Un nouvel échange d’otages du Hamas contre des prisonniers palestiniens est prévu dimanche au troisième jour de la trêve entre Israël et le mouvement islamiste au pouvoir dans la bande de Gaza, assiégée et dévastée après sept semaines de guerre.
L’Egypte a annoncé avoir reçu des listes de 13 otages israéliens qui doivent être échangés dimanche contre 39 prisonniers palestiniens, soit le même nombre que les personnes libérées les deux jours précédents aux termes de l’accord de trêve.
Le Hamas a dit par ailleurs avoir libéré un otage russe « en réponse aux efforts » du président russe Vladimir Poutine et à son « soutien à la cause palestinienne ».
Dans le même temps, de longs convois d’aide internationale ont continué à entrer dimanche, depuis l’Egypte, dans la bande de Gaza, pilonnée sans répit jusqu’à vendredi par l’armée israélienne en représailles à l’attaque sanglante lancée par le Hamas contre Israël le 7 octobre.
Malgré la trêve, qui offre un premier répit à la population de Gaza, la situation humanitaire dans le territoire est « dangereuse » et les besoins « sans précédent », a affirmé dimanche l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa).
Signe de la fragilité de la trêve, les libérations de samedi ont été retardées de plusieurs heures, le Hamas accusant Israël de ne pas respecter les termes de l’accord conclu mercredi sous l’égide du Qatar, avec l’appui des Etats-Unis et de l’Egypte.
« Guerre psychologique »
Le porte-parole de l’armée israélienne Doron Spielman avait de son côté évoqué une « tactique dilatoire » du mouvement islamiste dans le cadre d’une « guerre psychologique ».
Au total, le Hamas a remis vendredi et samedi au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) 26 otages israéliens, ainsi que 15 étrangers non concernés par l’accord de trêve, détenus à Gaza, pendant qu’Israël a libéré 78 prisonniers palestiniens.
L’accord prévoit l’échange de 50 otages du Hamas contre 150 prisonniers palestiniens durant les quatre jours de cette trêve, qui peut être prolongée.
Au-delà des quatre premiers jours, la libération de « dix otages supplémentaires conduira à une journée supplémentaire de pause », a affirmé le gouvernement israélien.
Samedi soir, 13 Israéliens et quatre Thaïlandais avaient finalement regagné Israël via l’Egypte.
Parmi eux figurait Maya Regev, 21 ans, enlevée avec son frère de 18 ans en tentant de fuir le festival de musique Tribe of Nova attaqué par les combattants du Hamas le 7 octobre à l’aube. Une vidéo publiée sur les réseaux sociaux avait montré la jeune femme et son frère ligotés à l’arrière d’un pick-up.
« Je suis très heureuse que Maya soit sur le point de nous rejoindre. Néanmoins, j’ai le cœur brisé parce que mon fils Itay est toujours prisonnier du Hamas à Gaza », a déclaré sa mère Mirit, citée par le Forum des familles d’otages.
Au total, 364 personnes avaient été tuées par le Hamas lors de l’attaque de Tribe of Nova, devenu un des symboles du massacre du 7 octobre qui a traumatisé Israël.
« Sortez-les de l’enfer »
Une Israélo-Irlandaise de 9 ans, Emily, enlevée avec une amie et la mère de celle-ci dans le kibboutz Beeri, a également été libérée samedi, après avoir passé le jour de son anniversaire en captivité le 17 novembre.
A Tel-Aviv, des dizaines de milliers de manifestants se sont rassemblés samedi soir sur la Place des otages. « Sortez-les de l’enfer », pouvait-on lire sur une banderole.
L’armée a estimé à 240 le nombre total d’otages enlevés par le Hamas le 7 octobre. Selon les autorités israéliennes, 1.200 personnes, en grande majorité des civils, ont été tuées lors de l’attaque.
En représailles, Israël a promis d' »éliminer » le Hamas, classé organisation terroriste par les Etats-Unis, l’Union européenne et Israël, bombardant sans relâche le territoire palestinien et lançant le 27 octobre une offensive terrestre, jusqu’à la trêve.
