Depuis 10 jours, les associations et les proches sont sans nouvelles d’un Syrien de 27 ans disparu la nuit du 3 mars en tentant de monter dans une embarcation dans le canal de l’Aa, pour rejoindre le Royaume-Uni. Les humanitaires ont saisi mardi le parquet de Dunkerque pour reprendre les recherches, et essayer de retrouver Jumaa Alhasan.
Il est 00h01 dimanche 3 mars lorsque les équipes d’Utopia 56 du nord de la France reçoivent un message sur le téléphone d’urgence : « A person died in the river », « une personne est morte dans la rivière », en français. Cette nuit-là, plusieurs embarcations ont tenté de rejoindre les côtes britanniques en traversant la Manche.
Dans le canal de l’Aa, près de Gravelines, une fillette de sept ans perd la vie près de la commune de Watten. La même nuit, un autre migrant disparait à quelques mètres de là. Il s’agit de Jumaa Alhasan, un Syrien de 27 ans, signalent dans un communiqué plusieurs associations dont Utopia 56 et l’Auberge des migrants.
Disparition de Jumaa, 27 ans, dans l’Aa, près de Gravelines : famille, soutiens et associations demandent la reprise des recherches. Le procureur de la république de Dunkerque saisi.
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« Nous étions sur le bateau, et notre ami a essayé de venir avec nous [pour traverser] vers le Royaume-Uni.
La police est arrivée, nous avons eu peur d’avoir des problèmes. Notre ami a sauté pour nous rejoindre, mais il ne nageait pas très bien et nous l’avons perdu dans la rivière », explique Bachir, un proche de Jumaa Alhasan, aux bénévoles. « Nous avons crié à la police, et ils s’en fichaient. L’un d’eux nous a dit : ‘Ce n’est pas notre travail’ ».
Déjà 10 morts depuis janvier
Ce n’est que vers 10h que le commissariat de Dunkerque envoie un drone et une caméra thermique pour tenter de retrouver le jeune Syrien. En vain. « Quelques heures seulement après la disparition d’un homme, les recherches sont terminées », regrettent les humanitaires. La famille de Jumaa Alhasan reste depuis cette nuit tragique sans nouvelle de lui.
Mardi 12 mars, 14 associations signataires du communiqué annoncent avoir saisi le parquet de Dunkerque pour rouvrir l’enquête et ainsi reprendre les recherches.
« Pour Jumaa et sa famille, il est nécessaire que les autorités compétentes reprennent les recherches, telles qu’elles auraient été menées si la victime n’avait pas été une personne en exil », peut-on encore lire dans le document.
L’oncle du Syrien s’est rendu à Calais pour essayer de retrouver son neveu et a déposé une main courante.
Depuis le début de l’année, déjà 10 personnes sont mortes dans le nord de la France en tentant de rallier le Royaume-Uni en traversant la mer.
Pour éviter les contrôles policiers sur les plages, les migrants prennent de plus en plus de risques.
Désormais, ils empruntent les cours d’eau, qui se jettent dans la Manche ou la mer du Nord. « Avant, les trafiquants enterraient le matériel nautique sur la plage, et ils gonflaient le bateau juste avant la traversée pour ne pas être interceptés », expliquait à InfoMigrants, Xavier Delrieu, chef de l’Oltim.
« Maintenant, on a beaucoup de taxi-boats, c’est-à-dire que le bateau est gonflé et mis à l’eau sur des cours d’eau [comme la Canche, l’Aa… ndlr] qui rejoignent la mer. Les passeurs remontent ensuite la côte et chargent les passagers à un endroit bien précis, ce qui permet d’éviter l’interception sur la plage. »
Une méthode particulièrement dangereuse. Dans une mer glacée, les risques d’hypothermie ou de noyade sont grands.
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