Libye : nouvelle vidéo d’un migrant violemment torturé dans une prison de Bani Walid

Attention, les images publiées dans cet article peuvent heurter la sensibilité des lecteurs.

Les images sont insoutenables.

Dans une vidéo publiée lundi 25 mars sur le compte X (ex-Twitter) de Refugees in Libya – qui documente les exactions commises contre des migrants en Libye – on peut voir un Subsaharien violemment frappé par un homme vêtu d’une tunique blanche et d’un foulard jaune qui masque son visage.

Pendant 20 secondes, le bourreau assène plusieurs coups de pelle sur le dos et les épaules de sa victime, attachée par les pieds à un mur, à moitié nue.

On entend l’homme hurler de douleur.

https://twitter.com/RefugeesinLibya/status/1772373779575890255?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E1772373779575890255%7Ctwgr%5Ee3c5ca9e7cf604f791c36053607011fe04af9f7b%7Ctwcon%5Es1_&ref_url=https%3A%2F%2Fwww.infomigrants.net%2Ffr%2Fpost%2F56094%2Flibye–nouvelle-video-dun-migrant-violemment-torture-dans-une-prison-de-bani-walid

Près de 14 000 euros pour sa libération

L’homme torturé s’appelle Gedion Samuel Harison. Agé de 28 ans, il est originaire du centre de l’Éthiopie. Diplômé en architecture en 2021, il fuit son pays en début d’année dernière, après la mort de son père et de son frère, pour subvenir aux besoins de sa mère et de ses trois autres frères et sœurs.

Son « maigre salaire » dans un petit cabinet d’architectes d’Addis-Abeba ne lui permet par de le faire, indique Refugees in Libya, qui détaille son histoire.

Début février, sa mère reçoit un appel des ravisseurs de son fils. Puis chaque jour qui suit, des vidéos de son enfant violenté. Les trafiquants lui réclament 15 000 dollars (près de 14 000 euros) en échange de sa libération.

La mère a lancé une cagnotte en ligne pour tenter de collecter cette importante somme et a signalé l’enlèvement de son fils à la police éthiopienne. Mais les autorités ont exprimé leur impuissance dans cette affaire, la Libye étant un pays en proie au chaos.

Retenu à Bani Walid, « le pire endroit sur terre »

Gedion serait retenu à Bani Walid, à environ 200 km de Tripoli, selon Refugees in Libya. Cette ville est tristement célèbre pour être l’une des terribles étapes sur la route des migrants. En 2017, un Camerounais prénommé Issa expliquait déjà à InfoMigrants qu’il fallait « prier Dieu pour de pas être vendu dans un ghetto de Bani Walid ».

En janvier 2020, Ibrahim, un Sénégalais, racontait que « Bani Walid [était] le pire endroit sur terre ».

La ville de Bani Walid se trouve à une centaine de kilomètres de Tripoli. Crédit : Google Maps
La ville de Bani Walid se trouve à une centaine de kilomètres de Tripoli. Crédit : Google Maps

 

David Yambio, lui-même réfugié soudanais, aujourd’hui en Italie après plusieurs années en Libye, rappelle inlassablement sur les réseaux sociaux que les conditions de vie dans ces geôles de Bani Walid sont insupportables.

« Les exilés que vous voyez sont tous enfermés dans une seule pièce.

Ils doivent faire leurs besoins dans une bouteille », détaillait-il à InfoMigrants en novembre 2023, après la diffusion d’autres vidéos de violences sur des exilés à Bani Walid. « Sur les images que nous recevons, nous devinons qu’il y a plusieurs pièces dans la prison où ils sont enfermés. Mais nous sommes incapables de dire combien ».

Des abus courants en Libye

En Libye, les exactions envers les exilés sont monnaie courante. Dans ce pays en proie au chaos depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011, les groupes armés n’hésitent pas à kidnapper des migrants en pleine rue, sur la route de l’exil ou dans leur appartement, à filmer les tortures qu’ils leur infligent dans le but d’extorquer de l’argent à leurs proches.

Il n’est pas rare non plus que des gardiens des centres de détention officiels revendent eux-mêmes des migrants à des trafiquants.

Ce n’est pas la première fois que les médias – dont InfoMigrants – documentent ces graves abus. En septembre 2022, la rédaction s’était procuré les images d’un adolescent soudanais torturé en Libye par ses bourreaux réclamant là aussi une rançon. L’enlèvement et les tortures avaient eu lieu dans l’ouest de la Libye.

« L’argent… où est l’argent ? », répète à plusieurs reprises le tortionnaire.

« Tu n’as pas d’argent ? Je ne te crois pas… Donne-moi 5 000 [dinars libyens, soit environ 1 000 euros, ndlr] et tu pourras sortir d’ici », insiste-t-il tout en frappant avec un bâton et son arme le migrant à terre. L’homme fait mine de réarmer son fusil et lance : « La prochaine sera dans ta tête ».

infomigrants

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