été tués et plus de 200.000 personnes ont été déplacées à la suite des affrontements lancés le mois dernier contre l’armée birmane par une alliance de groupes ethniques minoritaires. Le secrétaire général de l’ONU se dit « profondément inquiet ». Selon les analystes, il s’agit de la plus grande menace pour l’armée sur le pays depuis qu’elle a renversé un gouvernement civil et pris le contrôle du pays lors d’un coup d’État en 2021.

Cela fait près de trois ans que l’armée birmane est engagée dans une guerre civile sur plusieurs fronts. Elle subit les attaques de groupes armés ethniques dans les zones frontalières ainsi que celles de nouveaux insurgés pro-démocratie dans le centre du pays, qui ont pris les armes après le coup d’État.

L’armée a tenté d’étouffer la résistance par des tactiques brutales qui, selon les groupes de défense des droits de l’homme, constituent probablement des crimes de guerre.

Mais depuis le 27 octobre, la junte est malmenée. Une alliance de trois organisations armées ethniques qui s’étaient largement tenues à l’écart du conflit a lancé une offensive soudaine et coordonnée dans le stratégique État Shan, au nord du pays, qui borde la Chine, le Laos et la Thaïlande. Aujourd’hui, l’alliance grignote du terrain, car des combats ont aussi lieu à l’ouest du pays.

The Brotherhood Alliance, l’Alliance de la Fraternité
Il s’agit d’une union formée par l’Armée de l’Arakan (AA) dans l’Ouest, l’Armée de libération nationale Taaung (TNLA) et l’Alliance démocratique nationale du Myanmar (MNDAA) toutes deux dans le Nord. Leur union s’appelle en anglais The Brotherhood Alliance, l’Alliance de la Fraternité.

Depuis leur offensive, des centaines de bases militaires ont été envahies et des quantités considérables d’armes et de munitions ont été saisies.

Selon Myanmar Witness – une ONG des droits de l’homme qui vérifie les informations sur la guerre civile – les enquêteurs ont commencé à recueillir une quantité substantielle de preuves visuelles de l’offensive, qui, selon l’ONG, représentent un changement significatif dans la dynamique observée jusqu’à présent.

Et d’ailleurs, ces derniers jours, pour la première fois, la junte a reconnu certaines défaites : elle a admis avoir concédé le contrôle d’au moins trois localités dans l’État Shan, au nord du pays.

Quels sont les objectifs de cette alliance ?
Il y a bien sûr une volonté de s’ériger contre la junte – d’ailleurs, dans un communiqué, diffusé en birman et en anglais, l’alliance a promis « d’éradiquer la dictature militaire oppressive, tout en protégeant les civils. » Leur objectif premier, en lançant cette opération, est multiple et motivé par le désir collectif de protéger la vie des civils, et d’affirmer leur droit à l’autodéfense, de maintenir le contrôle de leur territoire et de répondre résolument aux attaques d’artillerie et aux frappes aériennes en cours.

Mais ils ont également déclaré vouloir lutter contre la fraude généralisée aux jeux d’argent en ligne qui sévit dans le pays.

Lors de la pandémie de Covid-19, il y a eu une explosion de la criminalité, notamment via des centres d’arnaques en ligne. Des centres qui ciblent principalement… les Chinois. Pékin a demandé à plusieurs reprises à l’armée de sévir contre les centres d’escroquerie.

Cette nouvelle forme de criminalité, comme l’écrit notre confrère du Monde, s’est répandue le long des Nouvelles routes de la soie en Asie du Sud-Est et ternit le projet phare du président chinois, Xi Jinping. Son éradication est donc une nouvelle priorité de Pékin.

Cette semaine, l’un des groupes de l’alliance a annoncé avoir encerclé une ville birmane contrôlée par des milices pro-junte près de la frontière chinoise, où des centaines d’étrangers seraient contraints de travailler dans des sites d’escroquerie en ligne pour arnaquer leurs compatriotes.

rfi

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