Plus d’un mois après son commencement, le démantèlement du camp de Cavani est terminé. Si une partie de ses anciens occupants a désormais un toit sur la tête, à Mayotte ou en métropole, beaucoup se retrouvent sans solution. Et sont retournés vivre aux abords du stade qu’ils avaient quitté il y a quelques semaines.
Du camp à la rue. Quelques jours après la fin du démantèlement du camp de Cavani, à Mayotte, « entre 200 et 500 » personnes dorment à la rue, selon la préfecture de l’île. « Aujourd’hui, une partie de la population dort à l’entrée du stade, ils sont en attente de relogement », a déclaré jeudi 4 avril le préfet de l’île François-Xavier Bieuville, lors d’un déplacement sur place de la ministre déléguée aux Outre-mer Marie Guévenoux.
Cette dernière a assuré « étudier leurs dossiers pour trouver une solution ». « Avec la pression qu’on a à Mayotte c’est compliqué », a-t-elle cependant concédé.
L’association Solidarité Mayotte, qui accompagne et héberge les demandeurs d’asile sur l’île, estime elle « qu’il n’y a plus un seul logement de disponible » pour pallier cette situation.
#Mayotte | Le camp de Cavani, c’est fini !
700 personnes originaires des Grands Lacs s’étaient installés au bord du stade, rendant la vie des mahorais impossible.
Comme promis, le stade a été déblayé, sécurisé et rendu aux habitants.@GDarmanin pic.twitter.com/OL4g0KXBhH
— Marie Guévenoux (@mguevenoux) April 3, 2024
Jusqu’à 700 migrants pour la plupart originaires d’Afrique des Grands Lacs ou de Somalie, avaient trouvé refuge dans le camp de Cavani, faute de mieux. Installé à Mamoudzou, ce lieu de vie aux conditions de vie déplorables a été le point de départ d’un mouvement de contestation qui a paralysé le 101e département français pendant plus d’un mois, de fin janvier à début mars.
Durant ces blocages, les migrants ont été l’objet d’intimidations et d’agressions de la part de certains manifestants.
« J’étais aux toilettes quand ils sont arrivés avec des cagoules et m’ont attaqué », avait raconté à RFI Hendric, originaire du Rwanda.
D’abord annoncé par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin mi-janvier, son démantèlement aura pris deux mois. Il s’est achevé le 22 mars, avec le retrait de l’ensemble des tentes et la destruction de 108 bangas, des cabanes informelles faites avec de la tôle.
La préfecture a précisé qu’au total, 500 migrants ont été envoyés en métropole puis relogés.
Fin février, elle avait indiqué à l’AFP que 308 occupants du camp de Cavani ayant obtenu l’asile avaient décollé à destination de l’Hexagone. Environ 200 d’entre eux – essentiellement des familles ou des femmes seules – avaient été accueillis à Thiverval-Grignon (Yvelines), sur un domaine appartenant à l’État.
Toujours selon les autorités, 500 autres migrants sont actuellement hébergés à Mayotte.
Bientôt Wuambushu 2
Si Marie Guévenoux s’est félicitée de la « fin » du camp de Cavani, la ministre a également profité de son déplacement pour annoncer la mise en place prochaine de l’opération Wuambushu 2.
Lancée au printemps 2023, Wuambushu 1, destinée à lutter contre la criminalité, l’immigration illégale et l’habitat insalubre à Mayotte, visait notamment à tarir le flux des arrivées de migrants des Comores voisines et à détruire les bangas organisés en bidonville, de plus en plus nombreux.
Wuambushu 1 devait initialement durer deux mois, mais lors d’un déplacement sur l’île en juin, Gérald Darmanin avait annoncé son prolongement jusqu’à « la fin de l’année ».
Dès son annonce, cette opération avait divisé sur l’île. Soutenue par de nombreux élus et une grande partie de la population mahoraise, la destruction des bidonvilles posait aussi la question du relogement des personnes concernées. « Il y a une volonté de résorber les bidonvilles sauf qu’il y a 150 000 personnes qui habitent dans les logements informels à Mayotte.
Vouloir déloger ces gens sans alternative, cela crée de la précarité, de la violence et de la déscolarisation », avait déploré l’avocate Marjane Ghaem.
« Quand on est un Comorien à Mayotte, on vit toujours dans la peur de se faire expulser, avait confié Issouf à InfoMigrants en avril 2023. Moi, j’ai déjà été expulsé quatre fois, Wuambushu ou pas ».
À chaque fois, l’homme de 42 ans est remonté dans un kwassa-kwassa (bateau de pêche comorien utilisé par les migrants pour rejoindre Mayotte) et a traversé les quelque 70 kilomètres qui séparent l’île du 101e département français.
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