Plus de 60 morts dans un naufrage au large de la Libye

Soixante-et-un migrants sont portés disparus et présumés morts après le naufrage de leur embarcation au large des côtes libyennes, a annoncé samedi l’Organisation internationale des migrations (OIM). Selon la plateforme Alarm Phone, l’Italie et la Libye sont responsables de ce drame : les deux pays ont refusé d’intervenir malgré les alertes de détresse, alors qu’une tempête touchait la Méditerranée centrale.

Un canot avec 86 personnes à bord a chaviré au large des côtes libyennes, a annoncé samedi 16 décembre l’Organisation internationale des migrations (OIM). De hautes vagues ont submergé l’embarcation, après son départ de Zouara, au nord-ouest de la Libye, provoquant le drame.

Soixante-et-un migrants ont péri noyés et sont toujours portés disparus, a précisé l’agence onusienne, tandis que 25 personnes ont été sorties de l’eau.

La plupart des victimes, dont des femmes et des enfants, étaient originaires du Nigeria, de Gambie et d’autres pays africains, a ajouté l’OIM.

Les circonstances de ce nouveau drame sont encore floues mais selon la plateforme d’aide aux exilés en mer, Alarm Phone, les secours ont tardé à venir. Retour sur les évènements.

« Nous perdons la vie ici »
Dès jeudi 14 décembre en fin d’après-midi, le collectif reçoit plusieurs appels de détresse venant d’un groupe parti de Zouara sur un canot pneumatique blanc. « La situation à bord de ce bateau surpeuplé était extrêmement dangereuse, en raison notamment de la mer agitée », écrit Alarm Phone dans son compte rendu.

Les militants contactent alors vers 18h les autorités compétentes en Méditerranée centrale – l’Italie, Malte et la Libye – et leur transmettent les coordonnées GPS de l’embarcation en difficulté.

Les garde-côtes libyens assurent qu’un bateau de recherche va être envoyé dans la zone. Près de trois heures plus tard, les autorités libyennes déclarent finalement à Alarm Phone qu’elles n’enverront « aucun moyen de sauvetage, en raison des hautes vagues ». Or selon la plateforme, des patrouilles libyennes étaient en mer dans l’après-midi pour intercepter trois embarcations de migrants.

« Nous perdons la vie ici », implorent pourtant les migrants au collectif. « Les gens crient et paniquent (…) De l’eau entre dans le bateau », insiste Alarm Phone.

« Des vagues de 2,5 mètres »
L’agence européenne de surveillance des frontières, Frontex, a survolé dans la soirée la zone où l’accident s’est produit. « Notre avion a identifié une embarcation partiellement dégonflée. La plupart des gens étaient dans l’eau. Ils se trouvaient en grand danger en raison des conditions météorologiques défavorables, avec des vagues atteignant une hauteur de 2,5 mètres », affirme l’organisation dans un communiqué, cité par la presse italienne.

Frontex dit avoir alerté immédiatement le MRCC (centre de coordination des secours) italien, maltais, tunisien et libyen. Elle lance également un appel de secours à tous les navires présents à proximité.

Aucun pays ne viendra sur les lieux du naufrage. Le navire commercial Vos Triton intervient finalement dans la nuit de jeudi à vendredi pour porter secours aux 25 rescapés, sur ordre de l’Italie. Le bateau, sous pavillon de Gibraltar, ramène les exilés en Libye, malgré les risques pour leur vie dans ce pays. Les survivants ont été transférés dans un centre de détention libyen, connu pour être des lieux de tortures, de violences, d’extorsion ou encore de travail forcé.

L’Ocean Viking éloigné de la zone du naufrage par Rome
Les ONG de sauvetage en mer ne décolèrent pas. L’Ocean Viking, de SOS Méditerranée, se trouvait près du lieu du naufrage seulement 24 heures avant. Mais le navire humanitaire, qui a porté assistance à 26 personnes le 13 décembre, a été forcé de quitter la zone de recherche et de sauvetage (SAR zone) par les autorités italiennes. Rome lui avait attribué le port de Livourne (nord-ouest de l’Italie), distant d’un millier de kilomètres, pour y débarquer les migrants.

En vertu du décret Piantedosi signé fin 2022, les navires humanitaires ne peuvent plus sillonner la Méditerranée après un premier sauvetage. Ils doivent immédiatement rejoindre le port donné par l’Italie, sous peine d’une immobilisation et d’une amende.

SOS Méditerranée avait pourtant averti sur X (ex-Twitter) le 15 décembre que son absence en mer pourrait avoir de lourdes conséquences, alors qu’une « tempête de force 8 est prévue ce week-end ». Huit jours de trajet aller / retour sont nécessaires pour atteindre Livourne et rejoindre à nouveau la SAR zone. Une période pendant laquelle « notre navire est entravé dans sa mission de recherche et de sauvetage alors que d’autres embarcations sont en détresse en Méditerranée centrale », avait signalé l’ONG.

« L’affectation d’un port éloigné (…) n’a pas seulement un impact sur les rescapé.e.s, mais peut également entraîner davantage de décès en mer ».

Depuis le début de l’année, plus de 2 200 personnes ont péri noyées en Méditerranée centrale, selon les chiffres de l’OIM, contre environ 1 400 en 2022.

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