L’Assemblée nationale a largement rejeté lundi la première motion de censure déposée contre le nouveau Premier ministre Gabriel Attal qui doit s’envoler pour Berlin dans la journée. C’est dans ce contexte que les noms de 15 ministres délégués et secrétaires d’Etat devraient être dévoilés ce même jour.
C’était un baptême du feu pour Gabriel Attal. La motion de censure déposée mardi dernier, juste avant la déclaration de politique générale prononcée par le Premier ministre, a largement été rejeté ce lundi. Cette dernière, portée par insoumis, socialistes, écologistes et communistes n’a recueilli que 124 voix.
En l’absence du soutien des députés LR et RN, elle échoue donc loin des 289 voix nécessaires pour faire tomber le gouvernement.
Défendue ce matin depuis 10 heures par le coordinateur de LFI Manuel Bompard, elle n’avait toutefois quasiment aucune chance de recueillir les 289 voix nécessaires pour faire tomber le gouvernement. Marine Le Pen, cheffe des députés RN, avait d’ailleurs laissé entendre que ses troupes ne voteraient pas la motion, annoncée par la gauche « avant même le discours » de Gabriel Attal. « Cela décrédibilise ceux qui l’ont déposée », juge-t-elle.
Les Républicains comptaient aussi voter contre la motion.
« On est dans l’opposition, on n’avait aucune vocation à voter la confiance. Mais voter la censure avant que le gouvernement ait démarré ne nous paraîtrait pas non plus très sérieux », avait relevé dimanche sur Radio J Olivier Marleix, chef de file des députés LR.
Mais de son côté, la gauche, comme elle l’avait fait contre Elisabeth Borne, reprochait au Premier ministre de ne pas avoir sollicité de vote de confiance de l’Assemblée nationale après son discours. Et elle accusait Gabriel Attal de vouloir faire « la guerre aux pauvres », avec ses annonces sur la suppression de l’allocation de solidarité spécifique, remplacée par le RSA, pour les chômeurs en fin de droits ou la promesse d’assouplissement de la loi SRU sur les logements sociaux.
L’épine Amélie Oudéa-Castéra
Les critiques visaient également la ministre de l’Education national et des Sports. La cheffe des députés LFI Mathilde Panot a, en effet, mené la charge contre Amélie Oudéa-Castéra dans la tourmente depuis ses propos sur ses enfants scolarisés dans le privé, à Stanislas, dans le VIe arrondissement de Paris. C’est un « symbole de l’ensemble de votre gouvernement », « oligarchie, par ici ; haute bourgeoisie par-là ».
Au-delà des charges de l’opposition, le maintien d’Amélie Oudéa-Castéra à son poste interroge au sommet de l’Etat.
La ministre « a la confiance » d’Emmanuel Macron et de Gabriel Attal, a assuré dimanche la ministre chargée des Relations avec le Parlement, Marie Lebec. « Il est impensable qu’il y ait un ministre délégué à l’Education, ça voudrait vraiment dire qu’elle reste pour rester » et si on lui adjoint un ministre des Sports « ça signifie que ce qu’elle aime et ce qu’elle sait le mieux faire ne sera pas traité directement par elle », souligne un ancien ministre. « Elle vit un enfer ».
Un maximum de 15 ministres délégués et secrétaires d’Etat vont être nommés
Outre l’Éducation, l’incertitude doit également être levée sur le reste des membres du gouvernement. Le remaniement est, en effet, attendu aujourd’hui ou demain et vise à suppléer les ministres qui ont des portefeuilles très larges comme Catherine Vautrin (Travail, Santé et Solidarités), ou Christophe Béchu (Transition écologique et Cohésion des territoires), qui a aussi sous sa coupe le Logement et les Transports.
L’exécutif prépare ainsi la nomination d’au maximum 15 ministres délégués et secrétaires d’Etat qui compléteront les 14 ministres déjà en exercice, conduits par Gabriel Attal. Catherine Vautrin a confirmé dans L’Union samedi qu’elle aurait des ministres délégués sans plus de précisions.
À Bercy, les quatre sortants Roland Lescure (Industrie), Jean-Noël Barrot (Numérique), Olivia Grégoire (PME), et Thomas Cazenave (Budget), sont confiants dans leur maintien, selon des sources ministérielles, alors que leur ministre de tutelle Bruno Le Maire plaide pour « la stabilité ».
Attal à Berlin pour renforcer « la relation franco-allemande »
Gabriel Attal se rend ce lundi à Berlin, où il rencontrera et dînera avec le chancelier allemand Olaf Scholz. Cette visite, la première à l’étranger pour le chef du gouvernement nommé le 9 janvier, « vise à nourrir et renforcer la relation franco-allemande » souligne-t-on à Matignon.
Après un discours devant la communauté française à l’ambassade de France, Gabriel Attal sera reçu avec les honneurs militaires à 18H00 à la chancellerie allemande, où il aura un entretien en tête-à-tête avec Olaf Scholz.
Hydrogène décarboné, élargissement de l’Union européenne, crise agricole, montée de l’extrême droite et élections européennes figureront notamment au menu de la rencontre, selon la partie française. Les deux responsables tiendront ensuite une conférence de presse commune, puis dîneront avec leurs délégations à la chancellerie.
La guerre en Ukraine a mis à nu plusieurs divergences de fond sur l’alliance historique des deux pays, motrice de la construction européenne, de l’énergie aux programmes de coopération industrielle sur l’avion de combat et le char du futur.
Sur l’aide militaire à l’Ukraine, Olaf Scholz plaide pour son accroissement, visant sans la citer la France, première puissance militaire de l’UE. Et, malgré la fronde des agriculteurs, l’Allemagne reste favorable au projet d’accord commercial controversé entre l’Union européenne et les pays latino-américains du Mercosur, auquel s’oppose la France.
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