L’opposition aux Comores a dénoncé, dimanche 14 janvier, « une fraude électorale » et des « bourrages d’urnes » lors du scrutin présidentiel qui se clôt dans la soirée. Le président sortant, Azali Assoumani, s’est dit « confiant » de l’emporter dès le premier tour.
Comme en 2019, nous assistons à une fraude électorale d’Azali Assoumani en complicité avec l’armée », a fustigé, lors d’une conférence de presse, le candidat de l’opposition, Mouigni Baraka Saïd Soilihi, au nom des cinq rivaux d’Azali Assoumani au scrutin. « Il y a eu bourrages d’urnes » dans plusieurs localités, a-t-il poursuivi. « Les Comoriens n’ont pas eu le choix de décider du président qui allait présider à leur destinée. »
Lors de la précédente élection présidentielle en 2019, Azali Assoumani, qui brigue un troisième mandat consécutif, a été réélu avec 60% des voix au premier tour. Mais les résultats ont alors été contestés.
Vote retardé, matériel électoral manquant dans des fiefs traditionnels de l’opposition, assesseurs empêchés d’observer la régularité du scrutin : les opposants ont constaté des irrégularités dès l’ouverture au compte-gouttes des bureaux de vote. « Les bureaux ont commencé généralement avec du retard », a souligné une observatrice de l’Union africaine sur place.
« L’opposition fait montre de petit esprit complotiste », a avancé, devant la presse, le directeur de campagne du président sortant, Houmed Msaidie. Ce dernier a réfuté toute fraude électorale.
Pas de foule d’électeurs enthousiastes
Quelques heures plus tôt, après avoir déposé son bulletin dans sa ville natale de Mitsudje, près de la capitale Moroni, Azali Assoumani, 65 ans, a exprimé sa « confiance » en une victoire.
« La confiance est toujours là, mais c’est Dieu qui va décider et le peuple comorien. C’est les prières qu’on fait tous les jours, pour qu’on gagne au premier tour. On gagne du temps, on gagne de l’argent », a-t-il déclaré. Il a attribué le manque de participation au « mauvais temps » dans l’archipel de l’océan Indien.
En début de journée devant les bureaux de vote de Moroni, sous une pluie battante, ni files d’attente, ni foule d’électeurs enthousiastes n’attendaient de pouvoir voter.
Cette semaine, l’opposition a déjà dénoncé des irrégularités dans l’organisation du scrutin, notamment la publication des listes électorales et la composition des membres des bureaux de vote.
Quelque 340.000 électeurs ont dû choisir entre six candidats. Gendarmes, police et armée sont déployés.
Arrivé une première fois par un coup d’Etat en 1999 à la tête du pays qu’il dirige d’une main de fer, le colonel Azali est revenu au pouvoir en 2016. Pendant sa campagne, il a vanté la construction de routes et d’hôpitaux. « Azali, architecte des Comores de demain », assurent des affiches placardées dans les rues de ce micro-Etat, qui élit aussi ses gouverneurs.
Mais dans l’archipel où 45% de la population vit sous le seuil de pauvreté et où le quotidien est affligé de coupures d’eau, d’électricité, ainsi que d’une hausse dramatique des prix de l’alimentation, le bilan du président sortant est souvent critiqué.
Pendant la campagne, l’équipe présidentielle a été rudement chassée de plusieurs localités.
S’il était réélu, Azali, qui a jeté en prison et poussé à l’exil nombre de ses opposants, resterait au pouvoir jusqu’en 2029. En 2018, il a fait passer une réforme constitutionnelle permettant une centralisation des pouvoirs par l’exécutif. L’opposition accuse les institutions de collusion avec le pouvoir.
De nombreux Comoriens vivent à l’étranger et notamment en France, où la diaspora est estimée à environ 300.000 personnes. La justice comorienne a rejeté l’an dernier un recours réclamant que le droit de vote de la diaspora soit garanti.
Les résultats du premier tour doivent être publiés dans la semaine du 15 janvier.
(Re)voir : Comores : présidentielle, la diaspora ne pourra pas voter
TV5 monde