La mort de Samuel Paty puis celle de Dominique Bernard ont poussé le Sénat à enquêter. La commission s’inquiète pour laïcité à l’école.
Un constat sans appel. Un rapport sénatorial issu d’une commission d’enquête a pointé ce mercredi 6 mars la « terrible solitude » des enseignants face aux menaces et agressions, exhortant l’État à enclencher une « démarche proactive » et l’Éducation nationale à « reprendre la main » pour défendre la laïcité à l’école.
Le rapport des sénateurs François-Noël Buffet (LR) et Laurent Lafon (UDI) propose 38 recommandations pour « promouvoir cette laïcité à la française, mieux former le personnel éducatif et le doter des outils nécessaires pour conduire sa mission », a détaillé Laurent Lafon lors d’une conférence de presse.
La commission d’enquête, lancée en réponse à la demande de la famille de Samuel Paty et renforcée encore après l’assassinat de Dominique Bernard à Arras, s’attardait formellement sur le « signalement et le traitement des pressions, menaces et agressions dont les enseignants sont victimes ».
Plusieurs mesures proposées
Au cours de leurs travaux, les parlementaires ont notamment auditionné Mickaëlle Paty, la sœur de l’enseignant assassiné en 2020. « Le constat le plus marquant, c’est la terrible solitude vécue par les membres du personnel éducatif face à un quotidien marqué par les tensions et par les conflits », s’est alarmé François-Noël Buffet.
Laurent Lafon a noté lui une « méfiance » croissante entre les acteurs de terrain et leur hiérarchie administrative, évoquant un « mur » dressé entre enseignants et autorités comme le rectorat.
Les auteurs du rapport, issus de l’alliance de droite et du centre majoritaire au Sénat, proposent ainsi plusieurs mesures sur le volet de la formation, pour que l’Éducation nationale « reprenne la main » sur la formation des enseignants, en « ne faisant plus dépendre la formation initiale de l’université ».
Ils proposent également de « revoir le corpus disciplinaire » en cas de menaces et autres pressions, à travers une « harmonisation des sanctions au niveau national ».
Journée d’hommage obligatoire
Autre recommandation, faire signer chaque année aux parents d’élèves une « charte des parents », dans laquelle « sera rappelé le fait que l’enseignement ne se conteste pas ». La création de « structures dédiées à les élèves poly-exclus » ou « hautement perturbateurs » est également avancée.
Plus symbolique, ils prônent l’organisation d’une journée d’hommage obligatoire aux enseignants assassinés dans chaque établissement en début d’année scolaire.
Les sénateurs proposent par ailleurs diverses mesures de fluidification du parcours judiciaire des agents victimes d’agressions ou de menaces, comme celle de permettre à l’administration de déposer plainte elle-même en lieu et place de l’agent concerné, qui hésite parfois à le faire par peur de représailles.
Ce rapport sénatorial a été adopté à l’unanimité en commission au Sénat, mais une partie de la gauche s’est abstenue.
Il était présenté quelques jours après les menaces de mort en ligne reçues par un proviseur du lycée Maurice-Ravel de Paris qui avait demandé à une élève de retirer son voile. Un événement qui a « illustré les trous dans la raquette » de la loi de 2004 sur les signes religieux à l’école, a pointé le sénateur Laurent Lafon.
AFP