Dans la bande de Gaza, 14.854 personnes, dont 6.150 âgées de moins de 18 ans, ont été tuées par les frappes israéliennes, selon le gouvernement du Hamas.
Tard samedi, Israël a annoncé avoir libéré un second groupe de 39 prisonniers palestiniens, tous des femmes et des jeunes de moins de 19 ans, comme la veille.
Au total, 6.600 Palestiniens sont incarcérés dans des prisons israéliennes, selon le Club des prisonniers, une ONG palestinienne de défense des détenus.
En Cisjordanie occupée, des convois de voitures où flottaient des drapeaux des différents mouvements palestiniens, Hamas en tête, ont défilé dans les rues, escortant un bus du CICR qui transportait les détenus libérés.
A Jérusalem-Est, occupée et annexée par Israël, les célébrations ont été plus discrètes.
Israa Jaabis, 39 ans, la prisonnière la plus connue de la liste, avait été condamnée à 11 ans de prison pour avoir fait exploser une bonbonne de gaz qu’elle transportait dans le coffre de sa voiture à un barrage en 2015, blessant un policier.
Sa photo dans un tribunal israélien, levant ses doigts atrophiés, le visage en partie brûlé, est régulièrement brandie pour illustrer les souffrances des prisonniers palestiniens. « J’ai honte de parler de réjouissance alors que toute la Palestine est blessée », a-t-elle affirmé.
Le chef d’état-major de l’armée israélienne, le général Herzi Halevi, a prévenu que ses soldats « recommenceront à attaquer Gaza dès que la trêve sera terminée ».
Le Hamas a de son côté annoncé la mort à une date non précisée, pendant l’offensive israélienne, de cinq chefs du mouvement, dont le commandant militaire de la Brigade du nord de Gaza, Ahmed al-Ghandour, considéré comme un « terroriste » par les Etats-Unis depuis 2017.
« Nous jurons devant Dieu que nous poursuivrons leur chemin », ont affirmé les brigades Ezzedine al-Qassam, la branche armée du Hamas.
« 200 camions par jour »
L’accord de trêve inclut aussi l’entrée d’aide humanitaire et de carburant à Gaza, où Israël a imposé un siège total depuis le 9 octobre. Ces cargaisons, dont l’entrée depuis l’Egypte est soumise au feu vert israélien, arrivaient ces dernières semaines au compte-gouttes.
Samedi, 248 camions chargés d’aide ont pu entrer dans la bande de Gaza, selon l’ONU.
Dimanche, une partie des cargaisons devait comme la veille être acheminée vers le nord et la ville de Gaza, où « il n’y a ni eau potable, ni nourriture », a déclaré à l’AFP un porte-parole de l’Unrwa à Gaza, Adnan Abu Hasna.
« Nous devrions envoyer 200 camions par jour pendant au moins deux mois pour répondre aux besoins », a-t-il ajouté.
L’armée israélienne considère le tiers nord de la bande de Gaza comme une zone de combats abritant le centre des infrastructures du Hamas. Elle a ordonné à la population de partir et interdit à quiconque d’y revenir.
Malgré cet avertissement, des milliers d’habitants de Gaza déplacés ont profité de la trêve pour tenter de rentrer chez eux dans le nord.
Dans la ville de Gaza transformée en champ de ruines, des habitants, certains trainant de maigres baluchons, parcouraient dans la poussière, entre les amas de gravats, les rues bordées d’immeubles dévastés, selon des images de l’AFP.
D’autres, depuis le nord, ont pris le chemin du sud, où sont déjà massés des centaines de milliers de déplacés.
Les hôpitaux débordés du sud de la bande de Gaza ont continué pendant ce temps à recevoir de nombreux blessés évacués du nord, où la quasi-totalité des établissements de santé sont à l’arrêt.
Plus de la moitié des logements du territoire ont été endommagés ou détruits, selon l’ONU, et 1,7 million de personnes ont été déplacées, sur 2,4 millions d’habitants.
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