« J’ai moi-même détruit ma cabane » : début du démantèlement du camp de Cavani à Mayotte

Jeudi matin, le démantèlement d’un camp de migrant installé dans le stade de Cavani, à Mayotte, où survivaient près de 350 personnes, a commencé. L’évacuation totale du bidonville devrait prendre plusieurs mois, selon la préfecture. L’occupation de ce stade par des Africains – qu’ils soient en situation régulière ou non – cristallisait depuis des mois les tensions dans l’archipel français.

Conformément à la promesse du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, le démantèlement d’un camp de migrants dans le stade de Cavani, à Mayotte, a débuté jeudi 25 janvier. Contactée, la préfecture n’a pas répondu.

« J’ai été l’un des premiers à être évacué ce matin », explique Thomas*, un Congolais qui vit depuis 4 mois dans le stade.

« J’ai détruit moi-même ma cabane et j’ai pu être relogé dans les heures qui ont suivi. Je suis actuellement dans un appartement. Je suis content et rassuré d’être là », explique ce réfugié statutaire d’une quarantaine d’années. « J’avais très peur dans le stade, je ne dormais plus depuis des jours.

Les gens [des Mahorais hostiles à la présence de migrants sur l’île, ndlr] brûlaient nos tentes, nous insultaient, nous frappaient. Je suis mieux à l’abri, malgré les appels à nous expulser… Je suis mieux ici ».

Plusieurs mois avant une évacuation totale
Ils étaient quelque 350 personnes à survivre dans le campement et dans les rues avoisinantes dont de nombreux femmes et enfants. La grande majorité sont originaires de la République démocratique du Congo (RDC) comme Thomas, mais aussi de la région des Grands lacs et de la Corne de l’Afrique.

Ils se sont installés depuis des mois dans le stade et aux alentours, dans des cases faites de planches de bois et recouvertes de bâches.

Dès 7h du matin, des pelleteuses sont entrées dans le camp pour détruire les abris.

« Le démantèlement devrait prendre du temps », explique la présidente de Solidarité Mayotte, Charline Ferrand Pinet. Plusieurs mois, selon la préfecture. « Environ 20% du camp a été démantelé ce [jeudi] matin. Le reste se fera au fur et à mesure ». Tout le monde sera-t-il relogé ? « J’en doute », a-t-elle confessé rappelant que le réseau d’accueil est saturé. « Il n’y a pas assez de places pour tout le monde sur l’île ».

L’association mandatée par l’État pour loger ces personnes, ne dispose que de 400 places, en appartement.

Trop peu pour héberger l’ensemble des demandeurs d’asile présent dans ce 101e département français.

De son côté, Gérald Darmanin qui avait annoncé le démantèlement du site le 17 janvier, a précisé qu’une quarantaine de personnes « reconnues pour être des réfugiés, qui ont l’asile », seraient rapatriées dans l’Hexagone.

Une nouvelle vague d’arrivées les 13 et 14 janvier avait provoqué des affrontements entre des demandeurs d’asiles et des habitants qui tentaient de les empêcher d’accéder au stade, nécessitant l’intervention des forces de l’ordre.

Blocages routiers
Parallèlement, des collectifs de citoyens avaient bloqué des mairies et des administrations pour protester contre l’arrivée massive de migrants dans le département français d’environ 310 000 habitants situé dans l’océan Indien. Depuis lundi, l’île est paralysée par des blocages routiers.

Les premiers réfugiés – originaires du Congo, du Rwanda, du Burundi ou de Somalie – sont arrivés « début 2022 », précise Gilles Foucaud, le directeur adjoint de l’association Solidarité Mayotte.

Mais depuis fin novembre, alors que leur nombre grimpait, le Collectif des citoyens de Mayotte 2018, qui lutte principalement contre l’immigration – décrié par certaines associations humanitaires pour des positions jugées xénophobes -, a fait de l’évacuation du lieu son cheval de bataille.

En 2023, plus de 2 000 migrants africains ont été conduits à Mayotte par des réseaux de passeurs, indique la préfecture, qui a justifié cette évacuation par « plusieurs épisodes de violences opposant des délinquants et les occupants du camp ».

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