Le médecin Claude Griscelli a été radié par l’Ordre des médecins, pour avoir dans l’affaire du Médiator influencé la sénatrice chargée d’un rapport d’information en 2011, sans l’informer qu’il travaillait pour le laboratoire mis en cause, a-t-on appris auprès de l’Ordre des médecins.
Ce professeur de pédiatrie, âgé aujourd’hui de 87 ans, a manqué à ses obligations « de moralité et de probité », estime la Chambre disciplinaire d’Ile-de-France de l’Ordre des médecins dans une décision rendue fin décembre et consultée mercredi par l’AFP.
Le groupe pharmaceutique Servier, qui commercialisait le Mediator, médicament antidiabétique utilisé comme coupe-faim et tenu pour responsable de centaines de décès, a été lourdement condamné en décembre 2023 par la cour d’appel de Paris: il devra payer une amende totale de 9,173 millions d’euros et rembourser plus de 415 millions d’euros aux organismes de sécurité sociale et mutuelles.
Dans cette affaire, Claude Griscelli a été jugé pour « trafic d’influence », soupçonné d’avoir influencé la sénatrice Marie-Thérèse Hermange, en 2011, pour qu’elle modifie la rédaction d’un rapport dans lequel la responsabilité des laboratoires Servier était évoquée.
Il a finalement été relaxé. Mais pour l’Ordre des médecins, cela « ne fait pas obstacle » à une sanction disciplinaire.
Claude Griscelli « était lié depuis 2001 aux laboratoires Servier par contrats de consultant », qui portaient « une rémunération annuelle de l’ordre de 90.000 euros », rappelle la Chambre disciplinaire.
D’après l’information judiciaire, Claude Griscelli a eu « des échanges téléphoniques ou par SMS tout au long des travaux de la mission sénatoriale avec Mme Hermange », qu’il a rencontrée « la veille » du rendu du rapport, jour où elle a introduit « des modifications, notamment sur « l’évaluation du nombre de morts », ajoute-t-elle.
Il n’a pas informé Mme Hermange qu’il travaillait pour les laboratoires Servier, déplore la Chambre disciplinaire.
« L’omission de cette information dans un tel contexte est constitutive d’une grave méconnaissance des principes de moralité et de probité qui s’imposent au médecin » et « déconsidère l’ensemble de la profession », relève-t-elle.
Cette radiation « représente une opportunité de rappeler à tous les professionnels de santé », médecins et laboratoires pharmaceutiques, « qu’il n’est pas possible de passer sous silence ses liens d’intérêts et d’user de son influence dans l’intérêt des industriels contre l’intérêt supérieur de la santé publique et des patients », écrit Me Charles Joseph-Oudin, avocat du collectif des victimes du Médiator, dans une réaction transmise à l’AFP.
AFP