Les maladies cardiovasculaires sont en augmentation partout dans le monde, avec une prévalence de l’obésité et du syndrome dit de la bedaine. S’il est établi qu’un régime alimentaire riche en graisses favorise l’athérosclérose, la mécanique sous-jacente n’est pas complètement explorée.
Les scientifiques ont approfondi l’influence délétère d’un microbiote intestinal déséquilibré précisément sur les artères et plus généralement sur les maladies cardiovasculaires.
Si un régime alimentaire riche en graisses et pauvre en fibres est reconnu comme favorisant les maladies cardiovasculaires comme l’athérosclérose, les mécanismes impliqués ne sont pas encore bien identifiés. Des chercheuses et chercheurs de l’Inserm et d’Université Paris Cité se sont intéressés au rôle du microbiote intestinal dans le développement de l’athérosclérose.
Ces résultats publiés dans Cell Reports fournissent une preuve supplémentaire de l’importance du rôle des fibres dans l’alimentation, à la fois pour le bon fonctionnement de l’intestin et pour prévenir l’apparition des maladies cardiovasculaires.
Les maladies cardiovasculaires constituent une des premières causes de mortalité dans le monde. Parmi ces maladies, l’athérosclérose se caractérise par le dépôt d’une plaque dite d’« athérome », essentiellement composée de lipides, sur la paroi des artères.
À terme, ces plaques peuvent entraîner la lésion de la paroi artérielle, obstruer le vaisseau ou se rompre, avec des conséquences souvent graves. Parmi les facteurs de risque majeurs de l’athérosclérose : l’obésité, en particulier celle qui est induite par un régime alimentaire trop riche en graisses et pauvre en fibres.
Ainsi, l’alimentation mais également son impact sur le microbiote intestinal sont aujourd’hui des pistes d’intérêt pour la recherche sur les maladies cardiovasculaires.
L’influence d’un régime gras et pauvre en fibres sur le microbiote intestinal
Une équipe menée par Soraya Taleb, directrice de recherche Inserm au sein du Paris Centre de recherche cardiovasculaire (Inserm/Université Paris Cité), s’est intéressée chez la souris à l’influence d’un régime gras et pauvre en fibres sur le microbiote intestinal et à la façon dont il pourrait par ce biais contribuer au développement de l’athérosclérose.
Les chercheuses et chercheurs ont utilisé un modèle de souris permettant d’étudier l’athérosclérose induite par l’alimentation pour comparer les effets de plusieurs régimes alimentaires sur le métabolisme, le microbiote et le développement de l’athérosclérose.
Sans surprise, chez les souris soumises à un régime riche en graisses et pauvre en fibres, leurs résultats montrent une augmentation des facteurs de risque métaboliques liés aux maladies cardiovasculaires (prise de poids importante, hyperglycémie, résistance à l’insuline, augmentation du poids du foie et de son contenu en triglycérides…).
Mais ce ne sont pas les seuls effets observés de ce régime qui apparaît également associé à un déséquilibre global du microbiote – dans sa composition et dans sa réponse immunitaire -, se traduisant notamment par une altération de la production de dérivés métaboliques par les bactéries qui le composent. En particulier, les acides gras à chaîne courte, issus de la fermentation des fibres et reconnus pour leur impact positif sur la santé, sont produits en plus faibles quantités.
Une faible quantité de fibres à l’origine du déséquilibre du microbiote ?
Or, ce déséquilibre apparaît lui-même associé non seulement aux facteurs de risque métaboliques mais également à une aggravation des manifestations de l’athérosclérose au niveau vasculaire, avec un accroissement de la taille des plaques d’athérome dans l’aorte ainsi qu’un phénomène inflammatoire systémique qui se traduit par l’augmentation du nombre de cellules immunitaires dans ces plaques.
Cependant, une supplémentation en fibres permettait de contrer ces effets.
Mais comment expliquer le lien surprenant qui apparaît entre la composition du microbiote et l’accumulation de cellules immunitaires dans les plaques d’athérome ?
Chez des souris greffées avec un microbiote intestinal initialement modulé par un régime gras, l’équipe de recherche a observé une prolifération accrue de cellules immunitaires au niveau des ganglions mésentériques (ces derniers sont situés dans le mésentère, un repli du péritoine, la membrane recouvrant la cavité abdominale et les viscères qui relie l’intestin grêle à la paroi postérieure de l’abdomen), siège de leur activation dans le tractus gastro-intestinal.
Migration des cellules immunitaires et altération de la barrière abdominale
Des techniques de traçage permettant de suivre la migration des cellules immunitaires ont permis de confirmer que c’étaient bien les cellules issues des ganglions mésentériques qui, après être passées de l’intestin dans la circulation sanguine, s’accumulaient dans les plaques d’athérome et contribuaient ainsi au développement de l’athérosclérose.
« Le fait qu’on ait pu observer que les cellules immunitaires sont capables de migrer de l’intestin vers la périphérie et de générer ainsi une inflammation systémique aggravant les plaques d’athérome ajoute une nouvelle dimension à notre compréhension du lien entre alimentation, intestin, microbiote et athérosclérose, précise Soraya Taleb.
Des travaux complémentaires devront être menés pour identifier quelles bactéries du microbiote sont impliquées dans ce mécanisme, afin de pouvoir envisager des approches thérapeutiques ciblées et d’étudier ces mécanismes chez l’humain », conclut la chercheuse.
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